Notes
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[1]
Thomas Deleuil est docteur en droit public (Université Aix-Marseille), conseiller juridique au sein du Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique et ancien conseiller juridique de l’équipe de négociation française COP21 (2014-2016). Les opinions exprimées sont celles de l’auteur et ne représentent en aucun cas les vues du Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique ou de l’Organisation des Nations unies.
-
[2]
Whanganui Iwi and The Crown, Tūtohu Whakatupua, 30 août 2012, §1.1.
-
[3]
E. L. O’Donnel, J. Talbot-Jones, « Creating legal rights for rivers: lessons from Australia, New Zealand, and India », Ecology and Society, Volume 23(1):7, 2018, p. 1, https://doi.org/10.5751/ES-09854-230107. Les auteurs font notamment ici référence aux travaux de C. D. Stone (voir, Should Trees Have Standing?: Law, Morality, and the Environment, 3ème édition, Oxford University Press, 2010, 248 p.). V. également V. David, « La nouvelle vague des droits de la nature. La personnalité juridique reconnue aux fleuves Whanganui, Gange et Yamuna », RJE, 3/2017, p. 409.
-
[4]
Sur l’historique du conflit entre les autorités britanniques puis néo-zélandaises et les Maoris du fleuve Whanganui, voir : E. Hsiao, « Whanganui River Agreement - Indigenous Rights and Rights of Nature », Environmental Policy and Law, décembre 2012, https://www.researchgate.net/publication/235671679_Whanganui_River_Agreement_-_Indigenous_Rights_and_Rights_of_Nature.
-
[5]
E. Hsiao, op. cit., p. 371.
-
[6]
New Zealand History, The Treaty in brief, https://nzhistory.govt.nz/politics/treaty/the-treaty-in-brief.
-
[7]
Traité de Waitangi, articles 1 et 2.
-
[8]
Voir E. Hsiao, op. cit., pour une liste complète des affaires considérées.
-
[9]
Loi sur le Traité de Waitangi, art. 4 : http://www.legislation.govt.nz/act/public/1975/0114/107.0/DLM435368.html.
-
[10]
Traité de Waitangi, article 6 §3.
-
[11]
Tribunal de Waitangi, The Whanganui River Report, 1999, p. 339 :
https://forms.justice.govt.nz/search/Documents/WT/wt_DOC_68450539/Whanganui%20River%20Report%201999.pdf. -
[12]
Tribunal de Waitangi, The Whanganui River Report, op. cit., p. 343-344.
-
[13]
Voir entre autres l’Accord – Tūtohu Whakatupua – du 30 août 2012 portant sur la volonté de la Couronne et des Maoris de mettre en œuvre un règlement global des requêtes Maoris concernant le traité de Waitangi et concernant le fleuve Whanganui : https://static1.squarespace.com/static/55914fd1e4b01fb0b851a814/t/560842cbe4b017614f85bf30/1443381963419/Whanganui+River+Agreement.pdf.
-
[14]
Parlement de Nouvelle-Zélande, Te Awa Tupua (Whanganui River Claims Settlement) Act, 2017, http://www.legislation.govt.nz/act/public/2017/0007/latest/whole.html#DLM6831751. Sur la procédure législative : Parlement de Nouvelle-Zélande, Te Awa Tupua (Whanganui River Claims Settlement) Bill, https://www.parliament.nz/en/pb/bills-and-laws/bills-proposed-laws/document/00DBHOH_BILL68939_1/tab/hansard. Voir également : L. Te Aho, « Ruruku Whakatupua Te Mana o te Awa Tupua – Upholding the Mana of the Whanganui River », Maori Law Review, May 2014, https://maorilawreview.co.nz/2014/05/ruruku-whakatupua-te-mana-o-te-awa-tupua-upholding-the-mana-of-the-whanganui-river/ ; Parlement de Nouvelle-Zélande, Innovative bill protects Whanganui River with legal personhood, 28 mars 2017, https://www.parliament.nz/en/get-involved/features/innovative-bill-protects-whanganui-river-with-legal-personhood/ ; D. Cheater, « I am the River, and the River is me: Legal personhood and emerging rights of nature », West Coast Environmental Law, 22 mars 2018, https://www.wcel.org/blog/i-am-river-and-river-me-legal-personhood-and-emerging-rights-nature.
-
[15]
River Claims Settlement Act, art. 14§1.
-
[16]
River Claims Settlement Act, art. 20§1 et 2.
-
[17]
River Claims Settlement Act, art. 14§2 et art. 18§1, 2 et 3.
-
[18]
River Claims Settlement Act, art. 19§2.
-
[19]
River Claims Settlement Act, art. 57§1, 2 et 3 ; E. L. O’Donnel, J. Talbot-Jones, op. cit., p. 4 ; Accord de règlement, Whanganui River Deed of Settlement between the Crown and Whanganui Iwi, p. 2, https://www.govt.nz/treaty-settlement-documents/whanganui-iwi/whanganui-iwi-whanganui-river-deed-of-settlement-summary-5-aug-2014/.
-
[20]
Whanganui River Deed of Settlement between the Crown and Whanganui Iwi, op. cit., p. 4.
-
[21]
Constitution de l’Équateur, 20 octobre 2008, http://pdba.georgetown.edu/Constitutions/Ecuador/english08.html ; Constitution de l’État plurinational de Bolivie, 7 février 2009, https://www.constituteproject.org/constitution/Bolivia_2009.pdf ; Loi bolivienne 071 sur les droits de la Terre nourricière, 21 décembre 2010, http://www.cedla.org/sites/default/files/Ley%20N%C2%B0%20071%20DERECHOS%20DE%20LA%20MADRE%20TIERRA.pdf ; Loi bolivienne 300 sur le cadre bolivien pour la Terre nourricière et le développement harmonieux du bien-être, 15 octobre 2012, http://www.harmonywithnatureun.org/content/documents/157Bolivia%20Ley%20300.pdf. Voir également : S. Borràs Pentinat, « Biocentric Approach to Protect Nature: the Bolivian Regulations on Mother Earth and Living Well », in International Environmental Law: Contemporary Concerns and Challenges in 2014, GV Zalozba 2014, p. 148.
-
[22]
Constitution de l’Équateur, art. 71.
-
[23]
Constitution de l’État plurinational de Bolivie, Préambule, §1.
-
[24]
Constitution de l’État plurinational de Bolivie, art. 33.
-
[25]
S. Borràs Pentinat, op. cit., p. 142. Sur la distinction entre la nature sujet ou objet de droit, voir : F. Ost, « Au-delà du sujet et de l’objet : un projet pour le milieu », in Quel avenir pour le droit de l’environnement ?, VUBPress 1996 ; D. Shelton, « Nature as a legal person », VertigO - Revue électronique en sciences de l’environnement, Hors-série 22, 2015.
-
[26]
Voir ci-après.
-
[27]
Ce « tribunal national vert » a compétence pour connaître des affaires relatives à « la protection de l’environnement, la conservation des forêts et des autres ressources naturelles, y compris l’application des droits relatifs à l’environnement » (Loi n° 19 sur le tribunal national vert, 2 juin 2010, The Gazette of India, n° 25, http://faolex.fao.org/docs/pdf/ind98219.pdf). Par exemple, l’affaire Prafulla Samantra and Anr. vs Union of India and Ors. a illustré la question de la protection des forêts et des communautés locales (Tribunal national vert, 30 mars 2012, Praffula Samantra vs Union Of India And Others, appel n° 8/2011, https://indiankanoon.org/doc/106573119/) tandis que l’affaire Vardhaman Kaushik v. Union of India l’a conduit à prendre des mesures afin de réduire la pollution de l’air à Delhi (Tribunal national vert, 10 avril 2015, Vardhaman Kaushik v. Union of India, ordonnance rendue suite aux affaires n° 21/2014 et 95/2014, http://www.greentribunal.gov.in/Writereaddata/Downloads/95-2014(PB-I)OA7-4-2015.pdf).
-
[28]
Le Chili a créé les « tribunaux environnementaux », juridictions spéciales fonctionnant directement sous autorité de la Cour suprême, et ayant pour fonction de résoudre les affaires environnementales relevant de sa compétence (Loi n. 20.600 sur la création des tribunaux de l’environnement, art. 1, 28 juin 2012, https://www.leychile.cl/Navegar?idNorma=1041361).
-
[29]
La Charte de l’environnement consacre le devoir de chacun de prévenir les atteintes à l’environnement ou, à défaut, d’en limiter les conséquences ; devoir accompagné de l’obligation de réparer les dommages causés (Loi constitutionnelle n° 2005-205 sur la Charte de l’environnement, 1er mars 2005, Journal Officiel, 2 mars 2005, articles 3 et 4). Dans l’affaire de l’Erika, le Tribunal de grande instance, la Cour d’appel de Paris et la Cour de Cassation ont consacré l’existence du préjudice écologique (Cass. crim., 25 septembre 2012, n° 10-82.938, https://www.courdecassation.fr/IMG///Crim_arret3439_20120925.pdf ; M.-P. Camproux-Duffrène, D. Guihal, « De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace et l’environnement sauvé ! », RJE 3/2013, p. 457 ; L. Neyret, « L’affaire Erika : moteur d’évolution des responsabilités civile et pénale », Recueil Dalloz 2010, p. 2238). La loi du 8 août 2016 reconnaît finalement en son titre 4, article 1386-19, « Toute personne responsable d’un préjudice écologique est tenue de le réparer » (Journal Officiel, n° 0184, 9 août 2016 ; M. Boutonnet, « Quelle action en responsabilité civile pour la réparation du préjudice écologique ? », Énergie – Environnement – Infrastructures, juin 2017, p. 1-5).
-
[30]
En 2010, l’Australie confère les droits et la gestion de la rivière Victoria au Victorian Environmental Water Holder. Comme dans le cas néo-zélandais, l’organe est doté de la personnalité juridique et décide comment utiliser les ressources en eau chaque année, dans le but de maintenir la santé de l’environnement (E. L. O’Donnel, J. Talbot-Jones, op. cit., p. 3-4 ; E. L. O’Donnell, « Australia’s environmental water holders: Who is managing our environmental water? », Australian Environment Review, Vol. 28(3):508-513, 2013).
-
[31]
Le 20 mars 2017, la Haute Cour d’Uttarakhand déclare : « le Gange, le Yamuna, tous leurs affluents, ruisseaux et tout cours d’eau courant naturellement, de façon continue ou intermittente, avec eux, sont déclarés être des personnes juridiques, des entités naturelles ayant la personnalité juridique, avec tous droits, devoirs et responsabilités d’une personne vivante ». Bien qu’elle suive de quelques jours l’adoption du River Claims Settlement Act, cette décision adopte une approche différente. La Cour utilise le principe de tutelle pour conférer la personnalité juridique au Gange et au Yamuna. Les fleuves sont identifiés comme des personnes mineures et la Cour désigne les personnes qui doivent agir in loco parentis (Haute Cour d’Uttarakhand, Salim v. State of Uttarakhand, soumission écrite (PIL) n°126 de 2014 (5 décembre 2016 et 20 mars 2017), https://elaw.org/system/files/attachments/publicresource/in_Salim__riverpersonhood_2017.pdf?_ga=2.206797142.473785981.1572295963-888546077.1572295963). Voir : E. L. O’Donnel, J. Talbot-Jones, op. cit., p. 4-5 ; E. L. O’Donnell, « At the intersection of the sacred and the legal: rights for nature in Uttarakhand, India », Journal of Environmental Law, Vol. 30-1, mars 2018, p. 135-144. En juillet 2017, la Cour suprême indienne a suspendu la décision de la Haute Cour. L’affaire est toujours débattue en appel.
-
[32]
River Claims Settlement Act, art. 16 (a).
-
[33]
River Claims Settlement Act, art. 46§2 (b).
-
[34]
River Claims Settlement Act, art. 19§1 (d) (i) and (ii).
-
[35]
River Claims Settlement Act, art. 19§1 et §2.
-
[36]
Deux personnes : un représentant de la Couronne et un représentant des Maoris du fleuve Whanganui.
-
[37]
Voir T. Deleuil, « La protection de la ʻterre nourricièreʼ : un progrès pour la protection de l’environnement ? », RJE, 2/2017, p. 255-272.
Introduction
« Ko au te awa, Ko te awa ko au – I am the river and the river is me » [2]
1Le 20 mars 2017, en Nouvelle-Zélande, l’assentiment royal est donné à une loi longuement attendue – le River Claims Settlement Act. Cette loi consacre la personnalité juridique et les droits du fleuve Whanganui et des Maoris vivant sur ses berges. Dès sa promulgation, le River Claims Settlement Act est qualifié d’avancée historique par les Maoris de Nouvelle-Zélande, les associations de droit de l’Homme, les organisations environnementales, mais également le gouvernement néo-zélandais.
2Comme le notent O’Donnel et Talbot-Jones, « le concept consistant à reconnaître des droits à des entités non-humaines n’est pas nouveau, mais il a été utilisé seulement récemment en ce qui concerne la nature » [3]. En l’espèce, cette loi constitue un développement sans précédent en Nouvelle-Zélande et sans équivalent dans la plupart des États occidentaux. Il offre de plus un nouveau modèle législatif pour la protection des droits autochtones et de l’environnement.
3Après avoir brièvement rappelé le contexte historique de ce cas (I.), nous étudierons donc la loi elle-même et les droits consacrés pour le fleuve Whanganui et les Maoris (II.). Cette étude du texte législatif nous permettra de mettre en lumière les particularités de ce modèle par rapport aux approches retenues par d’autres États en matière de protection de l’environnement (III.).
I – Historique du conflit autour du fleuve Whanganui [4]
4Le fleuve Whanganui est le plus long fleuve navigable de Nouvelle-Zélande. Au fil du temps, il a été utilisé pour de nombreuses activités humaines et industrielles. Des populations maories – les Whanganui Iwi – ont toujours vécu sur ses rives et considèrent le fleuve comme leur ancêtre [5]. Elles se sont ainsi organisées en gardiennes de leur environnement. De là découle le concept de « Te Awa Tupua », une entité unique désignant le fleuve, son écosystème et les Maoris vivant sur ses berges.
5Le 6 février 1840, les représentants de la Couronne britannique et les chefs Maoris signent le Traité de Waitangi, acte fondamental établissant la souveraineté britannique sur l’archipel néo-zélandais [6]. À l’article 2, la Reine garantit aux chefs et tribus la possession « exclusive et non-disputée » des terres, forêts et pêcheries et autres propriétés qu’ils possèdent collectivement ou individuellement. Cependant, à l’article 1 du même Traité, les chefs Maoris « cèdent à Sa Majesté la Reine, absolument et sans réserve, tous les droits et pouvoirs de souveraineté qu’ils exercent ou possèdent, respectivement » [7]. L’exploitation du fleuve par les colons, du fait de l’essor de l’industrie britannique, devait cependant créer une véritable cascade de différends juridiques et politiques entre les autorités gouvernementales et les Maoris [8]. Cependant aucune de ces affaires ne débouche sur une reconnaissance des droits coutumiers des Maoris, pourtant consacrés par le Traité de Waitangi. La reconnaissance de droits autonomes pour le fleuve lui-même n’est évidemment pas envisagée.
6En 1988 est créé le Whanganui River Maori Trust Board, chargé de négocier les multiples affaires portées par les Maoris en reconnaissance de leurs droits coutumiers. Ce Comité décide de porter l’ensemble de ces contestations devant le Tribunal de Waitangi, établi par l’article 4 de la loi d’application du Traité de Waitangi adoptée en 1975 [9]. Le Tribunal a pour mandat d’étudier les violations alléguées du Traité de Waitangi. S’il estime une requête fondée, « il […] peut recommander à la Couronne d’adopter des mesures pour compenser ou faire cesser le préjudice, ou empêcher que d’autres personnes soient affectées de la même façon dans le futur » [10]. Le Tribunal est saisi de deux questions : la reconnaissance des droits coutumiers des Maoris du fleuve Whanganui et la détermination de l’entité ayant autorité pour assurer la gestion du fleuve et de ses abords. Le Tribunal produit son rapport en 1999. Il relève de nombreuses violations du Traité de Waitangi par la Couronne [11]. Il propose de (i) reconnaître l’autorité et la propriété des Maoris sur le fleuve Whanganui dans la législation ; (ii) négocier un règlement final entre la Couronne et le Whanganui River Maori Trust Board ; (iii) créer un organe constitué d’un nombre égal de représentants de la Couronne et des Maoris pour partager la propriété du lit du fleuve et du fleuve lui-même [12].
7Sur la base de cette recommandation, le gouvernement néo-zélandais entama des négociations [13] qui aboutirent à la présentation, le 2 mai 2016, d’un projet de loi qui deviendrait, un peu moins d’un an plus tard, le River Claims Settlement Act.
II – Le River Claims Settlement Act et les droits reconnus aux Maoris et au fleuve Whanganui
8Le River Claims Settlement Act est donc promulgué le 20 mars 2017 [14]. En son article 12, la loi reconnaît l’entité Te Awa Tupua comme un « tout indivisible et vivant, comprenant le fleuve Whanganui, depuis les montagnes jusqu’à la mer, incorporant tous ses éléments physiques et métaphysiques ». Or cette définition inclut les Maoris qui vivent le long du fleuve. Te Awa Tupua est consacrée comme sujet de droit, possédant les droits, pouvoirs, devoirs et responsabilités attachés à la personnalité juridique [15].
9La loi établit également un organe, Te Pou Tupua, qui est la « face humaine » de Te Awa Tupua et se compose de deux personnes : un représentant de la Couronne et un représentant des Maoris du fleuve Whanganui [16]. Te Pou Tupua a pour mandat de représenter les intérêts et d’exercer les droits et devoirs de Te Awa Tupua [17]. Dans l’exercice desdites fonctions, la loi prévoit que l’organe Te Pou Tupua doit : (a) agir dans l’intérêt de Te Awa Tupua ; (b) développer les mécanismes appropriés pour s’engager avec et faire rapport aux Maoris ayant des intérêts sur le fleuve Whanganui sur les faits concernant Te Awa Tupua, en reconnaissant la connexion inaliénable entre les Maoris et le fleuve ; (c) faire des rapports publics sur les affaires de Te Awa Tupua ; (d) engager toute agence, organe de prise de décision aux fins de mise en œuvre du statut de Te Awa Tupua ; (e) participer à tout processus juridique concernant Te Awa Tupua pour lequel l’organe Te Pou Tupua possède un intérêt à agir [18].
10Enfin, un fonds (nommé Te Korotete o Te Awa Tupua) est institué afin d’administrer une contribution de la Couronne de 30 millions de dollars néo-zélandais, prévue par l’Accord de règlement signé entre les Maoris et la Couronne en 2014 [19]. L’Accord de règlement prévoit également le versement d’une somme de 80 millions de dollars néo-zélandais pour réparer les « actions et omissions » de la Couronne ainsi qu’une contribution de 1 million de dollars néo-zélandais pour couvrir les coûts de transition et d’établissement de la structure juridique protégeant Te Awa Tupua [20].
11Au-delà de reconnaître la personnalité juridique de Te Awa Tupua et de garantir des droits autonomes pour le fleuve et les Maoris vivant sur ses rives, le River Claims Settlement Act établit donc également les structures administratives et juridiques chargées de préserver et d’exercer ces droits. De plus, la loi fournit les ressources nécessaires à la mise en œuvre de ces droits.
III – Le River Claims Settlement Act : entre innovation globale et spécificités locales
12L’exemple du River Claims Settlement Act est intéressant ne serait-ce que parce qu’il s’agit du seul cas dans lequel un contentieux colonial, devenu post-colonial, touchant aux droits économiques et sociaux, aux droits autochtones et au droit de l’environnement, a entraîné des conflits politiques, juridiques, l’avis d’un tribunal spécial, la négociation d’un accord de règlement et finalement l’adoption d’une loi par un parlement national.
13Plus spécifiquement cependant, il s’agit tout d’abord de la première décision qui consacre et protège les droits de populations autochtones et d’une zone naturelle dans une entité dotée de la personnalité juridique : Te Awa Tupua.
14Certains pays andins, comme la Bolivie et l’Équateur, ont consacré la protection de la « Terre nourricière », « Terre Mère » ou « Pachamama » [21]. Cependant la protection garantie est différente. Dans le cas de l’Équateur, le droit reconnaît la « Nature » comme une personne, au sens juridique, avec laquelle doit se maintenir une coexistence harmonieuse [22]. Cela passe notamment par la création d’un mécanisme d’actio popularis. Dans le cas de la Bolivie, le concept de « Terre nourricière » est consacré par le préambule de la Constitution [23]. Le chapitre V de la Constitution garantit ensuite le droit à un environnement saint [24]. Contrairement au droit équatorien, le modèle bolivien envisage la nature « comme un objet sans défense et vulnérable nécessitant la défense de l’État » [25]. Cette défense est également garantie par le développement d’une actio popularis. La nature est donc ici dotée de droits autonomes, mais elle est envisagée dans son intégralité. Le droit ne crée pas de sous-ensemble incluant une zone particulière, son environnement et les populations autochtones y vivant. De plus, les droits de Te Awa Tupua sont exercés par l’organe Te Pou Tupua et non par le biais d’une actio popularis [26].
15Diverses avancées sont intervenues dans d’autres pays. Ainsi, l’Inde [27] et le Chili [28] ont établi des tribunaux spéciaux dédiés au seul contentieux environnemental. Parallèlement, la France a reconnu le préjudice écologique pur [29], qui n’existait pas auparavant. Cependant, ces avancées n’ont pas induit de reconnaissance de droits autonomes à la nature ou à des populations autochtones. Enfin, l’Australie a consacré les droits de la rivière Victoria, représentée par un organe spécifiquement créé [30], et la justice indienne s’est prononcée sur la personnalité juridique du Gange [31]. Cependant, là encore, cette protection est principalement centrée sur l’environnement quand le modèle retenu par la Nouvelle-Zélande établit une reconnaissance et une protection égales du fleuve et des Maoris vivant dans la zone. Il ne s’agit évidemment pas de considérer que la reconnaissance de droits à la nature ou la protection de l’environnement en général doit obligatoirement passer par la reconnaissance de droits autochtones. De fait, même l’exemple néo-zélandais soulève certaines questions.
16En effet, on se trouve en présence d’une entité nouvelle dotée de la personnalité juridique, Te Awa Tupua. Les éléments naturels (le fleuve et son écosystème) de Te Awa Tupua accèdent à la personnalité juridique à travers cette entité. Cependant, Te Awa Tupua inclut également les Maoris de la zone, c’est-à-dire des citoyens néo-zélandais qui, eux, possèdent déjà leur personnalité juridique propre. L’exercice des droits de Te Awa Tupua par l’organe Te Pou Tupua permet d’éviter la question du fonctionnement de cette double personnalité juridique des populations Maories considérées. Toutefois, conceptuellement, ce modèle semble être à la fois un brillant compromis et une construction difficile à appréhender pour le juriste. Cela étant, l’exemple néo-zélandais montre que la protection des droits autochtones peut être un biais pour assurer la protection de l’environnement. En effet, les traditions culturelles et cultuelles de ces populations ne pourront s’épanouir pleinement que dans un environnement préservé.
17Ensuite, le compromis trouvé innove quant à son approche des droits de propriété. Ainsi, le River Claims Settlement Act reconnaît que rien dans la loi ne limite les droits de propriété préexistants dans la zone du fleuve Whanganui [32]. S’agissant du transfert de certaines zones sous le contrôle de la Couronne, il est spécifiquement indiqué que ce transfert n’affecte en aucun cas les « droits de propriété existants, y compris les droits et titres coutumiers » [33]. Parallèlement, il est prévu que l’organe Te Pou Tupua exerce les fonctions de propriétaire foncier au nom de Te Awa Tupua [34]. Il a pu être dit que cette solution était le résultat d’une opposition irrésolue entre le Gouvernement et les Maoris. En effet, attribuer la personnalité juridique à Te Awa Tupua et confier la gestion du fleuve à cet organe revenait à reconnaître que le fleuve n’appartenait à personne plutôt que de trancher en faveur de l’une ou l’autre des parties. Pour autant, il est indéniable que les droits coutumiers des Maoris, consacrés dans le Traité de Waitangi, sont pleinement réaffirmés. De plus, via leur participation dans l’organe Te Pou Tupua, les Maoris et la Couronne pourront assurer qu’un équilibre soit maintenu entre leurs intérêts respectifs tout en travaillant conjointement à la protection de l’environnement du fleuve Whanganui.
18Enfin, le modèle néo-zélandais est intéressant du point de vue judiciaire. En effet, la loi prévoit que Te Pou Tupua défende le statut de Te Awa Tupua ; participe à tout processus juridique concernant Te Awa Tupua pour lequel il possède un intérêt à agir ; et prenne toute autre mesure pour réaliser son objet et exercer ses fonctions [35]. De fait, il est possible de penser que Te Pou Tupua pourrait agir par le dépôt de mémoires d’amicus curiae ou en constitution de partie civile dans des affaires touchant aux intérêts du fleuve et des Maoris et pas uniquement pour contester la violation de droits garantis à Te Awa Tupua. Parallèlement, il est intéressant de noter que le droit d’ester en justice sera exercé par l’organe Te Pou Tupua et non par le biais d’une actio popularis comme dans les exemples andins. Certes, la composition de l’organe [36] conduira peut-être à une limitation du nombre d’affaires portées en justice par le jeu du consensus. Toutefois, les actio popularis nécessitent des moyens considérables qui ne sont pas toujours disponibles. De fait, elles n’ont délivré que peu de résultats sur les terrains boliviens et équatoriens [37]. Si contentieux il y a, il est ainsi possible d’imaginer des contentieux moins nombreux mais ayant sans doute plus de chances d’arriver à des décisions de justice.
Conclusion
19Le River Claims Settlement Act constitue une avancée sans précédent pour le droit néo-zélandais puisqu’il vient consacrer la fin d’un contentieux colonial vieux de plus de cent ans. Cependant, il est également une solution particulièrement innovante pour le droit comparé dans la mesure où il crée un équilibre quasi parfait entre consécration de droits autochtones, protection de l’environnement et sauvegarde des intérêts économiques. De ce point de vue, le River Claims Settlement Act peut donc être considéré certes comme une nouvelle consécration des droits de la nature mais d’abord et avant tout comme une nouvelle mise en œuvre du développement durable.
20Il s’agit là d’un développement essentiel car, ainsi que le montrent les autres exemples étudiés, il n’existe pas de consensus international et encore moins de « recette miracle » sur la façon d’assurer la meilleure protection de l’environnement. À l’inverse, il semble que ce soit dans la diversité des approches que se situe le progrès en la matière. En effet, ainsi, chaque situation nationale ou régionale peut être réglementée au plus près des réalités du terrain et la probabilité que les règles soient appliquées et l’environnement effectivement protégé est plus élevée. Ce n’est qu’ainsi que les droits de la nature rendront réellement service à la planète.
Mots-clés éditeurs : environnement, Terre nourricière, accords multilatéraux environnementaux, Tribunal vert, droits de la nature, préjudice écologique, protection de la nature
Date de mise en ligne : 14/10/2020
Notes
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[1]
Thomas Deleuil est docteur en droit public (Université Aix-Marseille), conseiller juridique au sein du Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique et ancien conseiller juridique de l’équipe de négociation française COP21 (2014-2016). Les opinions exprimées sont celles de l’auteur et ne représentent en aucun cas les vues du Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique ou de l’Organisation des Nations unies.
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[2]
Whanganui Iwi and The Crown, Tūtohu Whakatupua, 30 août 2012, §1.1.
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[3]
E. L. O’Donnel, J. Talbot-Jones, « Creating legal rights for rivers: lessons from Australia, New Zealand, and India », Ecology and Society, Volume 23(1):7, 2018, p. 1, https://doi.org/10.5751/ES-09854-230107. Les auteurs font notamment ici référence aux travaux de C. D. Stone (voir, Should Trees Have Standing?: Law, Morality, and the Environment, 3ème édition, Oxford University Press, 2010, 248 p.). V. également V. David, « La nouvelle vague des droits de la nature. La personnalité juridique reconnue aux fleuves Whanganui, Gange et Yamuna », RJE, 3/2017, p. 409.
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[4]
Sur l’historique du conflit entre les autorités britanniques puis néo-zélandaises et les Maoris du fleuve Whanganui, voir : E. Hsiao, « Whanganui River Agreement - Indigenous Rights and Rights of Nature », Environmental Policy and Law, décembre 2012, https://www.researchgate.net/publication/235671679_Whanganui_River_Agreement_-_Indigenous_Rights_and_Rights_of_Nature.
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[5]
E. Hsiao, op. cit., p. 371.
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[6]
New Zealand History, The Treaty in brief, https://nzhistory.govt.nz/politics/treaty/the-treaty-in-brief.
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[7]
Traité de Waitangi, articles 1 et 2.
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[8]
Voir E. Hsiao, op. cit., pour une liste complète des affaires considérées.
-
[9]
Loi sur le Traité de Waitangi, art. 4 : http://www.legislation.govt.nz/act/public/1975/0114/107.0/DLM435368.html.
-
[10]
Traité de Waitangi, article 6 §3.
-
[11]
Tribunal de Waitangi, The Whanganui River Report, 1999, p. 339 :
https://forms.justice.govt.nz/search/Documents/WT/wt_DOC_68450539/Whanganui%20River%20Report%201999.pdf. -
[12]
Tribunal de Waitangi, The Whanganui River Report, op. cit., p. 343-344.
-
[13]
Voir entre autres l’Accord – Tūtohu Whakatupua – du 30 août 2012 portant sur la volonté de la Couronne et des Maoris de mettre en œuvre un règlement global des requêtes Maoris concernant le traité de Waitangi et concernant le fleuve Whanganui : https://static1.squarespace.com/static/55914fd1e4b01fb0b851a814/t/560842cbe4b017614f85bf30/1443381963419/Whanganui+River+Agreement.pdf.
-
[14]
Parlement de Nouvelle-Zélande, Te Awa Tupua (Whanganui River Claims Settlement) Act, 2017, http://www.legislation.govt.nz/act/public/2017/0007/latest/whole.html#DLM6831751. Sur la procédure législative : Parlement de Nouvelle-Zélande, Te Awa Tupua (Whanganui River Claims Settlement) Bill, https://www.parliament.nz/en/pb/bills-and-laws/bills-proposed-laws/document/00DBHOH_BILL68939_1/tab/hansard. Voir également : L. Te Aho, « Ruruku Whakatupua Te Mana o te Awa Tupua – Upholding the Mana of the Whanganui River », Maori Law Review, May 2014, https://maorilawreview.co.nz/2014/05/ruruku-whakatupua-te-mana-o-te-awa-tupua-upholding-the-mana-of-the-whanganui-river/ ; Parlement de Nouvelle-Zélande, Innovative bill protects Whanganui River with legal personhood, 28 mars 2017, https://www.parliament.nz/en/get-involved/features/innovative-bill-protects-whanganui-river-with-legal-personhood/ ; D. Cheater, « I am the River, and the River is me: Legal personhood and emerging rights of nature », West Coast Environmental Law, 22 mars 2018, https://www.wcel.org/blog/i-am-river-and-river-me-legal-personhood-and-emerging-rights-nature.
-
[15]
River Claims Settlement Act, art. 14§1.
-
[16]
River Claims Settlement Act, art. 20§1 et 2.
-
[17]
River Claims Settlement Act, art. 14§2 et art. 18§1, 2 et 3.
-
[18]
River Claims Settlement Act, art. 19§2.
-
[19]
River Claims Settlement Act, art. 57§1, 2 et 3 ; E. L. O’Donnel, J. Talbot-Jones, op. cit., p. 4 ; Accord de règlement, Whanganui River Deed of Settlement between the Crown and Whanganui Iwi, p. 2, https://www.govt.nz/treaty-settlement-documents/whanganui-iwi/whanganui-iwi-whanganui-river-deed-of-settlement-summary-5-aug-2014/.
-
[20]
Whanganui River Deed of Settlement between the Crown and Whanganui Iwi, op. cit., p. 4.
-
[21]
Constitution de l’Équateur, 20 octobre 2008, http://pdba.georgetown.edu/Constitutions/Ecuador/english08.html ; Constitution de l’État plurinational de Bolivie, 7 février 2009, https://www.constituteproject.org/constitution/Bolivia_2009.pdf ; Loi bolivienne 071 sur les droits de la Terre nourricière, 21 décembre 2010, http://www.cedla.org/sites/default/files/Ley%20N%C2%B0%20071%20DERECHOS%20DE%20LA%20MADRE%20TIERRA.pdf ; Loi bolivienne 300 sur le cadre bolivien pour la Terre nourricière et le développement harmonieux du bien-être, 15 octobre 2012, http://www.harmonywithnatureun.org/content/documents/157Bolivia%20Ley%20300.pdf. Voir également : S. Borràs Pentinat, « Biocentric Approach to Protect Nature: the Bolivian Regulations on Mother Earth and Living Well », in International Environmental Law: Contemporary Concerns and Challenges in 2014, GV Zalozba 2014, p. 148.
-
[22]
Constitution de l’Équateur, art. 71.
-
[23]
Constitution de l’État plurinational de Bolivie, Préambule, §1.
-
[24]
Constitution de l’État plurinational de Bolivie, art. 33.
-
[25]
S. Borràs Pentinat, op. cit., p. 142. Sur la distinction entre la nature sujet ou objet de droit, voir : F. Ost, « Au-delà du sujet et de l’objet : un projet pour le milieu », in Quel avenir pour le droit de l’environnement ?, VUBPress 1996 ; D. Shelton, « Nature as a legal person », VertigO - Revue électronique en sciences de l’environnement, Hors-série 22, 2015.
-
[26]
Voir ci-après.
-
[27]
Ce « tribunal national vert » a compétence pour connaître des affaires relatives à « la protection de l’environnement, la conservation des forêts et des autres ressources naturelles, y compris l’application des droits relatifs à l’environnement » (Loi n° 19 sur le tribunal national vert, 2 juin 2010, The Gazette of India, n° 25, http://faolex.fao.org/docs/pdf/ind98219.pdf). Par exemple, l’affaire Prafulla Samantra and Anr. vs Union of India and Ors. a illustré la question de la protection des forêts et des communautés locales (Tribunal national vert, 30 mars 2012, Praffula Samantra vs Union Of India And Others, appel n° 8/2011, https://indiankanoon.org/doc/106573119/) tandis que l’affaire Vardhaman Kaushik v. Union of India l’a conduit à prendre des mesures afin de réduire la pollution de l’air à Delhi (Tribunal national vert, 10 avril 2015, Vardhaman Kaushik v. Union of India, ordonnance rendue suite aux affaires n° 21/2014 et 95/2014, http://www.greentribunal.gov.in/Writereaddata/Downloads/95-2014(PB-I)OA7-4-2015.pdf).
-
[28]
Le Chili a créé les « tribunaux environnementaux », juridictions spéciales fonctionnant directement sous autorité de la Cour suprême, et ayant pour fonction de résoudre les affaires environnementales relevant de sa compétence (Loi n. 20.600 sur la création des tribunaux de l’environnement, art. 1, 28 juin 2012, https://www.leychile.cl/Navegar?idNorma=1041361).
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[29]
La Charte de l’environnement consacre le devoir de chacun de prévenir les atteintes à l’environnement ou, à défaut, d’en limiter les conséquences ; devoir accompagné de l’obligation de réparer les dommages causés (Loi constitutionnelle n° 2005-205 sur la Charte de l’environnement, 1er mars 2005, Journal Officiel, 2 mars 2005, articles 3 et 4). Dans l’affaire de l’Erika, le Tribunal de grande instance, la Cour d’appel de Paris et la Cour de Cassation ont consacré l’existence du préjudice écologique (Cass. crim., 25 septembre 2012, n° 10-82.938, https://www.courdecassation.fr/IMG///Crim_arret3439_20120925.pdf ; M.-P. Camproux-Duffrène, D. Guihal, « De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace et l’environnement sauvé ! », RJE 3/2013, p. 457 ; L. Neyret, « L’affaire Erika : moteur d’évolution des responsabilités civile et pénale », Recueil Dalloz 2010, p. 2238). La loi du 8 août 2016 reconnaît finalement en son titre 4, article 1386-19, « Toute personne responsable d’un préjudice écologique est tenue de le réparer » (Journal Officiel, n° 0184, 9 août 2016 ; M. Boutonnet, « Quelle action en responsabilité civile pour la réparation du préjudice écologique ? », Énergie – Environnement – Infrastructures, juin 2017, p. 1-5).
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[30]
En 2010, l’Australie confère les droits et la gestion de la rivière Victoria au Victorian Environmental Water Holder. Comme dans le cas néo-zélandais, l’organe est doté de la personnalité juridique et décide comment utiliser les ressources en eau chaque année, dans le but de maintenir la santé de l’environnement (E. L. O’Donnel, J. Talbot-Jones, op. cit., p. 3-4 ; E. L. O’Donnell, « Australia’s environmental water holders: Who is managing our environmental water? », Australian Environment Review, Vol. 28(3):508-513, 2013).
-
[31]
Le 20 mars 2017, la Haute Cour d’Uttarakhand déclare : « le Gange, le Yamuna, tous leurs affluents, ruisseaux et tout cours d’eau courant naturellement, de façon continue ou intermittente, avec eux, sont déclarés être des personnes juridiques, des entités naturelles ayant la personnalité juridique, avec tous droits, devoirs et responsabilités d’une personne vivante ». Bien qu’elle suive de quelques jours l’adoption du River Claims Settlement Act, cette décision adopte une approche différente. La Cour utilise le principe de tutelle pour conférer la personnalité juridique au Gange et au Yamuna. Les fleuves sont identifiés comme des personnes mineures et la Cour désigne les personnes qui doivent agir in loco parentis (Haute Cour d’Uttarakhand, Salim v. State of Uttarakhand, soumission écrite (PIL) n°126 de 2014 (5 décembre 2016 et 20 mars 2017), https://elaw.org/system/files/attachments/publicresource/in_Salim__riverpersonhood_2017.pdf?_ga=2.206797142.473785981.1572295963-888546077.1572295963). Voir : E. L. O’Donnel, J. Talbot-Jones, op. cit., p. 4-5 ; E. L. O’Donnell, « At the intersection of the sacred and the legal: rights for nature in Uttarakhand, India », Journal of Environmental Law, Vol. 30-1, mars 2018, p. 135-144. En juillet 2017, la Cour suprême indienne a suspendu la décision de la Haute Cour. L’affaire est toujours débattue en appel.
-
[32]
River Claims Settlement Act, art. 16 (a).
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[33]
River Claims Settlement Act, art. 46§2 (b).
-
[34]
River Claims Settlement Act, art. 19§1 (d) (i) and (ii).
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[35]
River Claims Settlement Act, art. 19§1 et §2.
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[36]
Deux personnes : un représentant de la Couronne et un représentant des Maoris du fleuve Whanganui.
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[37]
Voir T. Deleuil, « La protection de la ʻterre nourricièreʼ : un progrès pour la protection de l’environnement ? », RJE, 2/2017, p. 255-272.