1 L’exploitation et le commerce intensifs de certaines espèces de faune et de flore sauvages impliquent de fortes pressions sur leur survie au point que certaines sont aujourd’hui menacées d’extinction ou risqueraient de l’être si les tendances n’étaient pas inversées. Cette expansion est notamment due au gain que rapporte un tel commerce avec des chiffres annuels vertigineux allant jusqu’à 23 milliards de dollars rien que pour le commerce illégal des espèces de faune dont 400 millions pour le marché illégal de l’ivoire d’éléphant. C’est ainsi que s’est imposée l’idée de définir un cadre conventionnel international visant à conjuguer des efforts communs pour assurer un commerce durable desdites espèces et, partant, de les protéger et de lutter contre leur commerce illicite. D’où la signature, en date du 3 mars 1973, de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES).
2 Près de cinquante ans après la signature de la CITES, et en dépit des lois nationales d’application, ainsi que des mécanismes et outils mis en place aux fins de la régulation de ce commerce, la criminalité liée aux espèces sauvages continue de prendre des proportions inquiétantes au regard notamment de l’augmentation croissante du nombre et du volume des saisies desdites espèces. Ceci reflète partiellement l’état de menace de plusieurs espèces sauvages dont l’éléphant, braconné pour la commercialisation de son ivoire. Un tel commerce, souvent facilité par la corruption, le blanchiment d’argent et la cybercriminalité, a de forts impacts tant sur la paix et la sécurité nationale et internationale que sur la santé humaine.
3 De l’évaluation de l’effectivité et l’efficacité de la CITES ainsi que de sa mise en œuvre en Belgique et en République démocratique du Congo, il ressort notamment que les États sont écartelés entre les pesanteurs économiques, scientifiques et politiques. En outre, certaines lacunes de leurs cadres légaux et la faible application de ceux-ci sont largement exploitées par les réseaux criminels qui en profitent pour piller les ressources naturelles, développer leurs activités illicites et financer en toute impunité (ou presque) des conflits. Le faible risque que présente le trafic d’espèces sauvages ou de produits forestiers offre également une niche facilitant le financement international de groupes extrémistes et du terrorisme. Aussi, avons-nous formulé certaines recommandations parmi lesquelles des amendements à la CITES visant notamment l’institution d’un mécanisme financier en appui à cette Convention ainsi que l’élaboration des stratégies nationales CITES assorties de plans de mise en œuvre et de plans de lutte contre la criminalité liée aux espèces sauvages. Et, dans une vision prospective, l’élargissement des compétences de la Cour pénale internationale en vue d’y insérer l’écocide comme cinquième crime sur la liste des crimes relevant de cette Cour tels que limitativement énumérés à l’article 5 du Statut de Rome a été préconisé. Une telle démarche a également amené à s’interroger sur le rôle de la Cour internationale de justice en matière de règlement de différends et de responsabilité internationale des États en matière environnementale.
4 En somme, les contributions apportées spécifiquement en matière de droit peuvent être considérées comme des apports dans la conceptualisation du droit international de l’environnement. Les analyses et propositions prospectives avancées ont pour objectif de renforcer l’effectivité et l’efficacité de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction, laquelle peut utilement contribuer à la lutte contre la criminalité liée aux espèces sauvages.
Date de mise en ligne : 27/06/2023