Notes
-
[1]
Règlement (CE) n° 338/97 du Conseil du 9 décembre 1996 relatif à la protection des espèces de faune et de flore sauvages par le contrôle de leur commerce (JO L 61 du 3 mars 997, p. 1-69).
-
[2]
Règlement (CE) n° 865/2006 de la Commission du 4 mai 2006 portant modalités d’application du règlement (CE) n° 338/97 du Conseil relatif à la protection des espèces de faune et de flore sauvages par le contrôle de leur commerce (JO L 166 du 19 juin 2006, p. 1-69).
-
[3]
Voir également le commentaire d’É. Naim-Gesbert, cette revue, p. 817.
-
[4]
CJUE, 21 juin 2018, Commission/Malte, C-557/15.
-
[5]
CJUE, 23 avril 2020, Commission/Finlande (chasse printanière à l’eider à duvet mâle), C-217/19, point 65.
1CJUE (septième chambre), 12 mai 2021, Hauptzollamt B c. XY, C-87/20.
2Afin d’assurer le commerce durable de caviar, toutes les espèces d’esturgeons figurent sur la liste de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES) ainsi que dans la réglementation de l’UE sur le commerce des espèces sauvages [1]. En règle générale, l’importation ou l’exportation/la réexportation de caviar d’esturgeon sans permis CITES valide est un délit. Tout individu est autorisé à importer jusqu’à 125 grammes de caviar d’esturgeon sans permis CITES spécial pour son usage personnel.
3Dans cette affaire, la septième chambre de la CJUE est saisie d’une question préjudicielle formée par la Cour fédérale des finances en Allemagne, dans le cadre d’un litige opposant le bureau principal des douanes en Allemagne à une citoyenne tchèque. Cette dernière a transporté, en décembre 2015, 300 grammes de caviar d’esturgeon. Les douaniers ont confisqué les six boîtes de caviar, d’un poids de 50 grammes chacune, en raison de l’absence du permis d’importation conformément à l’article 51, paragraphe 2, de la loi fédérale sur la protection de la nature. Suite à cette confiscation par le bureau principal des douanes, la dite citoyenne a introduit un recours devant le Tribunal des finances de Düsseldorf. Celui-ci a partiellement accueilli ce recours en jugeant que cette confiscation était illégale, dans la mesure où le bureau principal des douanes aurait dû laisser à l’importatrice deux des six boîtes de caviar concernées, correspondant à une quantité n’excédant pas 125 g. Ces boîtes n’étaient pas destinées à des fins commerciales mais devaient être offertes à des membres de sa famille.
4La Cour de justice répond aux deux questions préjudicielles portant sur l’interprétation de l’article 57 du règlement n° 865/2006 [2]. Elle doit déterminer premièrement si la personne qui importe avec elle une quantité totale de plus de 125 g de caviar d’esturgeon dans des conteneurs munis d’un marquage individuel, sans présenter de document de (ré)exportation ni de permis d’importation, doit se voir restituer une quantité de 125 g de caviar pour autant que l’importation ne vise aucune des fins énoncées à l’article 57, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n° 865/2006. Et deuxièmement si cette importation était à titre « d’effets personnels ou domestiques ».
5Pour la Cour « le caviar d’esturgeons, lors de son introduction sur le territoire douanier de l’Union, peut être considéré comme étant un "effet personnel ou domestique", au sens de cette disposition, lorsqu’il est destiné à être offert comme présent à un tiers, pour autant qu’aucun élément ne révèle une finalité commerciale, et peut bénéficier, ainsi, de la dérogation, prévue à ladite disposition, à l’obligation pour son importateur de présenter un permis d’importation. » (point 37).
6La Cour conclut que l’article 57, paragraphe 5, sous a), du règlement n° 865/2006 doit être interprété en ce sens que, lorsque la quantité de caviar d’esturgeons introduite sur le territoire douanier de l’Union excède la limite de 125 g par personne et que l’importateur n’est pas en possession d’un permis délivré aux fins de l’importation effectuée, l’intégralité de la quantité de caviar d’esturgeons ainsi importée doit être confisquée par l’autorité douanière compétente.
7Shérazade ZAITER
8CJUE (1ère Chambre), 17 mars 2021, One Voice et Ligue pour la protection des oiseaux c. Ministre de la Transition écologique et solidaire, C-900/19 [3].
9L’usage traditionnel de certaines méthodes de chasse ont toujours fait partie des pratiques ancrées dans le patrimoine national, pratiques qui peuvent venir heurter la protection de la biodiversité.
10En l’espèce, le ministre de la Transition écologique et solidarité a, par les arrêtés du 24 septembre 2018, fixé le nombre maximum d’oiseaux qui pouvaient être capturés par l’emploi de gluaux pendant la campagne de chasse de 2018-2019. Mécontentes de ces dispositions ministérielles, les associations de protection d’oiseaux ont introduit des recours en annulation devant le Conseil d’État à l’encontre de ces actes, faisant valoir qu’ils ont été adoptés en méconnaissance des dispositions de l’article 9, paragraphe 1, de la directive « oiseaux », particulièrement en ce qu’il autorise une méthode de chasse traditionnelle non sélective par l’emploi de gluaux sans qu’il ne soit justifié l’inexistence d’une autre solution satisfaisante.
11Dans un arrêt de 2018 [4] la Cour de justice avait jugé qu’une législation nationale qui autorisait une autre méthode de chasse traditionnelle ne remplissait pas les conditions requises à l’article 9, paragraphe 1, sous c), de la directive « oiseaux » pour déroger à l’article 8 si le caractère sélectif de la méthode de capture n’était pas suffisamment précis sur l’ampleur des prises accessoires. En l’espèce, est soulevée la question de savoir si, au sens de l’article 9, paragraphe 1, sous c), le caractère traditionnel d’une méthode de capture d’oiseaux peut suffire à établir qu’une autre solution satisfaisante ne peut être substituée à cette méthode. La Cour répondra par la négative.
12En ce qui concerne le caractère traditionnel de la chasse, le juge avance que les conditions permettant de déroger au régime dudit article sont satisfaites lorsqu’elles reposent sur des connaissances scientifiques bien établies. Dès lors, les dispositions nationales en appliquant le régime de dérogation prévu à l’article 9 doivent faire en sorte que ces critères de dérogations soient « clair[s] et précis[s] et impose[nt] à l’autorité compétente de vérifier qu’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante au sens de cet article. » Par conséquent, une législation nationale souhaitant mettre en œuvre les dérogations de l’article 9 ne peut se limiter à la seule indication selon laquelle « il n’existe pas d’autre solution satisfaisante, sans que cette indication soit étayée par une motivation circonstanciée, fondée sur les meilleures connaissances scientifiques pertinentes » (point 32). Certes, il résulte d’une jurisprudence antérieure [5] que les méthodes traditionnelles sont susceptibles de relever de la notion d’ « exploitation judicieuse ». Toutefois, le juge relève que l’article 2 de cette même directive prévoit que les États membres mettent en œuvre la protection de la biodiversité en tenant compte des exigences écologiques, scientifiques, et culturelles… Ainsi, la Cour a de façon constante jugé que maintenir les activités traditionnelles ne constitue nullement une dérogation autonome au régime de protection établi par la directive « oiseaux » qui poursuit l’objectif principal de la protection des oiseaux.
13Le caractère traditionnel d’une méthode de ponction d’animaux sauvages relève certes d’usages locaux, le but de les conserver ne suppose pas une condition satisfaisante suffisante en elle-même. De même dans la vérification de l’inexistence d’autre solution satisfaisante, une comparaison des différentes solutions doit pouvoir répondre aux conditions dudit article afin de déterminer les plus satisfaisantes.
14Augusta GOUSSOUTOU
Date de mise en ligne : 28/01/2022
Notes
-
[1]
Règlement (CE) n° 338/97 du Conseil du 9 décembre 1996 relatif à la protection des espèces de faune et de flore sauvages par le contrôle de leur commerce (JO L 61 du 3 mars 997, p. 1-69).
-
[2]
Règlement (CE) n° 865/2006 de la Commission du 4 mai 2006 portant modalités d’application du règlement (CE) n° 338/97 du Conseil relatif à la protection des espèces de faune et de flore sauvages par le contrôle de leur commerce (JO L 166 du 19 juin 2006, p. 1-69).
-
[3]
Voir également le commentaire d’É. Naim-Gesbert, cette revue, p. 817.
-
[4]
CJUE, 21 juin 2018, Commission/Malte, C-557/15.
-
[5]
CJUE, 23 avril 2020, Commission/Finlande (chasse printanière à l’eider à duvet mâle), C-217/19, point 65.