1Le 9 mars 2018 s’est tenu à l’antenne universitaire de Narbonne un colloque consacré aux aspects juridiques de l’érosion côtière. Cette manifestation concrétise l’investissement particulier du Centre de Droit de l’Économie et du Développement de l’Université de Perpignan (EA 4216) dans les problématiques environnementales. L’érosion côtière est en effet un phénomène naturel qui affecte une large part du littoral français et qui a vocation à s’amplifier dans les décennies à venir, du fait notamment du changement climatique. Cette réalité naturelle remet en cause à la fois l’occupation présente de cet espace particulier mais aussi son développement. Au-delà des situations locales, elle impose de véritables choix politiques, entre résistance, adaptation et recul dit « stratégique » (ce qui est assez inquiétant : le recul stratégique n’est souvent que l’autre nom de la débâcle).
2Les stratégies nationales peinent à se mettre en place et restent à un niveau de généralité sans doute trop important, du fait aussi d’un manque de moyens. La gestion de l’érosion côtière comme risque naturel se fait essentiellement localement par le biais du droit de l’urbanisme, l’État intervenant dans le cadre des plans de prévention des risques. Elle pose la question d’une éventuelle adaptation des règles spécifiques au littoral. Elle suscite aussi l’inquiétude en ce qui concerne son articulation ou son intégration dans la compétence gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations. Elle remet également en première ligne les autorités locales en charge de la police administrative générale alors que, juridiquement, l’érosion côtière se traduit d’abord par une modification des limites du domaine public maritime, avec des incidences sur les propriétés riveraines qui méritent d’être précisées.
3À cette diversité des questionnements s’en ajoute une autre. Le plus souvent, l’érosion côtière n’est perçue qu’à travers le prisme du droit national. Or elle affecte également le droit international, en modifiant notamment les frontières étatiques. Au-delà de ce jeu des frontières, les enjeux humains, économiques, environnementaux sont tels que l’érosion devient progressivement un objet de l’action internationale, avec des stratégies, là encore le plus souvent régionales ou locales. Et cet objet commence à s’institutionnaliser.
4La diversité des questionnements, des points de vue, des angles d’approche rend vaine la recherche d’une réponse simple et univoque. La complexité des problématiques et des situations suppose donc un effort collectif permettant, par l’analyse critique, d’esquisser des solutions juridiques et d’en analyser la pertinence. Si le choix n’appartient qu’au pouvoir politique, le juriste peut aussi prendre sa part au débat.
5Avec la complicité de la Revue Juridique de l’Environnement, les diverses réflexions qui suivent ont pour objet d’alimenter cette réflexion et d’ouvrir des perspectives. Il s’agit aussi de donner tort à Hauriou lorsqu’il affirme que « boîteuse comme la justice, la théorie suit de loin les faits ».
Date de mise en ligne : 19/03/2019