Notes
-
[*]
Cet article a été rédigé dans le cadre du programme GESPAR50 – Définition d’une stratégie de Gestion Partagée des zones à Risques sur la bande des 50 pas géométriques – financé par la Fondation de France, coordonné par l’Agence des 50 pas géométriques de Guadeloupe et Marie-Laure Lambert.
-
[1]
Pour un commentaire de cette décision, voir Ch. Gustave-Huteau, RJE 4/2018, p. 826-838.
-
[2]
Loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement, article 13. Le régime du Fonds est défini aux articles L. 561-1 et suivants et R. 561-6 et suivants du Code l’environnement.
-
[3]
Loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité.
-
[4]
Loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, article 222.
-
[5]
Cour des comptes, Les enseignements des inondations de 2010 sur le littoral atlantique (Xynthia) et dans le Var, 2012 : https://www.ccomptes.fr/fr/publications/les-enseignements-des-inondations-de-2010-sur-le-littoral-atlantique-xynthia-et-dans).
-
[6]
Commissariat général au développement durable, Service de l’observation et des statistiques, Les risques naturels et industriels sur le littoral, mai 2011, p. 132.
-
[7]
L’article 2 bis de la proposition de loi portant adaptation des territoires littoraux au changement climatique dans sa version adoptée en 2ème lecture à l’Assemblée nationale (31 janvier 2017) propose que le Fonds Barnier « finance les indemnités au profit du propriétaire d’un bien immeuble lorsque ce bien a fait l’objet d’une interdiction d’habiter ou d’occuper les lieux prononcée par la puissance publique avant le 1er janvier 2017 en raison de la réalisation d’un recul du trait de côte. Ces indemnités sont calculées sans prendre en compte le risque de recul du trait de côte et leur montant maximum est fixé à 75 % de la valeur estimée de chaque bien ».
-
[8]
Loi n° 2011-725 du 23 juin 2011 portant dispositions particulières relatives aux quartiers d’habitat informel et à la lutte contre l’habitat indigne dans les départements et régions d’outre-mer.
-
[9]
GIP Littoral Aquitain, La relocalisation des activités et des biens en Aquitaine - Synthèse et conclusion de l’étude de faisabilité de la relocalisation à Lacanau, mai 2015, 116 p., http://www.mairie-lacanau.fr/environnement/381-erosion-du-littoral.html.
-
[10]
Ministère de l’Écologie, du Développement Durable et de l’Énergie, Vers la relocalisation des activités et des biens - 5 Territoires en expérimentation - Séminaire national de lancement du 14 février 2013, 35 p., http://www.developpement-durable.gouv.fr/Strategie-nationale-de-gestion.html
-
[11]
M.-L. Lambert, C. Claeys, A. Arnaud, « Vulnérabilité économique et sociale, facteur d’invisibilité des risques ? », Revue Riséo, 2017-2, n° spécial Les risques invisibles, http://www.riseo.cerdacc.uha.fr
-
[12]
Voir notamment les projets de recherche financés par la Fondation de France : « AlternaLiVE - Alternatives Littoral Vulnérable – Élévation du niveau marin » (2012-2015), et GesPaR50, « Définition d’une stratégie de Gestion Partagée des zones à Risques sur la bande des 50 pas géométriques », 2015-2018.
-
[13]
TA Bordeaux, 25 septembre 2014, n° 1301417, 1301705, 1301938.
-
[14]
CAA Bordeaux, 9 février 2016, n° 14BX03289.
-
[15]
Décision de renvoi du Conseil d’État n° 2018-698 QPC du 6 avril 2018.
-
[16]
Voir la Décision n° 2018-717/718 QPC du 6 juillet 2018 relative au délit de solidarité qui consacre le principe de fraternité et aux termes de laquelle le Conseil constitutionnel rappelle qu’il ne dispose pas « d’un pouvoir général d’appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement ».
-
[17]
CE, avis du 8 mars 1994, req. n° 355785.
-
[18]
Cour des comptes, 2016, Le Fonds de Prévention des Risques Naturels Majeurs, référé n° S2016-3768.
-
[19]
Voir en ce sens, T. Mohamed Soilihi et al., Domaines publics et privés de l’État outre-mer, 30 propositions pour mettre fin à une gestion jalouse et stérile, Rapport Sénat n° 538, 18 juin 2015.
-
[20]
Loi n° 2011-725 du 23 juin 2011, précitée.
-
[21]
L’indemnisation ne peut être supérieure à 40 000 euros pour un logement et à 20 000 euros pour un local à usage professionnel, mais ce plafond est pondéré par l’application de critères tenant notamment à la vétusté du bien et à la durée de l’occupation. Cf. arrêté du 18 février 2013 fixant le barème de l’aide financière prévue aux articles 1er, 2, 3 et 6 de la loi n° 2011-725 du 23 juin 2011.
-
[22]
Art. L. 561-1 C. env.
-
[23]
Art. L. 561-3. C. env.
-
[24]
Art. L. 2111-4 et suivants CGPPP.
-
[25]
CE 22 septembre 2017, req. n° 400825.
-
[26]
Art. R. 561-15 C. env.
-
[27]
Cour des comptes, 2016, op. cit.
-
[28]
Art. L. 561-1 et 3 C. env.
-
[29]
Art. L. 211-7 I bis C. env.
-
[30]
TA Bordeaux, 25 septembre 2014, n° 1301417, Syndicat secondaire « Le Signal ».
-
[31]
M.-L. Lambert, A. Arnaud et C. Claeys, « Justice climatique et démocratie environnementale - Les inégalités d’accès au droit des populations vulnérables aux risques littoraux – quelques éléments de comparaison », Vertigo, à paraître en 2018.
-
[32]
Ministère de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer, en charge des relations internationales sur le climat, La distance à la mer : principal facteur de caractérisation socio-démographique du territoire littoral, Datalab n° 21, mai 2017, 51 p.
-
[33]
C. Claeys et al., « Une analyse interdisciplinaire des vulnérabilités socio-environnementales : le cas de falaises côtières urbanisées en Méditerranée », NSS, 25 :3, 2017, p. 241-254.
-
[34]
V. Kolb, Analyse géographique des inégalités environnementales et écologiques en milieu littoral urbain, thèse soutenue à l’Université de La Rochelle le 20 novembre 2015, p. 201.
-
[35]
Entretien avec un assureur lors de la 7ème édition de la journée Caisse Centrale de Réassurance CAT, 30 juin 2016, Paris.
-
[36]
C. Claeys, A. Arnaud, M.-L. Lambert, "The impact of legal vulnerability on environmental inequalities. A case study of coastal populations in Guadeloupe (French Antilles)", Académie des sciences, C. R. Geoscience, 349 (2017), p. 351-358.
-
[37]
M.-L. Lambert, C. Claeys, A. Arnaud, 2017, op. cit. ; Roger Coco, Le régime juridique de prévention et de réparation des risques naturels majeurs confronté aux exigences de justice sociale et environnementale. Le cas des Antilles françaises, thèse soutenue le 30 janvier 2015 à l’Université des Antilles et de la Guyane.
-
[38]
Voir Y. Jacob, Rapport n° 2593 déposé le 5 mars 1996 au nom de la commission de la production des échanges sur le projet de loi relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur de la zone dite des cinquante pas géométrique, Assemblée nationale, p. 23.
-
[39]
Loi n° 2011-725 du 23 juin 2011, précitée.
-
[40]
Sont ici concernés : Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion, Mayotte et Saint-Martin.
-
[41]
Arrêté du 18 février 2013 fixant le barème de l’aide financière prévue aux articles 1er, 2, 3 et 6 de la loi n° 2011-725 du 23 juin 2011.
-
[42]
Arrêté du 12 janvier 2005 fixant le montant maximal des subventions accordées pour les acquisitions amiables et les mesures mentionnées au 2° du I de l’article L. 561-3 du Code de l’environnement, JORF 15 janvier 2005, p. 679.
-
[43]
Arrêté du 28 avril 2010 fixant le montant maximal des subventions accordées pour les acquisitions amiables de biens sinistrés et les mesures mentionnés au 2° du I de l’article L. 561-3 du Code de l’environnement.
-
[44]
Source : Agence des 50 pas géométriques de Guadeloupe.
-
[45]
Cour des comptes, 2018, L’établissement, le contrôle et le recouvrement de l’impôt outre mer, référé n° S2018-0132, p. 4.
-
[46]
Cour des comptes, 2012, op. cit., p. 5.
-
[47]
CE, 27 juin 2005, n° 262199.
-
[48]
Entretien avec un assureur lors de la 7ème édition de la journée Caisse Centrale de Réassurance CAT, 30 juin 2016, Paris.
-
[49]
Proposition de loi portant adaptation des territoires littoraux au changement climatique déposée à l’assemblée nationale le 13 juillet 2016 ; Proposition de loi relative au développement durable des territoires littoraux déposée au Sénat le 13 septembre 2017 ; Proposition de loi visant à instaurer un régime d’indemnisation pour les interdictions d’habitation résultant d’un risque du recul du trait de côte, déposée au Sénat le 16 mai 2018.
-
[50]
Rapport final, Programme de recherche Vuligam-PIRVE, http://www.urbanisme-puca.gouv.fr/IMG/pdf/Vuligam_rapport_final_complet.pdf.
-
[51]
M.-L. Lambert, « Le recul stratégique - De l’anticipation nécessaire aux innovations juridiques », in Droit des risques littoraux et changement climatique - connaissance, anticipation, innovation, éditions Vertigo 2015 (https://journals.openedition.org/vertigo/15812).
-
[52]
Loi n° 2011-725 du 23 juin 2011, précitée.
-
[53]
Cour des comptes, 2016, op. cit.
-
[54]
Déclaration de Rio, principe 7 : « Étant donné la diversité des rôles joués dans la dégradation de l’environnement mondial, les États ont des responsabilités communes mais différenciées » ; Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, articles 3 et 4 : « Il incombe aux Parties de préserver le système climatique dans l’intérêt des générations présentes et futures, sur la base de l’équité et en fonction de leurs responsabilités communes mais différenciées et de leurs capacités respectives ». Voir également S. Lavallée et K. Bartenstein, « Le principe des responsabilités communes, mais différenciées au service du développement durable », in A. Michelot (dir.), Équité et environnement : Quel(s) modèle(s) de justice environnementale ?, Bruxelles, Larcier, 2012, p. 377-386.
-
[55]
CE, 22 septembre 2017, req. n° 400825.
-
[56]
M. Antona et F. Bousquet (dir.), Une troisième voie entre l’État et le marché – échanges avec Elinor Ostrom, Quae, 2017, 148 p.
-
[57]
M. Cornu, « Biens communs (approche juridique) », in M. Cornu, F. Orsi. et J. Rochfeld (dir.), Dictionnaire des biens communs, PUF, 2017, p. 107.
-
[58]
B. Coriat, cité par M. Cornu, op. cit., p. 106.
Introduction
1À l’occasion d’un recours porté par les habitants de l’immeuble « Le Signal » à Soulac-Sur-Mer (Gironde), le Conseil constitutionnel s’est prononcé le 6 avril 2018, sur la constitutionnalité de l’exclusion de la procédure d’expropriation pour risques naturels majeurs des propriétaires d’immeubles menacés par l’érosion dunaire. Dans sa décision n° 2018-698 QPC du 6 avril 2018 [1], il a en effet déclaré conforme au principe constitutionnel d’égalité, le dispositif du Fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), dit « Fonds Barnier », qui exclut des possibilités d’indemnisation les cas d’érosion côtière sur côte sableuse, contrairement à d’autres risques littoraux tels que la submersion marine.
2Le dispositif d’indemnisation par le Fonds Barnier, mis en place en 1995 [2], permettait initialement d’indemniser les propriétaires expropriés en raison de risques prévisibles menaçant gravement les vies humaines générés par des mouvements de terrain (hameau de l’Ile Falcon en Isère), avalanches ou crues torrentielles (inondations de Vaison-la-Romaine). L’usage du Fonds a ensuite été étendu par étapes aux risques « d’affaissements de terrains dus à une cavité souterraine ou à une marnière » en 2002 [3] puis, à la suite de la tempête Xynthia de 2010, aux risques de « submersion marine » [4].
3Ce Fonds permet notamment à l’État « de déclarer d’utilité publique l’expropriation par lui-même, les communes ou leurs groupements, des biens exposés à ce risque […] sous réserve que les moyens de sauvegarde et de protection des populations s’avèrent plus coûteux que les indemnités d’expropriation » (art. L. 561-1 C. env.). Il permet également d’acquérir à l’amiable des biens exposés à l’un des risques naturels prévisibles précités « menaçant gravement des vies humaines », là encore « sous réserve que le prix de l’acquisition amiable s’avère moins coûteux que les moyens de sauvegarde et de protection des populations » (art. L. 561-3-1° C. env.), ou encore des biens, y compris certains biens professionnels, qui ont été sinistrés à plus de la moitié de leur valeur (art. L. 561-3-2° C. env.).
4Le Fonds a notamment servi récemment, après la tempête Xynthia de 2010, à indemniser les propriétaires de 1 159 biens rachetés à l’amiable pour un montant total de 293,3 millions d’euros [5].
5Pour autant, le Fonds ne permet pas aujourd’hui de traiter toutes les situations de vulnérabilité aux risques littoraux, notamment parce qu’il ne s’adresse pas aux risques liés à l’érosion du littoral et que ses critères d’engagement sont limitatifs : le risque doit « menacer gravement les vies humaines », la suppression du bien doit être moins coûteuse que les moyens de sauvegarde et de protection des populations, les occupants doivent être propriétaires et assurés…
6Or, un grand nombre de biens littoraux, telle la résidence « Le Signal », sont aujourd’hui menacés par l’érosion ou les submersions marines, et ce nombre augmentera à l’avenir avec l’élévation du niveau marin et ce d’autant plus que « la densité de population est très forte à proximité immédiate des rivages, là où les aléas d’origine marine sont localisés (tsunami, érosion, submersion) » [6].
7Le droit applicable aux littoraux vulnérables se construit donc par réponse au cas par cas, comme le montrent à la fois l’extension progressive du champ d’application du Fonds Barnier et les propositions de lois successives visant à résoudre spécifiquement le cas de l’immeuble « Le Signal » [7] ou encore la Loi dite « Letchimy » de 2011 [8] qui visait des solutions adaptées aux littoraux ultramarins. Pourtant, des réflexions co-construites par le GIP littoral aquitain [9] et les propositions issues de l’appel à projets du Ministère chargé de l’environnement concernant la relocalisation [10] ouvrent la voie à des expérimentations plus larges et prospectives. Mais pour l’heure, le droit positif révèle les défaillances d’une gestion des risques littoraux qui n’est pas pensée globalement, n’anticipe pas le long terme et n’est pas toujours débattue ouvertement ou sereinement [11]. L’apport des chercheurs en droit consiste alors à réfléchir à des solutions innovantes et dégagées des intérêts particuliers ou territoriaux [12].
8La recherche pluridisciplinaire (droit, économie, sociologie,…) permet en outre de mettre en lumière les très grandes inégalités de valeur entre les biens situés sur les différents littoraux français, et leur occupation par des habitants en situations de vulnérabilité économique et sociale également très diverses. Cette question des inégalités de fait ne saurait se résoudre par un traitement théoriquement égalitaire des immeubles concernés (I), mais suppose au contraire d’intégrer à l’avenir les réflexions pluridisciplinaires afin de tenir compte des vulnérabilités réelles des habitants du littoral (II).
I – Un traitement juridique différencié fondé sur la situation des immeubles
9Le contentieux lié à l’indemnisation des propriétaires du Signal, s’il se fonde sur l’argument de l’inégalité de traitement des immeubles exposés à différents risques (A), révèle finalement des différences de traitement beaucoup plus complexes qui aboutissent, dans leur application concrète, à des situations inégalitaires, dans la mesure où l’application du droit se fonde largement sur la situation des biens considérés sans considération de la situation des occupants (B).
A – Le traitement différencié de l’érosion dunaire et des autres risques naturels par le Fonds Barnier : le cas de la résidence « Le Signal »
10La résidence « Le Signal », construite à la fin des années 1960 à 200 mètres du rivage, a été rattrapée par l’érosion de la côte sableuse au fil des ans, à telle enseigne que le bord de la dune se trouve désormais à une dizaine de mètres du bâtiment qui pourrait s’écrouler dans un avenir proche. L’immeuble a été entièrement évacué en janvier 2014 en application d’un arrêté du Maire de Soulac-Sur-Mer suite à une série de tempêtes hivernales aggravant le risque.
11Les pouvoirs publics ont proposé aux habitants une indemnisation pour un montant global de 1,5 million d’euros, soit 20 000 euros par appartement. Le Syndicat secondaire « Le Signal », qui regroupe les propriétaires des 78 logements de la Résidence, a refusé cette solution et demandé au Préfet, au lieu d’une indemnisation partielle, la mise en œuvre de l’expropriation prévue par l’article L. 561-1 du Code de l’environnement, laquelle permet une indemnisation pleine et entière de la perte du bien sans qu’il ne soit tenu compte de l’existence du risque. En 2013, le Préfet a refusé implicitement de faire droit à cette demande du Syndicat. Ce refus du Préfet est attaqué par le Syndicat devant le juge administratif qui rejette la demande en première instance [13] et en appel [14], estimant que le phénomène d’érosion dunaire ne constitue pas un des cas évoqués par l’article L. 561-1 du Code de l’environnement permettant d’engager la procédure d’expropriation.
12Le Syndicat requérant se pourvoit alors en cassation devant le Conseil d’État et obtient le renvoi au Conseil constitutionnel de la question de la conformité constitutionnelle de l’article L. 561-1 du Code de l’environnement, notamment au regard du principe d’égalité et du droit de propriété [15].
13Le requérant soutient que les dispositions contestées seraient inconstitutionnelles en ce qu’elles méconnaîtraient le principe d’égalité devant la loi dès lors qu’elles créeraient une différence de traitement injustifiée entre le propriétaire d’un bien exposé au risque d’érosion côtière et le propriétaire d’un bien menacé par l’un des risques mentionnés à l’article L. 561-1 du Code de l’environnement, notamment le risque de submersion marine.
14À cet égard, le Conseil constitutionnel a rappelé que le législateur n’avait pas entendu instituer un dispositif de solidarité pour tous les propriétaires, mais avait uniquement permis d’exproprier, contre indemnisation, ceux exposés à certains risques naturels. La Haute Juridiction a ensuite souligné, comme cela lui arrive quand elle est confrontée à une question qui relève avant tout d’un débat de société, qu’elle ne dispose pas du même pouvoir d’appréciation que le Parlement [16]. En l’espèce, étendre la procédure d’expropriation à d’autres risques naturels dont l’ampleur n’est pas connue est une question relevant d’un débat de société et de l’appréhension de données techniques dont l’appréciation ne relève pas de la nature du contrôle du Conseil. Dans cette perspective, ce dernier a jugé que la loi a pu traiter différemment des propriétaires de biens exposés à des risques différents. Cela étant dit, le Conseil a rappelé qu’il est « loisible au législateur, prenant en compte notamment les données scientifiques disponibles, d’étendre la mesure prévue par la disposition contestée à d’autres risques naturels ». Il ne remet donc pas en cause la distinction entre les risques d’inondation et de submersion marine, d’une part, et le phénomène d’érosion côtière, d’autre part, mais reconnaît qu’il appartient au législateur, dans son pouvoir d’appréciation étayé par des études scientifiques, d’élaborer, le cas échéant, des règles différentes pour des risques différents.
15En l’état actuel du droit, il en résulte un traitement différencié des habitants du littoral.
16Ceux soumis aux risques visés par l’article L. 561-1 du Code de l’environnement peuvent bénéficier d’une indemnisation d’expropriation « généreuse », leurs biens n’étant pas dévalués par la présence du risque. La personne expropriée, si elle est certes privée de son bien, reçoit néanmoins en compensation une indemnisation qui lui permet d’en racheter un équivalent, l’idée étant à l’origine de favoriser l’acceptation sociale de ces mesures d’expropriation. À l’inverse, les autres habitants du littoral exposés à un risque d’érosion côtière peuvent perdre leurs biens sans que le Fonds Barnier permette une expropriation préalable à la survenance du risque, ni même une acquisition amiable. À leur égard, ne peuvent être mis en œuvre que les pouvoirs de police du maire ou du préfet : péril imminent, évacuation, etc.
17Avec l’élévation du niveau de la mer et la recrudescence d’événements climatiques extrêmes dus au changement climatique, cette dichotomie paraît aujourd’hui difficilement tenable en ce qu’elle génère des situations socialement inégales. Le législateur qui, en créant le Fonds Barnier, avait choisi de passer outre l’avis du Conseil d’État opposé à la mise en place d’une procédure d’indemnisation, sauf à ce qu’elle soit limitée pour « éviter d’instaurer un droit à indemnisation en faveur de tous les citoyens qui sont installés dans une zone exposée à un risque naturel habituel qu’ils ont délibérément choisi de négliger » [17], est aujourd’hui rattrapé par les faits. Des solutions doivent être trouvées pour assurer un équilibre entre les recettes et dépenses du Fonds Barnier [18], mais celles du droit positif ne sont pour l’heure fondées que sur la situation de l’immeuble.
B – Un droit positif qui renforce les inégalités de fait résultant de la prise en compte de la situation des immeubles
18Le traitement différencié de l’érosion côtière et des submersions marines n’est qu’un des aspects des différences de traitement dans le dispositif de gestion des risques littoraux. En effet, le droit positif entretient d’autres différences de traitement fondées sur l’urgence du risque (1), la valeur des biens (2) ou encore l’intérêt général (3).
1 – Le traitement différencié du Fonds Barnier fondé sur l’urgence du risque
19Les critères de mobilisation du Fonds Barnier sont notamment fondés, de façon pragmatique, sur l’urgence d’agir pour éviter la mise en danger de personnes. En ce sens, les articles L. 561-1 et L. 561-3 du Code de l’environnement prévoient respectivement que l’expropriation ou l’acquisition amiable d’un bien est assujettie à l’existence d’une menace grave sur les vies humaines. Là réside l’urgence à agir, laquelle dépend de l’appréciation de la situation de l’immeuble face à la survenance du risque.
20Dès lors, de nombreuses situations d’urgence absolue ou d’urgence à moyen terme échappent au champ du Fonds Barnier.
21Ainsi par exemple, concernant l’urgence absolue, l’érosion du littoral étant exclue du champ du Fonds Barnier, un propriétaire dont la vie est gravement menacée par la survenance de ce risque ne pourra pas bénéficier du Fonds Barnier.
22Dans le même ordre d’idées, un occupant sans titre de la zone des cinquante pas géométriques aux Antilles (domaine public maritime) dont la vie est gravement menacée par un des risques énumérés par les articles L. 561-1 et 3 du Code de l’environnement ne pourra pas bénéficier du Fonds Barnier dans la mesure où, sans titre, il ne peut pas, par essence, être exproprié d’un bien qui ne lui appartient pas, ni le vendre et ce quelle que soit la durée de son occupation et la tolérance de l’État à l’égard de son occupation [19]. L’article 6 de la loi dite « Letchimy » du 23 juin 2011 [20] a tenté de remédier à cette situation en prévoyant la possibilité de compenser la perte de domicile des occupants sans titre de la zone des cinquante pas géométriques dont la vie est gravement menacée par un risque naturel dans certaines conditions d’occupation (résidence principale, durée d’occupation paisible et continue depuis plus de dix ans et absence de procédure d’expulsion en cours). Mais, en raison de la faiblesse des indemnisations envisageables [21] – au demeurant imputées sur le Fonds Barnier –, ce dispositif n’a jamais été réellement mis en œuvre, en tout cas en Guadeloupe.
23À travers ces deux exemples, l’on constate que toutes les situations d’urgence absolue ne sont pas couvertes par le Fonds Barnier.
24Concernant l’urgence relative, la vie d’un habitant situé en retrait d’une falaise littorale et dont le bien court le risque, à moyen ou long terme, de s’effondrer avec la falaise n’est pas considérée comme gravement menacée ce qui ne permet donc pas de mobiliser le Fonds Barnier, ni pour l’expropriation [22], ni pour l’acquisition amiable [23]. En d’autres termes, le Fonds Barnier est un outil de l’urgence absolue, mais il ne permet pas d’anticiper des situations de danger à venir.
25De même, le Fonds Barnier n’agit pas sur l’incorporation de biens privés dans le domaine public maritime quand bien même elle résulterait de risques littoraux. En effet, les biens privés littoraux que l’avancée de la mer risque de submerger à moyen terme, pourront être incorporés dans le domaine public maritime par l’effet d’une procédure de simple délimitation [24], sans indemnisation des propriétaires. Parmi ces propriétaires, d’autres différences de traitement pourraient surgir à la suite de la décision du Conseil d’État relative à l’érosion de la côte sableuse de la commune de Vias (Hérault) [25]. À propos des propriétés littorales concernées, le Conseil d’État ouvre la voie à des indemnisations au cas par cas en considérant que l’incorporation de parcelles dans le domaine public maritime naturel n’exclut pas toute possibilité de réparation de la part de la puissance publique « dans le cas exceptionnel où le transfert de propriété entraînerait pour eux une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec l’objectif d’intérêt général poursuivi ».
2 – Le traitement différencié du Fonds Barnier fondé sur la valeur des biens
26Concernant le montant financier de l’expropriation par le Fonds Barnier, le dispositif prévu par l’article L. 561-1 du Code de l’environnement prévoit qu’il ne tient pas compte « de l’existence du risque », un tel calcul visant à alléger la douleur des personnes expropriées. Quant à l’acquisition amiable des biens soumis aux risques littoraux énumérés par l’article L. 561-1 du Code de l’environnement, la contribution du Fonds Barnier est fixée « à raison de 100 % des dépenses éligibles pour les acquisitions amiables » [26]. Dans ce cas de figure, il n’est pas fait abstraction de l’existence du risque.
27Il en ressort un dispositif plus favorable aux expropriés qu’aux cédants, puisque la valeur de remplacement du bien, qui permettra de calculer l’indemnisation due, sera surévaluée par rapport à la valeur marchande du bien voué à disparaître sous l’effet, par exemple, d’un effondrement de falaise ou d’une submersion marine. Ainsi, le propriétaire d’une résidence, qu’elle soit d’ailleurs principale, secondaire voire tertiaire, installé en bord de falaise littorale au pays Basque ou dans une zone basse de l’Ile de Ré, résidence menacée de submersions marines créant un danger grave pour la vie humaine, pourra être exproprié et indemnisé à la valeur la plus forte de son bien.
28En revanche, dans le cas d’une acquisition à l’amiable, ce calcul surévalué n’est pas envisagé et les indemnisations feront l’objet d’une négociation au prix du marché. Des personnes pourront ainsi être plus généreusement indemnisées si elles attendent l’aboutissement d’une procédure d’expropriation longue et coûteuse que si elles s’engagent dans un processus de négociation amiable. Cela peut conduire à des différences de traitement entre deux biens ayant la même valeur théorique. C’est d’ailleurs sur ce point qu’ont porté récemment les critiques de la Cour des comptes : « Le rôle initial du FPRNM était de financer une procédure, dite de "délocalisation", permettant aux personnes résidant dans des zones où leur vie est gravement menacée par certains risques naturels majeurs, de se réinstaller ailleurs, dans des conditions économiquement satisfaisantes. Depuis sa création, le fonds finance le rachat des biens à un niveau supérieur à leur valeur vénale. […] L’État acquiert à un prix supérieur au prix du marché des biens qui ont en réalité perdu toute valeur et qui ne peuvent faire l’objet d’aucune valorisation en raison de la dangerosité de la zone » [27].
29Par ailleurs, l’expropriation ou l’acquisition amiable ne sont pratiquées que si « les moyens de sauvegarde et de protection des populations s’avèrent plus coûteux que les indemnités d’expropriation » ou l’acquisition [28]. Il en résulte que la décision d’expropriation ou d’acquisition amiable se fonde sur un calcul économique comparant ce montant au déploiement de moyens de sauvegarde ou à la construction d’un ouvrage de protection.
30Entre les deux options, l’État ou la collectivité devra choisir la solution la moins coûteuse, ce qui constitue sans aucun doute un principe sain de gestion des fonds publics. Toutefois, dans la pratique, l’application de ce principe génère des inégalités de traitement qui renforcent les inégalités de fait. En effet, le choix de protéger un bien ou de le supprimer dépendra de la valeur monétaire des biens menacés, ce qui donne un avantage aux propriétaires de biens de grande valeur situés, par exemple, en haut de falaise au pays Basque avec vue sur mer et pour lesquels l’expropriation ou le rachat serait plus coûteux que la mise en place d’ouvrages de renforcement de falaise, a fortiori dans le cas où le calcul de l’indemnité d’expropriation ne tient pas compte du risque. Dans ce cas de figure, les propriétaires pourront se maintenir dans les lieux, revendre leur bien et échapper – en tout cas temporairement – à une relocalisation. Inversement, dans le cas d’habitats informels ou précaires tels que certains de ceux situés en Guadeloupe, la faible valeur des habitations rendra leur relocalisation moins coûteuse que leur protection.
3 – Le traitement différencié fondé sur l’intérêt général des travaux de défense contre la mer
31Au titre de la compétence GEMAPI (Gestion de l’Eau des Milieux Aquatiques et Prévention des Inondations), les Établissements Publics de Coopération Intercommunale auxquels cette compétence est attribuée [29] peuvent décider d’exécuter des travaux de prévention des inondations et de défense contre la mer qui concernent notamment la construction de digues, épis, enrochements ou autres ouvrages destinés à stabiliser le trait de côte. Ces travaux doivent néanmoins présenter un « caractère d’intérêt général » pour pouvoir être engagés sur des fonds publics. L’intérêt général n’est par essence pas clairement défini, mais il est généralement admis qu’est d’intérêt général la protection d’une zone urbaine dense voire d’une zone économique.
32Or l’application de ce critère peut constituer une nouvelle source d’inégalité. Ainsi par exemple, l’intérêt général pourrait être reconnu à la protection d’un immeuble de grande valeur architecturale ou patrimoniale. S’il est vrai que la collectivité se doit de préserver, dans la mesure de ses moyens financiers, des biens patrimoniaux de grande qualité, l’application de ce principe à des biens privés situés sur le littoral tend une nouvelle fois à favoriser les propriétaires de biens exceptionnels dont le patrimoine sera préservé tandis que d’autres, habitant des immeubles plus banals, devront se résoudre à voir leur bien incorporé dans le domaine public, sans aucune indemnisation s’ils n’entrent pas dans les critères du Fonds Barnier.
33D’un côté, pourra donc être reconnu d’intérêt général le fait de renforcer, sur fonds publics, la falaise littorale où se situe une villa « art déco » de grande valeur financière et architecturale, dont l’expropriation coûterait plus cher que la protection et dont le propriétaire n’acceptera jamais une acquisition amiable.
34Mais d’un autre côté, la défense contre la mer des 78 logements de la résidence « Le Signal », ainsi que l’a reconnu le Tribunal administratif de Bordeaux, « ne présente un intérêt effectif que pour les copropriétaires mais en réalité aucun intérêt suffisamment qualifié pour la collectivité ». Pour en juger ainsi, et malgré le fait que cet immeuble regroupe 78 logements, le Tribunal s’est fondé sur des analyses comparatives de coûts fondées sur la valeur vénale de l’immeuble et son « absence d’intérêt architectural particulier » [30].
35Il peut donc en être déduit que le droit positif, qui organise des procédures de décision et d’indemnisation uniquement fondées sur la situation de l’immeuble (zone de risque, valeur financière, patrimoniale, etc.) renforce les inégalités de situation économique ou sociale.
II – Plaidoyer pour un traitement juridique différencié fondé sur la situation des personnes
36Les habitants des littoraux métropolitains et ultra-marins représentent des catégories sociales très diverses témoignant, de ce point de vue, de véritables inégalités (A). La situation personnelle des habitants devrait donc être prise en compte par le droit pour corriger ou à tout le moins ne pas accentuer ces inégalités (B).
A – De véritables inégalités sociales sur le littoral
37L’application théorique du droit se heurte sur le terrain à des inégalités économiques et sociales. Face aux risques littoraux dans un contexte de changement climatique, les populations exposées ne sont pas égales. Des exemples étudiés sur les littoraux basque, méditerranéen et guadeloupéen ont permis de mettre en résonnance des cas de populations très différentes en termes de vulnérabilité environnementale, sociale, économique et juridique [31]. Du point de vue humain, les risques littoraux exposent des populations qui, selon les territoires étudiés, peuvent être aux antipodes des situations de vulnérabilité sociale, notamment si l’on compare les littoraux métropolitains (1) et ultra-marins (2).
1 – Sur les littoraux métropolitains
38Sur les littoraux métropolitains, les premiers rangs d’habitations ayant la vue sur mer appartiennent généralement à des classes aisées disposant de ressources financières conséquentes qui investissent dans des biens demeurant encore d’une très haute valeur spéculative (vue sur la mer, proximité immédiate du rivage) [32], et disposent d’un capital social leur permettant d’influer sur les décisions publiques [33].
39Pour des acteurs moins fortunés, comme sur les littoraux proches de La Rochelle, « le fait de vivre en zone littorale est un réel choix de vie une sorte d’aboutissement […]. Mais les prix élevés du foncier, notamment pour l’accession à la propriété en zone littorale, ne permettent pas à tous les ménages d’avoir réellement ce critère de choix. Les actifs interrogés venus s’installer ont pu s’affranchir des inégalités d’accessibilité économique au logement et des inégalités territoriales liées à la qualité des environnements naturels et des paysages. Par leur fort pouvoir d’achat, ils contribuent à influencer indirectement les prix du foncier et donc la localisation contrainte sur le territoire des personnes ayant des moyens moins élevés » [34].
40Il apparaît ainsi, de façon générale, que l’installation des classes aisées au plus près du littoral a pour conséquence économique et sociale de repousser les autres habitants en rétro-littoral. Cet accaparement du foncier littoral par les classes aisées est ensuite auto-entretenu : la valeur des biens est évaluée par rapport à la valeur des biens voisins ; les biens vulnérables de très haute valeur ne perdent pas leur valeur sur le marché, même s’ils sont situés en zone de risque (zones rouges des PPR par exemple). Il semble même que le classement en zone rouge des PPR, en rendant inconstructibles les terrains voisins, en vienne parfois à augmenter la valeur marchande de certains immeubles déjà existants, dans la mesure où la rareté du bien est ainsi renforcée [35].
2 – Sur les littoraux ultra-marins tropicaux
41L’occupation des littoraux ultra-marins, notamment aux Antilles ne présente pas les mêmes caractéristiques socio-économiques que celle de métropole. Se côtoient sur les zones de première frange littorale, des habitants de belles villas ou des exploitants de sites balnéaires et hôteliers ainsi que des populations marginalisées ayant un faible accès au droit et aux procédures [36] et qui cumulent des vulnérabilités sociales, économiques et environnementales [37].
42Parmi cette dernière catégorie d’habitants du littoral se trouvent des habitants – descendants parfois des esclaves libérés – qui se sont installés sur les espaces littoraux résiduels qui n’étaient occupés ni par les villages, ni par les plantations sur une bande littorale d’une largeur de 81,20 mètres dénommée « zone des cinquante pas du Roy », puis « zone des cinquante pas géométriques » appartenant aujourd’hui au domaine public maritime. Les installations se sont majoritairement implantées sans droit ni titre, et ont été plus ou moins tolérées par l’État et parfois régularisées au fil du temps au terme de longues et complexes procédures [38]. En l’absence de régularisation, ces personnes ne peuvent pas faire valoir de droit aux procédures de relocalisation du Fonds Barnier, n’étant ni propriétaires du fonds, ni le plus souvent titulaires d’un contrat d’assurance quoiqu’elles soient particulièrement exposées aux risques d’érosion rapide qui marquent les pentes de terre volcanique s’effondrant progressivement dans la mer. En vue de trouver des solutions de relocalisation socialement acceptables pour ces habitants, la loi dite « Letchimy » de 2011 [39] a mis en place, dans les collectivités d’outre-mer régies par le Code de l’environnement national [40], un dispositif d’indemnisation de la perte de domicile qui tient compte de plusieurs critères : le danger grave pour la vie humaine face à un risque naturel prévisible, l’état d’entretien et de salubrité du logement, le caractère de résidence principale ou secondaire, les revenus des occupants, la durée d’occupation du bien. Cette innovation juridique visait à prendre en compte à la fois le statut du bien exposé au risque, mais également la situation personnelle de l’occupant.
43Pour autant, si l’on compare le montant des sommes proposées pour l’indemnisation de la perte de domicile outre-mer d’un côté, et de l’expropriation ou de l’acquisition des biens d’un autre, un résultat inégalitaire est une nouvelle fois constaté. En effet, l’indemnisation de la perte de domicile outre-mer est plafonnée à 40 000 euros pour les locaux à usage d’habitation et à 20 000 euros pour des locaux à usage professionnel [41] et se situe bien en-deçà du plafond fixé pour l’acquisition amiable d’un bien sinistré, initialement prévu à 60 000 euros [42] et rehaussé après la tempête Xynthia de février 2010 jusqu’à 240 000 euros [43]. D’ailleurs, le faible montant de l’indemnisation prévue pour les occupants de la zone des cinquante pas géométriques a fortement compromis l’expérimentation en Guadeloupe sur la commune de Petit-Bourg. Dès les premiers échanges, les sommes proposées n’ont pas fait l’objet d’adhésion des populations concernées, si bien que sur ce point, la Loi « Letchimy » est restée lettre morte en Guadeloupe [44].
44Il pourra être argué que les occupants sans titre n’ont pas fait l’effort financier d’acheter le terrain d’assise de leur logement, mais ce serait méconnaître une réalité : de nombreux occupants irréguliers se croient de bonne foi propriétaires, compte-tenu de leur imposition à la taxe foncière. La Cour des comptes relève en effet que « la DGFiP considère que, contrairement aux dispositions de l’article 555 du code civil, l’absence de titre de propriété immobilière ou un titre de propriété non actualisé ne font pas obstacle à l’émission de taxes foncières et à leur recouvrement. Autrement dit, l’État, propriétaire de la zone des cinquante pas géométriques, impose à la taxe foncière le propriétaire apparent (occupant informel de bonne ou de mauvaise foi) en lieu et place du propriétaire réel de la construction » [45].
45Cette situation crée ainsi une ambiguïté sur la qualité de propriétaire des occupants de la zone des cinquante pas géométriques et accroît la disparité de traitement de ces occupants littoraux.
B – Pour un droit intégrant les inégalités sociales
46Devant de telles inégalités sociales dans l’application concrète des régimes d’indemnisation, il apparaît nécessaire de faire évoluer le dispositif du Fonds Barnier pour concilier la gestion économe du Fonds et un réel principe de solidarité prenant en compte la vulnérabilité sociale des habitants du littoral (1). Des critères permettant d’établir une hiérarchisation des indemnisations pourraient ainsi être pensés dans l’optique de compenser les inégalités sociales (2).
1 – Pour une solidarité réelle incluant la prise en compte de la vulnérabilité sociale
47Le Fonds Barnier n’est pas inépuisable.
48Les solutions « généreuses » qu’il offre jusqu’ici, et en particulier l’indemnisation de l’expropriation ne tenant pas compte de la dévaluation du bien par le risque, seront, dans le contexte du changement climatique, impossibles à généraliser à tous les risques naturels sur l’ensemble des littoraux français métropolitains et ultra-marins.
49En effet, l’expropriation ou l’acquisition de tous les biens à une valeur vénale élevée comme ceux situés sur la côte d’Azur ou la côte Basque épuiserait très rapidement le Fonds. D’ailleurs les rapports successifs de la Cour des comptes critiquent l’extension des missions du Fonds sans anticipation de sa gestion face aux risques littoraux qui s’aggravent sous l’effet du changement climatique et conduisent à des indemnisations toujours plus nombreuses et coûteuses [46].
50Surtout, le Fonds Barnier est alimenté par une surprime, initialement de 4 % et plafonnée aujourd’hui à 12 % des cotisations de tous les assurés de France. La question de la solidarité nationale et de l’égalité des citoyens devant les charges publiques se heurte donc rapidement à d’autres questions : qui paye ? pour protéger qui ?
51Si le principe de solidarité à l’origine de la mise en place de ce dispositif est important à maintenir, chacun pouvant faire face un jour ou l’autre à la survenance d’un risque naturel, en revanche, la question de l’indemnisation des biens littoraux se pose différemment, en raison notamment de la très haute valeur spéculative de certains biens immobiliers exposés.
52Quand bien même il n’est pas question de renoncer au principe de solidarité, il semble, comme en matière d’égalité devant la loi, qu’une distinction doive être faite entre une solidarité formelle uniquement fondée sur le calcul de la valeur de l’immeuble et une solidarité réelle qui tienne compte de la vulnérabilité personnelle de l’occupant. Si l’on s’en tient à l’actuel fonctionnement du Fonds Barnier, il serait fort probable que ce dernier soit rapidement amputé uniquement par l’expropriation de quelques villas de très grande valeur. Or ces villas ne sont parfois que des résidences secondaires, voire tertiaires, possédées par des propriétaires loin d’être socialement vulnérables. Dans cette situation, on arriverait à l’application d’une solidarité de façade entre les millions d’assurés français qui alimentent le Fonds Barnier et les happy few qui en retireraient une indemnisation généreuse. Ces dérives doivent être évitées.
53Pour prolonger cette réflexion, on pourrait interroger la qualification de « juste » indemnité qui accompagne toute privation de propriété au sens de l’article 17 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 selon lequel « la propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité ». Une indemnité « juste » doit-elle tenir compte exclusivement de la valeur financière du bien ou inclut-elle la prise en considération de la situation personnelle de celui qui perd sa propriété ? En d’autres termes, l’objectif de la solidarité doit-il être en priorité de protéger les vies humaines ou de défendre des biens particuliers ?
54Il paraît souhaitable que le fonctionnement du Fonds Barnier s’oriente à terme vers une solidarité réelle avec les habitants en s’éloignant de la simple logique d’assurance des biens.
2 – Vers une hiérarchisation des indemnisations
55Dans ce contexte, le moment est sans doute venu de proposer une réforme des outils juridiques et des pratiques en matière de gestion et d’anticipation des risques littoraux en dissociant les modes d’action orientés vers les personnes et vers les biens.
56En premier lieu, dans les situations d’urgence, sur les zones de danger grave pour la vie humaine, il conviendrait de mobiliser davantage l’outil que constitue l’arrêté de péril en le faisant évoluer pour qu’il puisse s’appliquer en cas de désordre lié au sol et non pas seulement à l’état ou à la conception d’un immeuble comme c’est le cas aujourd’hui [47]. En effet, à l’heure actuelle, si la cause prépondérante d’un désordre est d’origine naturelle, le Maire ne pourra exercer que ses pouvoirs de police générale – et non la procédure de péril – ce qui implique, d’une part, que seule la commune sera amenée à supporter les conséquences financières du désordre – les travaux sont à la charge des propriétaires dans le cas d’un arrêté de péril – et, d’autre part, que la procédure de relogement obligatoire prévue en cas d’arrêté de péril n’est pas applicable de droit.
57En second lieu, une fois les personnes évacuées et placées en lieu sûr, éventuellement au moyen d’une politique d’aide au relogement des personnes isolées ou vulnérables, il conviendra de traiter plus sereinement la question du financement de la suppression du bien dangereux.
58Si l’on considère que le Fonds Barnier ne pourra sans doute pas indemniser par anticipation tous les immeubles qui devront être progressivement supprimés sur l’ensemble des littoraux français, surtout en tenant compte de la valeur vénale des biens concernés, il faudra choisir entre deux options. La première consiste à augmenter les ressources du Fonds, mais les assureurs considèrent que 12 % des primes d’assurance constitue un maximum au-delà duquel se poserait un refus de consentement à payer des assurés [48]. La seconde option consiste à diminuer les dépenses du Fonds, qu’il s’agisse de plafonner le montant de l’indemnisation par immeuble, ou encore de limiter le nombre d’immeubles qui pourront bénéficier du dispositif. C’est cette seconde posture qu’adopte actuellement le Ministère chargé de l’environnement, qui décide des attributions des aides du Fonds Barnier, et refuse donc l’extension du Fonds aux immeubles soumis à l’érosion littorale, malgré les tentatives parlementaires successives dans ce sens [49].
59Mais s’il paraît nécessaire, aujourd’hui, d’économiser les ressources du Fonds Barnier, il nous semble qu’il serait plus équitable de choisir les exclusions, non pas en fonction du risque qui menace l’immeuble lui-même, mais en fonction de la capacité financière ou de la capacité de « résilience » des habitants de ce bien. Il s’agirait en quelque sorte de placer la reconstruction des victimes avant la reconstruction des immeubles. Aussi, si l’on admet le principe selon lequel la solidarité ne pourra pas jouer de la même façon pour tous, certains critères d’équité sociale pourraient permettre de moduler les indemnisations et de justifier un traitement différencié, en dirigeant le fonds en priorité vers les habitants les plus vulnérables.
60Dans cette optique, des critères d’intervention ont été proposés dès 2011 par les chercheurs [50] en accompagnement d’une méthode de recul des habitations sur le littoral (méthode MAReL - Méthode d’Anticipation du Recul sur les Littoraux) [51].
61Ces critères, cumulatifs ou alternatifs, pourraient être recherchés parmi les suivants :
- la qualification de résidence permanente ou secondaire et le taux d’occupation de l’immeuble ;
- la capacité fiscale du propriétaire (par exemple éviction de l’indemnisation des biens, éventuellement occupés en résidence principale, appartenant à des personnes physiques disposant de revenus ou d’un capital immobilier correspondant à deux fois la valeur du bien) ;
- l’utilisation de l’immeuble indispensable à la profession (résidence de pêcheurs ou d’ostréiculteurs) ;
- la durée d’occupation de l’immeuble, qui permet de supposer que la situation de risque n’était pas connue au moment de l’acquisition du bien, et qui peut également qualifier une forme d’attachement familial au lieu et éviter des effets d’aubaine ou des tentatives d’acquisition spéculative.
62Les critères de la qualité et de la durée de l’occupation sont d’ailleurs utilisés dans la loi dite « Letchimy » [52] qui subordonne le bénéfice de certains dispositifs de relogement ou d’indemnisation spécifiques à l’outre-mer à la condition que les biens constituent la résidence principale de l’occupant et que l’occupation de ces logements soit continue et paisible depuis plus de dix ans.
63Pour l’heure, les indemnisations issues du Fonds Barnier ne tiennent pour leur part aucun compte de ces critères, ce qu’a d’ailleurs critiqué la Cour des Comptes : « Depuis sa création, le fonds finance le rachat des biens à un niveau supérieur à leur valeur vénale. Ce dispositif s’avère particulièrement avantageux pour les bénéficiaires : aucun élément relatif à leur patrimoine, à leur situation personnelle ou au statut de l’habitation – principale ou secondaire – n’est pris en compte pour l’examen de l’éligibilité et la détermination du montant de l’indemnisation » [53].
64Il pourrait être objecté que ces solutions se heurtent au principe de l’égalité des citoyens devant les charges publiques. Mais ce principe peut être aujourd’hui relativisé par référence à de nouvelles notions qui apparaissent en droit international de l’environnement, notamment en droit du changement climatique. En effet, la Déclaration de Rio et la Convention cadre des Nations Unies du 3 juin 1992 sur les changements climatiques ont introduit dans l’ordonnancement juridique international le principe des « responsabilités communes mais différenciées » [54]. Cette notion permet de faire peser différemment les efforts sur les différents États signataires, en prenant certes en considération leurs parts d’émissions de gaz à effet de serre dans les émissions mondiales, mais également leur capacité financière et technologique à prendre les mesures d’atténuation et d’adaptation qui s’imposent. Elle permet donc de moduler les obligations des États en tenant compte (parmi d’autres critères) de leur richesse.
65Un peu éloignée de la stricte égalité juridique, mais plus conforme à la réalité économique, cette première émergence, dans le droit international, de la capacité financière à agir et à se protéger, pourrait être avantageusement reprise en droit national de l’adaptation au changement climatique. Ainsi pourrait-on proposer cette vision plus conforme aux réalités d’une solidarité qui soit différenciée selon la vulnérabilité du propriétaire ou de l’occupant.
Conclusion
66À la lumière du cas de l’immeuble du Signal à Soulac-sur-Mer, le droit apparaît aujourd’hui peu outillé pour anticiper les effets du changement climatique sur l’ensemble du littoral français et ultra-marin et en particulier l’érosion, laquelle s’aggravera sous l’effet d’événements climatiques plus intenses et de l’élévation du niveau de la mer. À ce jour, le droit laisse pour compte de nombreux habitants du littoral dont les habitations sont menacées par l’érosion, qui ne bénéficient pas des facilités offertes par le Fonds Barnier et sont traités différemment de leurs voisins littoraux bénéficiaires de la « solidarité nationale » car menacés, par exemple, par la submersion marine ou l’effondrement d’une falaise rocheuse.
67Dans une perspective d’amélioration du dispositif, des critères peuvent être proposés en vue d’introduire la recherche d’une égalité sociale qui n’est pas à l’œuvre aujourd’hui, le Fonds Barnier choisissant à ce jour les exclusions en fonction du risque qui menace l’immeuble lui-même, et non en fonction de la capacité financière ou de la capacité de « résilience » des habitants de ce bien.
68Toutefois, dans une perspective d’anticipation, c’est à une réflexion plus générale sur l’appropriation du littoral que renvoient le cas du Signal et les contentieux émergents [55]. Le droit atteint en effet ses limites en ne proposant, pour le littoral, que l’alternative propriété privée – domaine public maritime, dichotomie classique qui ne permet pas de trouver de réponses satisfaisantes à l’adaptation du littoral au changement climatique.
69La notion de « bien commun » offrirait à cet égard des perspectives intéressantes en permettant de penser la propriété au-delà des logiques de marché et de valeur du foncier. Le renouveau d’intérêt pour la notion théorisée par Elinor Ostrom dès 1990 semble démontrer que le moment se prête à ces réflexions [56]. Le littoral pourrait entrer dans cette catégorie juridique au même titre que « certains biens […] qui peuvent représenter un objet de jouissance collective » [57]. Il s’agirait ainsi de placer le littoral sous un régime de « patrimoine commun » régi par « des règles émanant de la communauté des usagers visant à en assurer l’intégrité et le renouvellement » [58]. L’avenir du littoral reste à inventer.
Mots-clés éditeurs : FPRNM, submersions marines, littoral, Fonds Barnier, Soulac-sur-Mer, risques littoraux, changement climatique, inégalités environnementales, Le Signal, érosion dunaire
Date de mise en ligne : 19/03/2019
Notes
-
[*]
Cet article a été rédigé dans le cadre du programme GESPAR50 – Définition d’une stratégie de Gestion Partagée des zones à Risques sur la bande des 50 pas géométriques – financé par la Fondation de France, coordonné par l’Agence des 50 pas géométriques de Guadeloupe et Marie-Laure Lambert.
-
[1]
Pour un commentaire de cette décision, voir Ch. Gustave-Huteau, RJE 4/2018, p. 826-838.
-
[2]
Loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement, article 13. Le régime du Fonds est défini aux articles L. 561-1 et suivants et R. 561-6 et suivants du Code l’environnement.
-
[3]
Loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité.
-
[4]
Loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, article 222.
-
[5]
Cour des comptes, Les enseignements des inondations de 2010 sur le littoral atlantique (Xynthia) et dans le Var, 2012 : https://www.ccomptes.fr/fr/publications/les-enseignements-des-inondations-de-2010-sur-le-littoral-atlantique-xynthia-et-dans).
-
[6]
Commissariat général au développement durable, Service de l’observation et des statistiques, Les risques naturels et industriels sur le littoral, mai 2011, p. 132.
-
[7]
L’article 2 bis de la proposition de loi portant adaptation des territoires littoraux au changement climatique dans sa version adoptée en 2ème lecture à l’Assemblée nationale (31 janvier 2017) propose que le Fonds Barnier « finance les indemnités au profit du propriétaire d’un bien immeuble lorsque ce bien a fait l’objet d’une interdiction d’habiter ou d’occuper les lieux prononcée par la puissance publique avant le 1er janvier 2017 en raison de la réalisation d’un recul du trait de côte. Ces indemnités sont calculées sans prendre en compte le risque de recul du trait de côte et leur montant maximum est fixé à 75 % de la valeur estimée de chaque bien ».
-
[8]
Loi n° 2011-725 du 23 juin 2011 portant dispositions particulières relatives aux quartiers d’habitat informel et à la lutte contre l’habitat indigne dans les départements et régions d’outre-mer.
-
[9]
GIP Littoral Aquitain, La relocalisation des activités et des biens en Aquitaine - Synthèse et conclusion de l’étude de faisabilité de la relocalisation à Lacanau, mai 2015, 116 p., http://www.mairie-lacanau.fr/environnement/381-erosion-du-littoral.html.
-
[10]
Ministère de l’Écologie, du Développement Durable et de l’Énergie, Vers la relocalisation des activités et des biens - 5 Territoires en expérimentation - Séminaire national de lancement du 14 février 2013, 35 p., http://www.developpement-durable.gouv.fr/Strategie-nationale-de-gestion.html
-
[11]
M.-L. Lambert, C. Claeys, A. Arnaud, « Vulnérabilité économique et sociale, facteur d’invisibilité des risques ? », Revue Riséo, 2017-2, n° spécial Les risques invisibles, http://www.riseo.cerdacc.uha.fr
-
[12]
Voir notamment les projets de recherche financés par la Fondation de France : « AlternaLiVE - Alternatives Littoral Vulnérable – Élévation du niveau marin » (2012-2015), et GesPaR50, « Définition d’une stratégie de Gestion Partagée des zones à Risques sur la bande des 50 pas géométriques », 2015-2018.
-
[13]
TA Bordeaux, 25 septembre 2014, n° 1301417, 1301705, 1301938.
-
[14]
CAA Bordeaux, 9 février 2016, n° 14BX03289.
-
[15]
Décision de renvoi du Conseil d’État n° 2018-698 QPC du 6 avril 2018.
-
[16]
Voir la Décision n° 2018-717/718 QPC du 6 juillet 2018 relative au délit de solidarité qui consacre le principe de fraternité et aux termes de laquelle le Conseil constitutionnel rappelle qu’il ne dispose pas « d’un pouvoir général d’appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement ».
-
[17]
CE, avis du 8 mars 1994, req. n° 355785.
-
[18]
Cour des comptes, 2016, Le Fonds de Prévention des Risques Naturels Majeurs, référé n° S2016-3768.
-
[19]
Voir en ce sens, T. Mohamed Soilihi et al., Domaines publics et privés de l’État outre-mer, 30 propositions pour mettre fin à une gestion jalouse et stérile, Rapport Sénat n° 538, 18 juin 2015.
-
[20]
Loi n° 2011-725 du 23 juin 2011, précitée.
-
[21]
L’indemnisation ne peut être supérieure à 40 000 euros pour un logement et à 20 000 euros pour un local à usage professionnel, mais ce plafond est pondéré par l’application de critères tenant notamment à la vétusté du bien et à la durée de l’occupation. Cf. arrêté du 18 février 2013 fixant le barème de l’aide financière prévue aux articles 1er, 2, 3 et 6 de la loi n° 2011-725 du 23 juin 2011.
-
[22]
Art. L. 561-1 C. env.
-
[23]
Art. L. 561-3. C. env.
-
[24]
Art. L. 2111-4 et suivants CGPPP.
-
[25]
CE 22 septembre 2017, req. n° 400825.
-
[26]
Art. R. 561-15 C. env.
-
[27]
Cour des comptes, 2016, op. cit.
-
[28]
Art. L. 561-1 et 3 C. env.
-
[29]
Art. L. 211-7 I bis C. env.
-
[30]
TA Bordeaux, 25 septembre 2014, n° 1301417, Syndicat secondaire « Le Signal ».
-
[31]
M.-L. Lambert, A. Arnaud et C. Claeys, « Justice climatique et démocratie environnementale - Les inégalités d’accès au droit des populations vulnérables aux risques littoraux – quelques éléments de comparaison », Vertigo, à paraître en 2018.
-
[32]
Ministère de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer, en charge des relations internationales sur le climat, La distance à la mer : principal facteur de caractérisation socio-démographique du territoire littoral, Datalab n° 21, mai 2017, 51 p.
-
[33]
C. Claeys et al., « Une analyse interdisciplinaire des vulnérabilités socio-environnementales : le cas de falaises côtières urbanisées en Méditerranée », NSS, 25 :3, 2017, p. 241-254.
-
[34]
V. Kolb, Analyse géographique des inégalités environnementales et écologiques en milieu littoral urbain, thèse soutenue à l’Université de La Rochelle le 20 novembre 2015, p. 201.
-
[35]
Entretien avec un assureur lors de la 7ème édition de la journée Caisse Centrale de Réassurance CAT, 30 juin 2016, Paris.
-
[36]
C. Claeys, A. Arnaud, M.-L. Lambert, "The impact of legal vulnerability on environmental inequalities. A case study of coastal populations in Guadeloupe (French Antilles)", Académie des sciences, C. R. Geoscience, 349 (2017), p. 351-358.
-
[37]
M.-L. Lambert, C. Claeys, A. Arnaud, 2017, op. cit. ; Roger Coco, Le régime juridique de prévention et de réparation des risques naturels majeurs confronté aux exigences de justice sociale et environnementale. Le cas des Antilles françaises, thèse soutenue le 30 janvier 2015 à l’Université des Antilles et de la Guyane.
-
[38]
Voir Y. Jacob, Rapport n° 2593 déposé le 5 mars 1996 au nom de la commission de la production des échanges sur le projet de loi relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur de la zone dite des cinquante pas géométrique, Assemblée nationale, p. 23.
-
[39]
Loi n° 2011-725 du 23 juin 2011, précitée.
-
[40]
Sont ici concernés : Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion, Mayotte et Saint-Martin.
-
[41]
Arrêté du 18 février 2013 fixant le barème de l’aide financière prévue aux articles 1er, 2, 3 et 6 de la loi n° 2011-725 du 23 juin 2011.
-
[42]
Arrêté du 12 janvier 2005 fixant le montant maximal des subventions accordées pour les acquisitions amiables et les mesures mentionnées au 2° du I de l’article L. 561-3 du Code de l’environnement, JORF 15 janvier 2005, p. 679.
-
[43]
Arrêté du 28 avril 2010 fixant le montant maximal des subventions accordées pour les acquisitions amiables de biens sinistrés et les mesures mentionnés au 2° du I de l’article L. 561-3 du Code de l’environnement.
-
[44]
Source : Agence des 50 pas géométriques de Guadeloupe.
-
[45]
Cour des comptes, 2018, L’établissement, le contrôle et le recouvrement de l’impôt outre mer, référé n° S2018-0132, p. 4.
-
[46]
Cour des comptes, 2012, op. cit., p. 5.
-
[47]
CE, 27 juin 2005, n° 262199.
-
[48]
Entretien avec un assureur lors de la 7ème édition de la journée Caisse Centrale de Réassurance CAT, 30 juin 2016, Paris.
-
[49]
Proposition de loi portant adaptation des territoires littoraux au changement climatique déposée à l’assemblée nationale le 13 juillet 2016 ; Proposition de loi relative au développement durable des territoires littoraux déposée au Sénat le 13 septembre 2017 ; Proposition de loi visant à instaurer un régime d’indemnisation pour les interdictions d’habitation résultant d’un risque du recul du trait de côte, déposée au Sénat le 16 mai 2018.
-
[50]
Rapport final, Programme de recherche Vuligam-PIRVE, http://www.urbanisme-puca.gouv.fr/IMG/pdf/Vuligam_rapport_final_complet.pdf.
-
[51]
M.-L. Lambert, « Le recul stratégique - De l’anticipation nécessaire aux innovations juridiques », in Droit des risques littoraux et changement climatique - connaissance, anticipation, innovation, éditions Vertigo 2015 (https://journals.openedition.org/vertigo/15812).
-
[52]
Loi n° 2011-725 du 23 juin 2011, précitée.
-
[53]
Cour des comptes, 2016, op. cit.
-
[54]
Déclaration de Rio, principe 7 : « Étant donné la diversité des rôles joués dans la dégradation de l’environnement mondial, les États ont des responsabilités communes mais différenciées » ; Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, articles 3 et 4 : « Il incombe aux Parties de préserver le système climatique dans l’intérêt des générations présentes et futures, sur la base de l’équité et en fonction de leurs responsabilités communes mais différenciées et de leurs capacités respectives ». Voir également S. Lavallée et K. Bartenstein, « Le principe des responsabilités communes, mais différenciées au service du développement durable », in A. Michelot (dir.), Équité et environnement : Quel(s) modèle(s) de justice environnementale ?, Bruxelles, Larcier, 2012, p. 377-386.
-
[55]
CE, 22 septembre 2017, req. n° 400825.
-
[56]
M. Antona et F. Bousquet (dir.), Une troisième voie entre l’État et le marché – échanges avec Elinor Ostrom, Quae, 2017, 148 p.
-
[57]
M. Cornu, « Biens communs (approche juridique) », in M. Cornu, F. Orsi. et J. Rochfeld (dir.), Dictionnaire des biens communs, PUF, 2017, p. 107.
-
[58]
B. Coriat, cité par M. Cornu, op. cit., p. 106.