Notes
-
[1]
Le système des assemblées populaires est la forme organisationnelle du pouvoir de dictature démocratique du peuple chinois et le système politique fondamental de Chine. L’APN est l’organe suprême du pouvoir d’Etat et les assemblées populaires locales sont les organes locaux du pouvoir d’Etat. L’APN est composée de députés élus par les provinces, les régions autonomes, les municipalités relevant de l’autorité centrale ainsi que par les forces armées. L’APN exerce des fonctions importantes dont deux sont liées directement au contrôle de constitutionnalité : veiller à l’application de la Constitution et modifier ou annuler les décisions inopportunes prises par le Comité permanent de l’APN.
-
[2]
Le Comité permanent de l’APN, son organe permanent, exerce le pouvoir suprême d’Etat dans l’intervalle des sessions de l’APN et lui rend compte de son travail. Le Comité permanent de l’APN est composé du président, des vice-présidents, du secrétaire général et des membres. Le Comité permanent de l’APN exerce des fonctions importantes dont trois sont liées directement au contrôle de constitutionnalité : interpréter la Constitution et veiller à son application ; annuler les règlements administratifs, les décisions et les ordonnances émanant du Conseil des affaires d’Etat qui seraient contraires à la Constitution et aux lois ; annuler les règlements et les décisions de caractère local émanant des organes du pouvoir des provinces, des régions autonomes et des municipalités relevant de l’autorité centrale qui seraient contraires à la Constitution, aux lois et aux règlements administratifs.
-
[3]
Voir l’article 10 du règlement d’enregistrement de 2005.
-
[4]
V. L. Laifan, « Entretien sur la création de la division de l’examen et du registre des règlements », Journal de la Jeunesse , le 25 juin 2004.
-
[5]
V. L. Laifan, « Contrôle de constitutionnalité en Chine : ses caractères et sa formation. Vue de trois terminologies », Revue de la Science Sociale de la Province de Zhejiang , n° 5, 2010, pp. 33-35.
-
[6]
En mars 2003, M. Sun Zhigang, jeune diplômé de 27 ans d’une université de la province du Hubei, s’est rendu à Guangzhou dans le but d’y chercher un travail. Au cours de son séjour, il a été interpellé par la police pour un contrôle d’identité. Ne possédant aucune pièce d’identité, il a été considéré comme une personne sans domicile fixe et sans ressources et placé en centre de rétention, où il est décédé le 20 mars 2003 à la suite de tortures. Révélée dans la presse, cette affaire a suscité des réactions d’indignation qui ont conduit à l’abolition de la rétention préalable au renvoi. Le règlement du 12 mai 1982 relatif à la rétention pour renvoi des vagabonds et des mendiants en ville a ainsi été remplacé le 1er août 2003 par des mesures destinées à aider les personnes en situation irrégulière.
-
[7]
Pour quelques exemples de contributions : M. Jihong , Les éléments du jugement constitutionnel , Éditions de l’Université de sécurité publique , 1998 ; L. Zhong , La surveillance constitutionnelle Éditions de la Contribution sur la Science Sociale , 2002 ; H. Xiaohua , Le contentieux constitutionnel , Éditions Juridiques , 2002 ; W. Zhenmin , Le système de contrôle de constitutionnalité en Chine , Éditions de l’Université de la Science politique et juridique de la Chine , 2004 ; L. Guanghua , Étude comparée sur le contrôle de constitutionnalité , Éditions de la Contribution sur la Science Sociale , 2004 ; H. Jin’guang , Contrôle de constitutionnalité, perspectives du droit comparé , Éditions de l’Université du Peuple , 2006.
-
[8]
M. Cappelletti, Le pouvoir des juges, trad. R. David, Paris, Economica-PUAM, 1990, p. 216.
-
[9]
Chaque année, le centre de recherche de droit constitutionnel de l’Université du Peuple organise des sondages, des votes, des tables rondes et même des conférences de presse sur les affaires ayant un objet constitutionnel, puis des contributions sont réunies dans un recueil des affaires constitutionnelles : H. Dayuan (dir.), Études sur les événements constitutionnels chinois , vol. 5, Éditions juridiques . Le groupe de travail autour de M. Han Dayuan vise à analyser les cas concrets qui peuvent être mieux résolus en interprétant les dispositions constitutionnelles et en affirmant les droits fondamentaux sur un plan doctrinal. En 2010, cinq volumes ont déjà été publiés.
-
[10]
V. L. Laifan (dir.), La doctrine et les techniques de contrôle de constitutionnalité , Éditions Juridiques 2009, 488 p. Le Professeur Lin Laifan et son groupe de travail contribuent à présenter les principes et les techniques de contrôle du point de vue du droit comparé, notamment ceux de l’Amérique et de l’Allemagne. Cette méthode est, à leurs yeux, la clé de voûte pour faire avancer le contrôle de constitutionnalité. L’utilité de leur recherche pour l’appréciation de la conformité à la Constitution parviendra à sa pleine effectivité une fois que sera établi un organe spécial de contrôle.
-
[11]
V. Hong Shihong , « La question de constitutionnalité – l’antagonisme entre le centralisme démocratique et contrôle de constitutionnalité », Revue de Science juridique en Chine et à l’étranger , n° 5, 2000, pp. 596-599.
-
[12]
V. Wang Zhengmin , Le système du contrôle de constitutionnalité de la Chine , Éditions de l’Université de sciences juridiques et politiques de la Chine , Pékin, 2004, p. 108.
-
[13]
V. Fan Jinxue , « Sur le perfectionnement du contrôle de constitutionnalité en Chine », Actes du colloque du deuxième forum du droit constitutionnel en Asie, 21-22 août 2009, p. 177.
-
[14]
Le Conseil des affaires d’Etat de la RPC, c’est-à-dire le gouvernement populaire central, est l’exécutif de l’organe du pouvoir d’Etat suprême, l’organe administratif suprême de l’Etat. Le Conseil des affaires d’Etat dirige de fançon unifiée le travail des organes admnistratifs de l’Etat à tous les échelons, et délimite les attributions de l’autorité centrale et des administrations des provinces, des régions autonomes et des municipalités relevant de l’autorité centrale. Le Conseil des affaires d’Etat est composé du Premier ministre, des vice-premiers ministres, des conseillers d’Etat, des ministres, des présidents de commission, du président de la Commission de vérification des comptes et du secrétaire général. Ses fonctions sont importantes dont la fonction d’arrêter des mesures administratives, élaborer des lois et règlements administratifs et émettre des décisions et des ordonnances conformément à la Constitution et à la loi est liée indirectement au contrôle de constitutionnalité.
-
[15]
V. Wang Zhengmin , op. cit., p. 107 et 108.
-
[16]
V. Cai Dingjian , Code constitutionnel, commenté et annoté , Editions juridiques, 2e éd., p. 318.
-
[17]
L’article 88 alinéa 4 de la loi sur la législation : « Les ordres, instructions et décisions inappropriés émis par les ministres du CAE ou ceux émis par les gouvernements locaux aux échelons de la province, peuvent être modifiés ou annulés par le CAE », traduction libre.
-
[18]
V. le site officiel du gouvernement chinois : http://www.gov.cn/zwgk/2005-06/03/ content_4049.htm
-
[19]
Wang Kai , « Le contrôle de constitutionnalité en Chine », in Hu Jinguang (dir.), Contrôle de constitutionnalité : perspectives du droit comparé , Éditions de l’Université du Peuple , 2006, p. 336.
-
[20]
V. Ma Ling, « Le rôle de la Cour suprême populaire dans le contrôle de constitutionnalité en Chine », Xue xi yu tansuo , n°6, 2007.
-
[21]
Le codage en chinois de cette réponse est [] .
-
[22]
En 1983, Shen Yafu et Mu Chunlin sont deux journalistes qui ont écrit un reportage pour dévoiler la tragédie d’une femme. Selon ce reportage, cette femme qui s’appelle Tian Zhenzhu a subi des tortures de son mari ce qui a donc suscité beaucoup de critiques envers cet homme dans l’opinion publique. C’est pourquoi cet homme, Du Rong, a lancé une plainte contre les deux journalistes invoquant sa dignité protégée par la loi et la Constitution. Le 29 Juin 1987, le juge a quo a condamné les deux journalistes pour crime de diffamation. Mais les deux coupables ont fait appel devant la Cour intermédiaire de Shanghai en invoquant leur liberté d’expression protégée par la Constitution. Enfin, les juges d’appel ont fait référence à plusieurs dispositions constitutionnelles en rejetant leur demande et ont donné ainsi un bel exemple pour justifier la possibilité d’un contrôle de constitutionnalité par les juges ordinaires. V. le lien : http://www.chinacourt.org/article/detail/2002/11/id/17813.shtml. Consulté le 2 Janvier 2008.
-
[23]
Cité par Wang Zhenmin, Le système de contrôle de constitutionnalité de la Chine , Éditions de l’Université de sciences juridiques et politiques de la Chine , Pékin, 2004, p. 198.
-
[24]
V. Zhang Qianfan et Huang Yue , « De la Constitution au constitutionnalisme : le passé, le présent et l’avenir du contrôle de constitutionnalité en Chine », in Actes du colloque de la deuxième table ronde asiatique du droit constitutionnel , p. 157, à paraître.
-
[25]
Wang Xiuzhe , « Les obstacles et les propositions de réforme sur le déclenchement du contrôle de constitutionnalité par les citoyens , Revue de Science juridique du Nord , n°1, 2010, p.29.
-
[26]
Par exemple, le Professeur Chen Weidong ???, un pénaliste connu, a dit que les modifications mettent l’accent sur les droits des accusés à avoir des conseillers juridiques ; elles permettront aux avocats d’examiner et de copier l’énoncé des faits et les charges prononcées par le parquet ; et les accusés et leurs avocats devront être sans surveillance pendant leurs entretiens privés. V. un entretien sur la révision de la loi de procédure pénale en mars 2012 : http://news. xinhuanet.com/politics/2012lh/2012-03/11/c_111636229.htm. Consulté le 10 mai 2012.
-
[27]
À savoir la Constitution, la loi sur la législation, la loi de surveillance du Comité permanent de l’APN du 27 août 2006 et le règlement du 16 décembre 2005 sur l’enregistrement des règlements administratifs, règlements locaux et règlements particuliers.
-
[28]
Ce contrôle se trouve notamment dans le système de « l’approbation préalable ». C’est-à-dire que certains actes juridiques ne peuvent entrer en vigueur qu’après avoir été soumis pour approbation au Comité permanent de l’APN. Dans ce cas, leur saisine est obligatoire, l’examen est arbitraire et la décision est exécutoire. En vertu des alinéas 2 et 3 de l’article 63 de la loi sur la législation, les comités permanents des Assemblées populaires compétents constatent si les règlements locaux relevants des municipalités relativement importantes sont contraires à la Constitution et à la loi. Si c’est le cas, le Comité permanent concerné doit formuler une décision et, dans le cas contraire, les règlements locaux doivent être ratifiés dans un délai de 4 mois.
-
[29]
Dans ce cas, la Constitution et la loi sur la législation prévoient que le Comité permanent et les autres organes contrôlent les textes déjà ratifiés et produisant des effets de droit. Ce mode de contrôle se divise en deux catégories : le contrôle relevé d’office et le contrôle par requête. C’est dans cette procédure que les principaux objets de contrôle vont être soumis.
-
[30]
Dans l’affaire Sun Zhigang , ce sont trois docteurs en droit qui ont œuvré pour déclencher la procédure de contrôle de constitutionnalité pour la première fois en Chine.
-
[31]
En 2005, le Comité permanent de l’APN a modifié le règlement sur la procédure d’enregistrement et de contrôle des règlements administratifs et locaux, règlements autonomes et particuliers, règlements des zones économiques spéciales (?? ?) et un nouveau règlement a été élaboré par le Comité permanent de l’APN afin de préciser et de compléter les règles de procédure de contrôle a priori des actes juridiques : le règlement sur le contrôle et l’enregistrement de l’interprétation judiciaire ().
-
[32]
En vertu de l’article 8 du règlement sur les enregistrements du 16 décembre 2005, lorsqu’une commission permanente estime dès réception qu’il existe des violations de la Constitution ou des lois dans les textes enregistrés, il peut effectuer un examen d’office, et peut collaborer avec la commission des travaux législatifs en vue de faire un rapport écrit. Par ailleurs, lorsque la commission des travaux législatifs conteste la conformité des actes enregistrés à la Constitution, elle peut formuler une proposition écrite et la déposer à la commission permanente concernée après approbation du Secrétaire général.
-
[33]
V. Luo Meiying , « Un entretien avec le Professeur Lin Laifan sur l’établissement du bureau d’enregistrement des lois et des règlements », Journal des jeunes , 25 juin 2004, en ligne : http://www.lawinnovation.com/ html/zgfx50rlt/596989160155.shtml, Consulté le 12 octobre 2011.
-
[34]
V. l’article 10 du règlement d’enregistrement.
-
[35]
V. l’article 11 du règlement d’enregistrement.
-
[36]
V. l’article 10 du règlement d’enregistrement.
-
[37]
V. Hu Jin’guang , « La perfection du système de recours constitutionnel en Chine », Études de l’Université de la gestion du cadre politique et juridique de Henan , n° 6, 2007, p. 7.
-
[38]
Lin Laifan (dir.), Les doctrines et les techniques du contrôle de la constitutionnalité , Éditions Juridiques , 2009, p. 469.
-
[39]
Par exemple, dans l’affaire Sun Zhigang, les propositions du contrôle n’ont eu aucune réponse officielle.
-
[40]
Selon l’article 15 du règlement d’enregistrement « Un bulletin rédigé par le premier bureau du secrétariat du Comité permanent de l’APN va résumer le bilan d’enregistrement des règlements aux commissions permanentes de l’APN, aux membres du Comité permanent et aux organes d’élaboration ».
-
[41]
Les tenants de cette thèse sont généralement des constitutionnalistes de la première génération de la nouvelle Chine : Zhang Youyu , Xu Congde , He Huahui , cités par Hu Jinguang , op. cit., p. 197 et s.
-
[42]
V. Zhang Qianfan , « L’institution d’un système de contrôle des normes juridiques en Chine – Réflexions sur la théorie de la révision constitutionnelle », Stratégie et Gestion , n° 2, 2004 ; Wang Lei , Choisir la Constitution , Éditions de l’université de Beijing, 2003, 286 p.
-
[43]
Par exemple, Wang Kewen , « Une proposition pour établir une Cour constitutionnelle en Chine », Jianghai xuekan , n° 2, 1989.
-
[44]
Bao Wanchao ???, « La possibilité d’établir un contrôle de constitutionnalité en coexistence avec le conseil constitutionnel et la Cour populaire suprême », Revue de Science juridique , n? 4, 1998, pp. 11 et s.
-
[45]
Ibidem, p. 64.
-
[46]
Ibidem.
-
[47]
Liu Songshan , « L’échec d’un projet de comité constitutionnel », Revue des débats sur la science juridique et politique , n° 5, 2010, p. 95.
-
[48]
V. Xu Chongde , L’histoire constitutionnelle de la République Populaire de Chine , Éditions du Peuple de Fujian, 2003 , p. 561.
-
[49]
Par exemple, Lin Laifan (dir.), Les doctrines et les techniques du contrôle de la constitutionnalité , Editions Juridiques , 2009, pp. 471-472 ; Ji Weidong , « Contrôle de constitutionnalité et renforcement du pouvoir judiciaire », Sciences Sociales de la Chine , n? 2, 2002, pp. 4-16.
-
[50]
Lin Laifan , Des normes constitutionnelles à une constitution normative , Éditions Juridiques , 2001, p. 341.
-
[51]
Lin Laifan (dir.), Les doctrines et les techniques du contrôle de la constitutionnalité , Éditions Juridiques , 2009, pp. 471-472.
-
[52]
Ji Weidong, op.cit., p.15.
-
[53]
En vertu de l’alinéa 1er de l’article 91 de la loi sur la législation et de l’alinéa 2 de l’article 11 du règlement d’enregistrement.
-
[54]
L. Favoreu, « Juridicisation », in Dictionnaire constitutionnel, Paris, Puf, 1992, p. 544.
-
[55]
X. Philippe (dir.) « La QPC : Perspectives comparatistes. Éléments de réflexion sur la question prioritaire de constitutionnalité au regard de quelques exemples du contentieux constitutionnel comparé : Espagne, Italie, Allemagne », in La question prioritaire de constitutionnalité, sous la direction de Jean-Baptiste Perrier, PUAM, 2011, p. 39 et s.
-
[56]
Ibidem, p. 39.
-
[57]
Liu Hainian , « L’influence sur la légalité chinoise après l’accès à l’OMC et aux deux pactes internationaux relatifs aux droits de l’Homme WTO ». v. le reportage en ligne : http://58.63.114.194:86/ssds/html/2003/12/ 200312191259042766.htm.
-
[58]
L’article 2 et l’article 11 de la loi du contentieux administratif en Chine ont exclu la compétence judiciaire des tribunaux pour le contrôle de la légalité des règlements administratifs. Sur cette question, voir Zhang Li Le contrôle juridictionnel de la légalité des actes administratifs en Chine : éléments d’analyse comparée des contentieux administratifs chinois et français, Bruylant, 2010.
-
[59]
V. Su Li ??, Institutions judiciaires dans les bourgs chinois , Éditions de l’Université de Science politique et juridique de la Chine , 2000, p.74.
-
[60]
V. Ji Weidong , « Le renforcement du pouvoir judiciaire et le contrôle de constitutionnalité » , in Revue de Science sociale de la Chine , n°2, 2002.
-
[61]
V. Wan Yi , ? « L’évolution, l’actualité et l’avenir du “système demande d’instructions supérieures” », in Études sur la Cour suprême , sous la dir. de Zuo Weimin , Éditions Juridiques , 2004, p. 355.
-
[62]
V. Wan Yi , « La crise entre le passé et les temps présents : le système de demande d’instructions », Sciences Juridiques , 2005, n° 2, p. 11.
-
[63]
V. L’article 10 du règlement de l’interprétation judiciaire de la Cour Suprême Populaire.
-
[64]
Le règlement de l’interprétation judiciaire de la Cour Suprême Populaire a précisé des modalités dans chaque étape.
-
[65]
L’ article 5 du règlement de l’interprétation judiciaire de la Cour Suprême Populaire.
-
[66]
L’article 19 du règlement de l’interprétation judiciaire de la Cour Suprême Populaire.
-
[67]
L’alinéa 1er de l’article 20 du règlement de l’interprétation judiciaire de la Cour Suprême Populaire.
-
[68]
Han Dayuan, « La signification, la stratégie et le cadre de la loi sur la procédure de l’interprétation constitutionnelle ? », in Revue de Science sociale de la Province de Zhejiang , n° 9, 2009.
-
[69]
Wang Zhenmin , op. cit., p. 117.
-
[70]
L’Assemblée populaire nationale et son Comité permanent ont fait beaucoup d’efforts pour établir un système juridique complet. Comme on l’a souligné, les efforts normatifs en Chine ont eu des résultats étonnants, à savoir l’adoption de plusieurs milliers de normes juridiques de 1950 à 2009 : plus de 300 lois, plus de 800 règlements administratifs, plus de 20 000 arrêtés ministériels et des gouvernements locaux et plus de 7000 règlements locaux etc. V. Ma Haiyan, « D’une seule loi à des milliers de lois : la vitesse de l’élaboration des lois en Chine ” », disponible sur le site : http://www.chinanews.com. cn/gn/news/2009/09-03/1847272.shtml, consulté le 3 Septembre 2009.
-
[71]
Le 10 juin 2008, deux avocats se sont vus refuser un entretien avec deux accusés par l’administration d’une maison d’arrêt à Haikou, Province de Hainan. L’incident résulte d’un conflit de normes. Selon l’alinéa 2 de l’article 96 de la loi sur la procédure pénale, la possibilité pour les avocats de s’entretenir avec l’accusé qui est dans la maison d’arrêt est soumise à autorisation préalable. Mais en vertu de l’article 33 de la loi sur les avocats, ceux-ci ont le droit de voir l’accusé. Ce conflit des normes a suscité les analyses de certains constitutionnalistes qui, se fondant sur l’article 125 de la Constitution, ont conclu à la priorité au droit de la défense de l’accusé.
-
[72]
J.-P. Massias, Contrôle de constitutionnalité et socialisme : l’exemple des États d’Europe de l’Est (1917-1990), thèse Clermont-ferrand, 1991, p. 914.
1 L’aspiration démocratique émerge en Chine il y a près de cent ans. Depuis la révolution de Xinhai en 1911, la Chine avance sur la voie de la démocratisation comme sur une balançoire et le peuple chinois n’a pas encore connu de système véritablement efficace pour garantir ses droits. Une cause de cette stagnation est l’absence d’un contre-pouvoir pour « arrêter le pouvoir ». Jusqu’à nos jours, dans le contexte politique actuel, la séparation des pouvoirs reste un sujet tabou pour les dirigeants chinois.
2 On considère aujourd’hui que démocratie, droits de l’Homme et État de droit ne peuvent se réaliser que de manière conjointe. Or, en Chine, les carences en ces domaines sont particulièrement fortes. Après la longue éclipse du maoïsme, le retour au droit a été amorcé dès 1978 avec l’apparition de la « légalité socialiste » dans le discours prononcé par Deng Xiaoping devant le Xe Comité central du Parti communiste chinois (ci-après, PCC). Il s’est ensuite affermi avec la notion d’« État de droit socialiste », annoncée par Jiang Zemin en 1996 et inscrite dans la Constitution en 1999. Après une trentaine d’années de réformes à partir de 1978, il est possible de tirer un premier bilan des succès et des échecs dans la construction d’un État de droit ou dans le processus de démocratisation en Chine. Le bilan n’est ni idyllique, ni catastrophique. Certaines institutions ont parfaitement rempli leur rôle, d’autres sont en revanche restées en retrait. Le législateur chinois a fait beaucoup d’efforts pour établir un système juridique complet mais des cas de lois inappliquées ou de vides législatifs existent encore. De plus, la Chine a adhéré à 21 conventions internationales sur les droits de l’Homme. L’Assemblée populaire nationale (ci-après, APN) [1] de Chine a déjà ratifié le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux, et culturels. Et le gouvernement chinois est en train d’examiner les questions importantes liées au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui sera, une fois toutes les conditions réunies, soumis à la ratification de l’APN. Force est de constater que le peuple chinois a vu ses droits civils et politiques ainsi que ses libertés fondamentales inscrites de plus en plus largement dans la Constitution mais la protection de ces droits n’est pas satisfaisante. En même temps, les revendications citoyennes sont de plus en plus fortes, surtout grâce au développement de l’internet. Enfin, le conflit entre le pluralisme de fait de la société et le monisme d’esprit de l’État provoque une crise grave en Chine.
3 C’est pourquoi il nous a paru opportun d’étudier un mécanisme pour promouvoir la réforme des structures politiques, parfaire les systèmes concrets pour la réalisation de la démocratie socialiste et assurer au peuple la pleine jouissance de ses droits. Dans ce contexte, un contrôle efficace de constitutionnalité incarne, pour la plupart des juristes en Chine, une problématique primordiale : celle de définir les limites du pouvoir politique et d’encadrer la relation entre les gouvernants et les gouvernés afin de mieux protéger les droits de l’Homme. Le système actuel de contrôle de constitutionnalité en Chine est très spécial, ou plus exactement étranger au monde occidental. Le pouvoir ou la fonction du contrôle n’appartient pas aux tribunaux ordinaires, ni à un Conseil constitutionnel comme en France ou à une Cour constitutionnelle comme en Allemagne. L’APN est l’organe suprême de contrôle, qui peut modifier ou annuler les décisions inappropriées de son Comité permanent [2]. Par ailleurs, force est de constater que la Constitution n’a confié explicitement le pouvoir d’interprétation constitutionnelle qu’au Comité permanent de l’APN. Ce dernier s’est donc vu conférer des compétences élargies pour contrôler presque tous les actes des autres organes d’État. Aussi, sur la procédure du contrôle, il nous semble que l’esquisse du déroulement de l’examen de la constitutionnalité peut être présentée par une phrase : dès que la saisine est enregistrée et que les vérifications formelles indispensables ont été effectuées, la commission permanente compétente va préparer un projet de décision assorti d’un rapport et le déposer au Secrétaire général, qui sera ensuite soumis à la délibération de la commission des lois par la transmission du Secrétaire général [3].
4 Malgré ces fondements textuels, le contrôle de constitutionnalité n’a jamais fonctionné. Comme l’écrit le professeur Lin Laifan, les obstacles à la mise en œuvre d’un contrôle efficace de constitutionnalité en Chine sont divers : ils prennent principalement trois visages : théorique, politique et enfin technique [4]. L’obstacle théorique est celui de l’auto-contrôle, c’est-à-dire que l’organe législatif contrôle ses propres actes ; l’obstacle politique réside en la toute-puissance du pouvoir politique et l’obstacle technique se manifeste surtout dans l’absence de techniques d’interprétation de la Constitution. Là sont les trois problèmes à résoudre.
5 Les débats doctrinaux sur la résolution des problèmes ont commencé dans les années 1970 [5] et le nombre de publications a véritablement explosé après l’affaire Sun Zhigang [6] : selon les chiffres de la base de données des périodiques chinois, environ 700 articles sur le contrôle de constitutionnalité ont été publiés entre 2003 et 2006. Les ouvrages sur ce thème sont aussi très nombreux [7]. Comme l’écrivait M. Cappelletti, il n’y a aucune solution universelle qui s’imposerait avec la force de la logique, la réponse à ce choix varie en fonction du contexte politique, culturel, social et historique propre à chaque pays [8]. Les juristes chinois ont fait des recherches en se basant sur la réalité chinoise. Les efforts de la doctrine peuvent se distinguer par deux aspects : les propositions pour établir un organe indépendant de contrôle et les propositions pour approfondir les modalités de contrôle. Les premières dépendent toujours de l’autonomie réelle d’un tel organe. Selon nous, ces propositions de réforme doivent se soumettre à la volonté politique et se trouvent dans une impasse actuellement. Nous préférons ainsi suivre les nouvelles démarches prônées par les professeurs Han Dayuan [9] et Lin Laifan [10] pour faire vivre les normes constitutionnelles existantes. Nous insistons sur le fait que le contrôle de constitutionnalité peut exister avec le modèle parlementaire et que des progrès peuvent être accomplis dans le cadre actuel. Partant de ce principe, nous essaierons de proposer des réformes afin de faciliter le développement du contrôle de constitutionnalité en réalisant une véritable justice constitutionnelle. Dans ce cadre, les obstacles à cette évolution seront présentés (I) avant que soient explicitées les propositions de réformes susceptibles de permettre de les dépasser (II).
I – LES OBSTACLES À LA MISE EN ŒUVRE D’UN CONTRÔLE EFFICACE DE CONSTITUTIONNALITÉ
6 Selon le droit positif, si l’on peut dire que l’APN et son Comité permanent sont en théorie les organes compétents pour exercer le contrôle, dans la pratique presque tous les organes d’État se chargent de certains aspects de ce contrôle. Nous pensons quant à nous que les organes législatifs sont des organes majeurs et explicites, mais que les organes exécutifs et judiciaires ont exercé des compétences de manière implicite.
7 Quant à la procédure de contrôle, les sources incluent principalement la Constitution, la loi sur la législation, le règlement d’enregistrement établi par le Comité permanent de l’APN en 2005, la loi de 2007 prévoyant un contrôle des gouvernements locaux par les comités permanents des Assemblées populaires aux différents échelons. En vertu des fondements textuels, le Comité permanent peut exercer son contrôle tant a priori qu’a posteriori. Pour le contrôle a posteriori, les éléments du contentieux sont plus complets que pour le contrôle a priori. Ces éléments sont relatifs aux conditions de recevablilité, à l’instruction, à l’étendue du contrôle et à la décision. Néanmoins, il existe apparemment trop de maillons dans cette procédure. On peut aisément imaginer que les auteurs de saisines peuvent être découragés par cette complexité.
8 Ainsi, il nous semble, a priori, que les obstacles qui empêchent toujours que le contrôle de constitutionnalité soit efficacement déclenché s’expriment surtout dans deux aspects : l’éparpillement des organes (A) et la complexité de la procédure (B).
A – L’ÉPARPILLEMENT DES ORGANES
9 Nous allons aborder à la fois les manifestations de cet éparpillement, à savoir les compétences respectives des organes législatifs, exécutifs et judiciaires (1) et les causes de cet éparpillement (2).
1 – Les manifestations de cet éparpillement
10 Le « gardien de la Constitution », expression qui désigne à l’origine un organe dont la fonction est de protéger la Constitution contre d’éventuelles violations, a été interprété par la Constitution chinoise d’une manière large. En effet, les organes de contrôle de constitutionnalité fonctionnent en théorie de manière unilatérale et hiérarchisée. L’APN est l’organe suprême de contrôle (a) ; le Comité permanent de l’APN est l’organe principal de contrôle (b) ; les Assemblées locales et leurs comités permanents sont chargés quant à eux de contrôler les actes locaux dans leurs propres domaines mais en restant soumis au contrôle de l’APN et de son Comité permanent le cas échéant (c) ; enfin les organes judiciaires peuvent exercer un contrôle implicite (d).
a) La compétence élargie de l’APN et de son comité permanent
11 Même si l’APN a une place théoriquement supérieure à celle des autres organes de contrôle, son Comité permanent peut exercer un réel pouvoir de contrôle.
La place théoriquement supérieure de l’APN
12 Selon l’article 62, alinéa 2, de la Constitution : « L’APN exerce les fonctions et les pouvoirs suivants : - veiller à l’application de la Constitution ». Nous pensons que la compétence de principe de l’APN pour l’exercice du contrôle de constitutionnalité a bien été affirmée par cet alinéa. De plus, l’alinéa 11 de ce même article précise l’objet du contrôle en disposant que l’APN peut modifier ou annuler les décisions inappropriées de son Comité permanent. Pour présenter les compétences de contrôle de constitutionnalité de l’APN, il nous faut éclairer d’abord le mot « inappropriées » et confirmer ensuite la portée du contrôle exercé.
13 Tout d’abord, on doit éclairer le contenu du mot « inappropriées » pour confirmer le pouvoir d’annulation ou de modification de l’APN sur les décisions de son Comité permanent. Autrement dit, est-ce que le mot « inappropriées » dans la Constitution peut être interprété comme signifiant « inconstitutionnelles » ? Dans la doctrine, malgré certains juristes qui dénient la signification implicite d’« inconstitutionnalité » dans cette disposition [11], la plupart des auteurs interprètent ce mot comme un ensemble incluant la signification d’« inconstitutionnalité » et d’« illégalité » [12]. Parmi eux, l’analyse nuancée du Professeur Fan Jinxue mérite d’être soulignée ici [13]. Il a d’abord affirmé que le mot « inappropriées » lui-même ne comprend pas de façon évidente la signification d’« inconstitutionnalité ». Toutefois, selon certaines dispositions contenues dans des lois et règlements et qui explicitent les différentes hypothèses qualifiées d’« inappropriées », on pourrait en déduire la signification d’« inconstitutionnalité ». Par exemple, l’alinéa 2 de l’article 88 de la loi sur la législation a qualifié « la violation d’une norme supérieure par une norme inférieure » d’inappropriée. De plus, on a trouvé ce même cas dans l’article 10 du règlement d’enregistrement publié par le Conseil des affaires d’État [14] (ci-après, CAE) en 2001. Nous partageons ce raisonnement et pensons donc que le mot « inappropriées » implique les cas d’« inconstitutionnalité », d’où l’affirmation de la compétence de l’APN pour le contrôle de constitutionnalité.
14 Une autre question se pose quant à l’étendue du contrôle exercé par l’APN : est-ce qu’il ne peut contrôler que les décisions de son Comité permanent ? Sur cette question, nous rejoignons la majorité des juristes en affirmant que le pouvoir d’annulation et de modification de l’APN et, par conséquent, la portée de son contrôle, excèdent les seules décisions de son Comité permanent. Deux arguments dans la Constitution méritent d’être soulignés ici pour le justifier. Premier point, certains juristes se rangent à une interprétation plus large de la portée du contrôle de l’APN, c’est-à-dire qu’elle ne devrait pas se contenter de contrôler les actes relevant de son Comité permanent. Comme le relève le Professeur Wang Zhenmin [15], l’APN est l’organe suprême du pouvoir et elle doit avoir la compétence légitime pour contrôler tous les autres actes normatifs. De plus, le fondement d’un tel contrôle général peut être trouvé dans le droit positif d’ensemble qui se déduit de différentes dispositions constitutionnelles. Par exemple, selon l’alinéa 3 de l’article 3 de la Constitution, « Les organes administratifs, les organes judiciaires et les parquets, qui émanent des Assemblées populaires, sont responsables devant ces dernières et se soumettent à leur contrôle ». Ainsi, les décisions prises par les pouvoirs publics autres que le Comité permanent de l’APN sont aussi légitimement soumises au contrôle de l’APN. Second point, un autre argument réside dans un changement important dans la Constitution de 1982 qui est l’élargissement de la compétence du Comité permanent de l’APN. Selon l’intention du constituant de 1982, l’alinéa 11 de l’article 62 est fait pour instituer un dernier barrage afin d’éviter le glissement de supériorité de l’APN vers son Comité permanent [16]. Nous pensons ainsi que l’expression « décisions du Comité permanent » doit comprendre les lois et les autres actes normatifs du Comité permanent.
La place importante du Comité permanent de l’APN dans le droit positif
15 Compte tenu du premier alinéa de l’article 67 de la Constitution qui dispose que « le Comité permanent de l’APN exerce les fonctions et pouvoirs suivants : interpréter la Constitution et veiller à son application », on peut constater la place importante de ce Comité permanent dans le système du contrôle de constitutionnalité. De plus, selon l’alinéa 7 de ce même article, le Comité permanent de l’APN peut « […] annuler les règlements administratifs, les décisions et les ordonnances du Conseil des affaires d’État qui seraient contraires à la Constitution et aux lois » ; l’alinéa 8 ajoute qu’il peut « annuler les règlements et les décisions de caractère local émanant des organes du pouvoir des provinces, des régions autonomes, et des municipalités relevant directement de l’autorité centrale qui seraient contraires à la Constitution et aux lois ». On peut constater que les deux sources les plus nombreuses du droit chinois, à savoir les actes émis par le CAE et les règlements locaux, sont soumises au contrôle du Comité permanent de l’APN. Par ailleurs, selon l’alinéa 2 de l’article 86 de la loi sur la législation : « en cas de désaccord entre les règlements locaux et les arrêtés ministériels, c’est au CAE de décider lequel va être appliqué dans un premier temps, si le CAE pense qu’il faut appliquer l’arrêté ministériel, il doit se soumettre au Comité permanent de l’APN ». Par conséquent, les arrêtés ministériels figurent à ce titre dans le champ de contrôle du Comité permanent de l’APN. Ainsi, on peut affirmer que ce dernier a plus de compétences que les autres organes de contrôle.
b) Les compétences de contrôle des Assemblées populaires locales et de leur Comité permanent
16 Le partage des compétences de contrôle entre les Assemblées populaires locales et leur Comité permanent est similaire à celui entre l’APN et son Comité permanent. Les Assemblées locales peuvent contrôler les règlements de leur Comité permanent et ce dernier a pour fonction de contrôler les actes normatifs du gouvernement local. Le fondement constitutionnel de la compétence de contrôle des Assemblées populaires locales et de leur Comité permanent se trouve dans l’article 99 de la Constitution : « Les Assemblées populaires locales assurent l’observation et l’application de la Constitution […] ». De plus, selon l’article 104 de la Constitution, « Les comités permanents des Assemblées populaires locales à l’échelon du district et au-dessus annulent les décisions et les ordonnances mal fondées émanant des gouvernements populaires à l’échelon correspondant ; ils annulent les décisions mal fondées émanant des Assemblées populaires de l’échelon immédiatement inférieur […] ».
c) Le contrôle d’office du CAE et des gouvernements locaux
17 Les organes exécutifs peuvent contrôler d’office leurs propres actes et effectuer un contrôle d’une manière hiérarchique. Il est difficile de définir ce contrôle comme un contrôle de constitutionnalité dans un sens général. Cependant, un contrôle de constitutionnalité est souvent amalgamé avec un contrôle de légalité par les organes exécutifs, notamment le CAE. À l’exception des règlements administratifs faits par le CAE, les autres actes normatifs ayant un caractère administratif peuvent être contrôlés par le CAE et les gouvernements locaux de différents niveaux.
18 Les compétences de contrôle du CAE portent sur les arrêtés des gouvernements locaux et les arrêtés ministériels. Selon les alinéas 13 et 14 de l’article 89 de la Constitution, le CAE peut « modifier ou annuler les ordonnances, les instructions et les règlements inappropriés émanant des ministères et des commissions ; modifier ou annuler les décisions et les ordonnances inappropriées émanant des organismes administratifs locaux aux différents échelons ». L’alinéa 4 de l’article 88 de la loi sur la législation [17] a réaffirmé cette compétence du CAE en précisant que les décisions du gouvernement local et les arrêtés ministériels peuvent être modifiés ou annulés par le CAE. Si le mot « inapproprié » dans la Constitution signifie bien inconstitutionnalité et illégalité, l’alinéa 2 de l’article 10 du règlement sur l’enregistrement des règlements [18] publié en 2002 a induit une avancée importante dans le contrôle de constitutionnalité. Il a confirmé que le CAE peut contrôler la conformité des normes inférieures aux normes supérieures. Ainsi, la Constitution étant la norme supérieure, la conformité à celle-ci des autres normes, surtout des normes administratives, doit être contrôlée par le CAE.
19 Quant au pouvoir de contrôle des gouvernements locaux, l’article 108 de la Constitution dispose que « les gouvernements populaires locaux à l’échelon du district et au-dessus dirigent l’activité des organes qui leur sont subordonnés et des gouvernements populaires des échelons inférieurs ; ils peuvent amender ou annuler les décisions mal fondées des organismes qui leur sont subordonnés et des gouvernements populaires des échelons inférieurs ». De nouveau, si l’on considère que le mot « mal fondé » comprend la signification d’« inconstitutionnalité » et d’« illégalité », les gouvernements locaux peuvent aussi exercer un contrôle à certaines occasions. L’article 59 de la loi organique sur les Assemblées populaires locales et les gouvernements populaires locaux a repris l’article 108 de la Constitution en affirmant le pouvoir d’annulation des gouvernements populaires locaux s’ils estiment inconstitutionnels les actes du gouvernement inférieur.
20 Par ailleurs, le règlement sur l’enregistrement des règlements élaboré par le CAE en 2001 prévoit que le Bureau des affaires législatives du CAE procède à un contrôle d’office [19]. Ce bureau est chargé de procéder à l’inscription sur un registre de tous les règlements locaux et des arrêtés des gouvernements locaux. Il doit vérifier si ces règlements outrepassent leur champ de compétence et si leurs dispositions sont contraires aux normes supérieures ainsi que l’opportunité du contenu et la régularité de la procédure d’élaboration de ces textes. Après l’appréciation de la constitutionnalité ou de la légalité des règlements, s’il constate une incompétence ou l’inconstitutionnalité ou l’illégalité d’un texte, ce bureau peut déposer un rapport au CAE ou donner un avis aux autorités concernées afin qu’elles en modifient les dispositions.
d) Le choix d’application des normes par les tribunaux
21 Dans un système qui ne connaît pas la séparation des pouvoirs, le contrôle de constitutionnalité par les tribunaux a longtemps été considéré contraire au système politique dans l’idéologie socialiste, et contraire à deux interprétations judiciaires dans la pratique [20]. Les deux interprétations émises par la Cour suprême populaire qui ont longtemps été prises comme fondement pour interdire un contrôle juridictionnel de la constitutionnalité sont la réponse judiciaire de 1955 et la réponse judiciaire de 1986. La première réponse, celle de 1955, a dit que les dispositions constitutionnelles ne conviennent pas pour être les fondements d’une condamnation. Celle de 1986 a indiqué que plusieurs normes peuvent être invoquées dans une décision judiciaire y compris la loi, les règlements administratifs, mais elle n’a pas mentionné la Constitution. Ainsi, les tribunaux ne peuvent pas, en principe, exercer un contrôle de constitutionnalité puisqu’ils ne peuvent invoquer la Constitution. Néanmoins, pour les organes judiciaires, bien qu’il n’existe pas de fondement explicite à leur compétence pour le contrôle de constitutionnalité, on observe que lorsqu’ils rencontrent des cas de conflits entre différentes normes, ils écartent l’application des normes inférieures et ils font référence à la Constitution. Dans ce sens-là, un contrôle de constitutionnalité nous semble exister d’une façon implicite. On peut donner des exemples dans la pratique attestant l’existence d’un contrôle implicite par les organes judiciaires. Ainsi, nous étudierons le rôle de la Cour suprême populaire puis celui des juges ordinaires dans le contrôle de constitutionnalité.
Le rôle de la Cour suprême populaire
22 Lorsque la Cour suprême populaire élabore ses interprétations judiciaires, elle a tendance à faire référence aux dispositions constitutionnelles. Par exemple, dans sa réponse à la demande de la Cour supérieure de Tianjin [21], la Cour suprême a dit que « la clause de l’immunité absolue de la responsabilité de l’employeur dans le contrat de travail est inopérante selon la Constitution lorsque l’employée a eu un accident du travail ». On peut dire que la non-conformité à la Constitution – en l’espèce la violation du droit au travail - constitue un des fondements du jugement. Ainsi, l’inconstitutionnalité a été appréciée de fait par la juridiction.
Le rôle des tribunaux ordinaires
23 Pour les tribunaux ordinaires, nous pouvons trouver aussi quelques exemples de contrôle de constitutionnalité exercé dans les faits. En principe, les règlements administratifs ne peuvent pas être contestés selon l’article 12 de la loi du contentieux administratif. Mais selon l’article 53 de cette même loi, il nous semble que les juges ont un certain pouvoir de contrôle de fait lorsqu’ils choisissent la loi à appliquer à un cas individuel. Dans la pratique, le juge doit toujours faire prévaloir la règle supérieure sur la règle inférieure, et donc, le cas échéant, la Constitution sur la loi : s’il y a contradiction entre ces deux normes, il lui appartient de constater cette contradiction, et de refuser en conséquence l’application de la norme inférieure.
24 Un exemple mérite d’être souligné ici. La Cour intermédiaire de Shanghai a essayé de faire un contrôle de constitutionnalité dans une affaire pénale s’agissant d’une incrimination de diffamation qui met en conflit deux valeurs constitutionnelles [22]. En effet, selon la motivation du jugement, il s’agit d’un test de « proportionnalité » entre la liberté d’expression des journalistes et le droit à la dignité individuelle, en considérant que « la liberté d’expression doit être protégée selon la Constitution, mais sous réserve de respecter les libertés d’autrui » [23]. Plus précisément, le juge a évoqué trois dispositions constitutionnelles pour justifier les limites à la liberté d’expression des journalistes dans le cas concret, à savoir les articles 37, 38 et 51 de la Constitution. Ainsi, le contrôle de constitutionnalité exercé par les juges ordinaires n’est pas une mission impossible aussi bien selon la doctrine que dans la pratique.
2 – Les causes de cet éparpillement
25 Cet éparpillement ayant paralysé le système de contrôle, il convient d’en analyser les causes et d’essayer ensuite de trouver des solutions. Parmi les causes majeures de l’éparpillement, la difficulté de fait d’exercer cette fonction pour l’organe principal de contrôle nous semble évidente. En effet, pour le Comité permanent de l’APN, qui est désigné constitutionnellement comme l’organe principal pour exercer un contrôle de constitutionnalité, il existe des obstacles s’opposant à ce qu’il soit saisi de demandes en ce sens. Afin de réaliser un contrôle effectif, il conviendrait de résoudre au moins les obstacles organiques (a) et de bien concilier le statut du Comité permanent de l’APN avec les autres organes afin de résoudre les difficultés institutionnelles (b).
a) La difficulté majeure du Comité permanent de l’APN comme organe principal de contrôle de constitutionnalité
26 Les difficultés de l’organe principal de contrôle sont diverses [24] : difficulté d’organisation de son ordre du jour, manque de compétence de ses membres, etc. Parmi elles, il nous semble que la contradiction entre des sessions courtes et des missions très chargées est la difficulté majeure. Désigné comme l’organe qui fonctionne entre les différentes sessions de l’APN, le Comité permanent de l’APN se voit reconnaître un très large éventail de pouvoirs. L’article 67 de la Constitution dresse une longue liste des prérogatives que le Comité permanent peut exercer, dont la compétence de contrôle de constitutionnalité. Cependant, le Comité permanent n’organise en principe qu’une session tous les deux mois et l’ordre du jour de chaque session est chargé, comprenant par exemple la discussion et l’adoption des projets de loi. Ainsi, cette fréquence de réunion et l’ordre du jour chargé constituent des obstacles qui conditionnent directement les pouvoirs effectifs du Comité permanent de l’APN. Il nous paraît difficile et presque impossible que cet organe exerce le contrôle de constitutionnalité avec ce type de fonctionnement.
b) Les difficultés institutionnelles du Comité permanent de l’APN comme organe principal de contrôle
27 Un contrôle effectif nécessite aussi que la décision prise s’impose aux pouvoirs publics. Cependant, les décisions prises par le Comité permanent dans le domaine du contrôle de constitutionnalité sont soumises au contrôle de l’APN en raison de la place supérieure de cette dernière. Ainsi, les obstacles de ce point de vue sont de deux sortes : l’immunité des actes juridiques adoptés par l’APN d’une part, et la relativité des décisions prises par le Comité permanent qui ne peut pas imposer des sanctions effectives d’autre part.
Premièrement, l’immunité des actes juridiques adoptés par l’APN
28 Bien que la Constitution prévoit elle-même des procédures de transfert des compétences de l’APN vers le Comité permanent, il faut rappeler que la supériorité de l’APN conditionne toujours le pouvoir de ce dernier. Selon l’alinéa 2 l’article 88 de la loi sur la législation, le Comité permanent peut contrôler les actes normatifs du CAE, ceux des Assemblées locales et des gouvernements locaux avec une seule exception : les lois fondamentales adoptées par l’APN. L’immunité des actes juridiques adoptés par l’APN est un grand danger pour la construction de l’État de droit. La place inférieure du Comité permanent vis-à-vis de l’APN peut expliquer cette solution, comme l’indique une jeune chercheuse [25]. Si l’on considère cependant l’incompétence de l’APN pour s’auto-contrôler, l’immunité de ces lois fondamentales nous semble un déficit de l’ordre juridique en Chine. L’éventualité d’une contradiction entre les lois fondamentales et la Constitution ne peut être exclue. Les leçons du nazisme en Allemagne et celles de la Révolution Culturelle en Chine nous enseignent que les lois peuvent être très mal faites et être contraires à la « volonté générale ».
29 D’ailleurs, la loi sur la procédure pénale révisée en mars 2012 a encore justifié la nécessité de contrôler les lois de l’APN. L’opinion publique et la doctrine sont très divisées sur cette révision. Dans la doctrine, certains juristes ont un point de vue optimiste quant aux apports de la révision à la protection des droits de l’Homme [26]. Toutefois, la majorité des juristes et le courant principal de l’opinion publique sont contre cette révision. Par exemple, les nouveaux articles 37 et 83 qui permettraient à la police de placer en détention secrète (dans des établissements officiels) des personnes soupçonnées d’infractions en rapport avec la « sécurité nationale », le « terrorisme » et la « corruption massive » pour une période pouvant atteindre 37 jours ont fait l’objet de contestations. Certains juristes pensent que les mots ambigus dans les dispositions de cette loi, comme ceux de « sécurité nationale », « terrorisme » ou « détention secrète » pourraient servir aux autorités publiques de prétexte pour abuser de leurs pouvoirs et violer les droits fondamentaux des citoyens. Néanmoins, toutes ces contestations sont vaines à cause de l’absence de contrôle de la loi relative à la procédure pénale. Ce vide juridique tenant à l’immunité des actes normatifs de l’APN doit être comblé le plus tôt possible.
Deuxièmement, la relativité des décisions du Comité permanent
30 Selon l’alinéa 11 de l’article 62 de la Constitution, l’APN peut toujours contrôler les décisions de son Comité permanent et elle peut les modifier ou les annuler si elles sont inopportunes. Cette disposition peut créer plusieurs hypothèses quant à la suite d’une décision de contrôle. Première hypothèse, si le Comité permanent a fait une déclaration de conformité à la Constitution de l’acte contesté, cet acte peut être mis en œuvre. Mais si après un an - compte tenu de la fréquence de la session de l’APN - cette dernière considère que ladite décision du Comité permanent est inopportune et l’annule, la sécurité juridique nous semble être mise en cause. Deuxième hypothèse, le Comité permanent a fait une déclaration de non-conformité à la Constitution de l’acte contesté, mais les auteurs de ce dernier demandent à l’APN de modifier ou annuler cette décision ; or, comment envisager d’attendre encore un an ou un délai non-fixé si cet acte porte des atteintes graves aux droits fondamentaux ? Ainsi, le pouvoir de contrôle du Comité permanent ne peut pas s’exercer de manière décisive et les effets juridiques de ses décisions ne peuvent donc pas être garantis. Il faut constater que la relativité des décisions du Comité permanent est au détriment de l’autorité du contrôle qu’il exerce. En effet, la décision du Comité permanent, quel que soit son domaine d’application, n’est définitive qu’après avoir été ratifiée par l’APN.
B – LA COMPLEXITÉ ET L’IMPRÉVISIBILITÉ DE LA PROCÉDURE
31 En vertu des fondements textuels [27], le Comité permanent peut exercer son contrôle tant a priori [28] qu’a posteriori [29]. En vertu de l’article 90 de la loi sur la législation, la saisine du Comité permanent de l’APN peut être exercée sur « demande » des cinq organes publics, ainsi que sur « proposition » de tous les citoyens et par l’organisation sociale. D’ailleurs, l’entrée en vigueur de cette législation a permis la première demande sur le contrôle de constitutionnalité en Chine émanant des particuliers [30]. Les règlements sur la procédure de contrôle de constitutionnalité qui sont publiés après la loi sur la législation sont basés normalement sur les articles 90 et 91 de celle-ci et apportent des ajouts [31]. Il faut constater que le contrôle relevé d’office a été consacré par l’article 8 du règlement d’enregistrement publié en 2005 [32]. Ainsi, la procédure devient plus complexe qu’avant, tant a priori qu’a posteriori, tant sur contrôle d’office que par requête.
32 Néanmoins, si l’on analyse cette procédure de plus près, tous les maillons de cette procédure de contrôle apparaissaient peu compréhensibles et trop compliqués. Même la doctrine chinoise n’arrive pas à la systématiser. C’est pourquoi le Professeur Lin Laifan a employé la métaphore du « talon d’Achille » pour définir ces lacunes [33]. Ainsi, il convient d’aborder les quatre étapes essentielles de la procédure pour mieux faire apparaître sa complexité.
1 – L’instruction par la commission permanente
33 Dans la phase d’instruction, la fonction de la commission permanente est de conduire l’instruction et de préparer un projet de décision assorti d’un rapport, qui sera ensuite soumis au contrôle de la commission des lois. Concrètement, on peut diviser cette phase en deux étapes. Premièrement, la commission permanente doit formuler un rapport sous 3 mois après réception d’une demande ou d’une proposition [34]. Ce délai peut être prolongé par le Secrétaire général. En vertu de l’article 9 du règlement d’enregistrement, elle peut faire procéder à l’audition des organes d’élaboration en demandant plus d’informations sur les règlements contestés. Ces réunions ne font appel à aucun formalisme particulier. Dans cette fonction, qu’elle exerce avec une certaine latitude, elle peut exiger de l’organe auteur de l’acte déféré de fournir une documentation la plus complète possible mais aussi organiser des réunions de travail afin d’entendre ses explications. D’ailleurs, elle peut prendre aussi tous les contacts qu’elle souhaite, de façon informelle, convoquer des experts juridiques et des fonctionnaires afin d’éclairer sa réflexion. Deuxièmement, ce rapport va être déposé au Secrétaire général et ce dernier va le transmettre pour contrôle à la commission des lois [35].
34 Néanmoins, nous ne comprenons pas à quoi sert ce rôle du Secrétaire général. Il n’exerce aucune vérification selon le droit positif et cette désignation ne fait que rendre la procédure plus complexe. En effet, le rôle du Secrétaire général dans cette procédure d’examen de la constitutionnalité apparaît sans fondement juridique. Il convient de constater que dans la loi sur la législation de 2000, les dispositions sur la procédure ne comportent pas ce rôle intermédiaire du Secrétaire général. C’est une nouveauté apportée par le règlement d’enregistrement du 16 décembre 2005 qui met l’accent sur ce rôle [36]. On se demande donc si ce règlement est susceptible d’être inconstitutionnel ou illégal en créant plus de compétences de contrôle et en conférant au Secrétaire général un pouvoir de contrôle sans fondement juridique et qui n’est soumis à aucun critère objectif de contrôle. Son rôle doit être clarifié dans la prochaine réforme.
2 – Le contrôle du rapport par la commission des lois
35 La commission des lois est compétente pour contrôler le rapport de la commission permanente et il existe trois hypothèses quant au résultat de ce contrôle en vertu de l’article 11 du règlement d’enregistrement : soit elle est d’accord avec l’avis ressortant de l’instruction sur la constitutionnalité de l’acte (a), soit elle constate l’inconstitutionnalité peu importe l’avis ressortant de l’instruction (b), soit elle décide de l’organisation d’une réunion de travail en cas de difficulté (c).
a) Décision de conformité à la Constitution en accord avec le rapport d’instruction
36 En vertu de l’article 11 du règlement d’enregistrement, si la commission des lois constate qu’il n’existe aucune contradiction entre le texte contesté et la Constitution ou les lois, elle doit déposer cet avis au Secrétaire général et le Secrétaire général a le pouvoir d’approbation sur cet avis de constitutionnalité. Ainsi, le Secrétaire général constitue en effet un dernier vérificateur avant la formation de la décision finale. Lorsque le Secrétaire général l’approuve, il va retransmettre cet acte déféré à la direction générale du Comité permanent pour un nouvel enregistrement. Dans le cas contraire, s’il ne l’approuve pas, le droit positif et la pratique restent tous muets sur la démarche à adopter pour la suite.
b) Décision d’inconstitutionnalité
37 Lorsque la commission des lois partage l’avis du rapport sur l’inconstitutionnalité de l’acte, il faut déposer cet avis d’inconstitutionnalité au Secrétaire général et envoyer l’avis d’inconstitutionnalité et des propositions de modifications aux organes auteurs de l’acte, avec l’accord du Secrétaire général. Lorsque ce dernier est d’accord avec cette constatation, les commissions permanentes peuvent formuler un avis de modification s’adressant aux organes auteurs et ces derniers peuvent modifier les règlements ou les abroger. Si ces derniers engagent des modifications en conformité avec les propositions des organes de contrôle, alors la procédure de contrôle se termine après l’enregistrement des modifications.
38 Il convient de constater que le droit positif ne donne pas un droit de contestation à l’organe d’instruction ni un droit de défense aux organes auteurs. Nous pensons que ces vides juridiques ne sont pas conformes aux exigences d’un État de droit compte tenu du principe du contradictoire et du principe de l’égalité des armes dans un procès équitable. C’est pourquoi nous aborderons plus tard cette limite.
c) Réunion de travail avec la commission permanente
39 En vertu de l’alinéa 2 de l’article 11 du règlement d’enregistrement, la commission des lois et les autres commissions permanentes peuvent le cas échéant se réunir en séance jointe. La commission des lois de l’APN peut convoquer une réunion conjointe en vue de l’examen de cette question avec les organes auteurs de l’acte, dont principalement le CAE qui devra se présenter afin de donner son explication.
40 Nous pensons que cette hypothèse relative à la procédure de contrôle devant la commission des lois susciterait des incertitudes pour la définition des rapports entre la commission des lois et la commission permanente. Comment se passerait la procédure de contrôle au cours de la réunion conjointe ? Laquelle aurait le pouvoir de décision en cas de désaccord ? Le droit positif actuel manifeste encore des vides juridiques qui empêchent l’objectivation de la procédure.
3 – L’exécution : l’ambiguïté de l’autorité des décisions
41 Une fois qu’il a délibéré, le Comité permanent de l’APN peut adresser une « instruction de modification » à l’organe auteur de l’acte pour en éliminer les inconstitutionnalités. Cette instruction est considérée comme une sorte de décision par la doctrine. Comme l’indique le Professeur Hu Jinguang, la décision de contrôle dans le dispositif n’a qu’un seul type : l’instruction à modification [37]. Cependant, l’autorité de cette décision reste ambiguë et cela se traduit par deux aspects.
42 Premièrement, en cas de non-exécution de cette décision, la commission permanente ne peut pas retirer ni annuler cet acte parce que sa décision n’est pas revêtue d’une valeur contraignante. Par exemple, en cas de refus de modifier son règlement inconstitutionnel par le CAE, c’est la Conférence des Présidents qui se trouvera seule habilitée à décider de recourir au Comité permanent en vue de l’annulation du règlement litigieux. Ainsi, la force exécutoire de la décision est assez faible du fait qu’elle dépend de l’attitude des autres organes qui n’ont pas exercé la fonction de contrôle. Par ailleurs, la Conférence des Présidents a donc le droit de statuer préalablement sur l’opportunité d’annuler un règlement inconstitutionnel, avant que le Comité permanent puisse se prononcer, ce qui constitue en effet un empiètement sur le pouvoir décisionnel du Comité permanent.
43 Deuxièmement, en cas d’exécution formelle de cette décision, les organes auteurs concernés doivent faire un rapport dans un délai de 2 mois sur l’abrogation ou la modification de l’acte contesté. Dans ce cas, nous ne pouvons pas non plus garantir l’exécution effective de la décision par l’organe de contrôle. C’est-à-dire que l’organe auteur de l’acte contesté peut formuler des modifications qui sont toujours inconstitutionnelles et dans ce cas, il n’est pas possible de faire un recours selon le droit positif actuel.
4 – La notification éventuelle et la diffusion régulière du bilan d’enregistrement
44 En vertu de l’article 14 du règlement d’enregistrement, lorsque la procédure se termine, la direction générale du Comité permanent de l’APN peut en aviser les organes, les groupes sociaux et les citoyens qui sont les saisissants, selon leurs besoins. Cependant, il n’existe pas de définition de la notion de « besoin ». Comme le relève le Professeur Lin Laifan [38], nous pouvons en déduire deux hypothèses : soit la notification est obligatoire lorsque les saisissants la demandent ; soit elle ne l’est pas bien que les demandes des saisissants soient fortes. Cette incertitude laisse trop de marge de manœuvre à l’organe de contrôle, à tel point qu’il lui serait facile d’en abuser. En réalité, il existe peu de chance pour les saisissants de recevoir une notification officielle s’agissant de la saisine ou non sur la contestation [39]. La procédure d’enregistrement concernant l’obligation de notification reste ambiguë.
45 Concernant la publication des décisions, nous constatons des attitudes variées de la part du Comité permanent de l’APN en vertu de l’article 15 du règlement d’enregistrement [40]. Si l’acte déféré est conforme à la Constitution, il sera enregistré dans un bulletin rédigé et la publication est alors assurée. Cependant, aucun organe n’est tenu de publier les décisions de non-conformité à la Constitution.
II – LES RÉFORMES POSSIBLES
46 Les limites avérées du modèle actuel de contrôle parlementaire ont suscité beaucoup de discussions sur la meilleure forme de garantie de la Constitution. Pour parvenir à un contrôle efficace, la majorité des constitutionnalistes est parvenue à un consensus sur la nécessité de créer un organe spécial de contrôle. Dans cette perspective, il convient de revenir sur la question suivante : « qui doit être le gardien de la Constitution ? » L’étude de la doctrine nous éclairera pour y répondre. En effet, il existe différents points de vue sur la nature de cet organe : juridictionnel, politique ou quasi judiciaire. Certains pensent qu’on doit garder le modèle parlementaire tout en créant un organe spécial sous la direction de l’APN [41] ; d’autres pensent que la Cour populaire suprême peut et doit exercer ce contrôle, comme dans le modèle américain [42] ; d’autres encore pensent que la justice constitutionnelle européenne nous convient [43] ; d’autres enfin pensent que l’on peut parvenir à notre but en deux étapes, celle d’une commission parlementaire d’abord et celle d’une Cour constitutionnelle ensuite [44]. Par ailleurs, un autre consensus s’est établi parmi la doctrine : quel que soit l’organe gardien de la Constitution, l’amélioration de la procédure de contrôle est nécessaire.
47 Dans le prolongement de ces débats, nous discuterons d’abord du meilleur organe de contrôle de constitutionnalité, nous paraissant le plus adapté à la situation chinoise (A). Ensuite, nous envisagerons l’adoption de règles de procédure spécifiques régissant son fonctionnement (B).
A – L’ORGANE DE CONTRÔLE : DEUX HYPOTHÈSES
48 Pour la Chine, comme l’écrit Kelsen, la meilleure forme ne peut être trouvée qu’en tenant compte de la spécificité de la Constitution et du système de distribution du pouvoir politique prévu par la Constitution [45]. Ainsi, en raison de la réalité du système politique, il existe toujours des tenants de l’impossibilité d’un contrôle judiciaire et par conséquent, l’hypothèse de maintenir le contrôle politique en désignant une commission constitutionnelle mérite d’être mentionnée (1). Toutefois, les exigences constitutionnelles de la construction de l’État de droit et la réalisation de la démocratie en Chine imposent que les actes du Parlement ou du Gouvernement présentent la plus grande conformité possible au droit [46] ; c’est pourquoi le contrôle judiciaire nous semble plus légitime que le contrôle politique et il existe alors une seconde hypothèse qui est de réaliser un contrôle judiciaire soit par la Cour suprême, soit par une Cour constitutionnelle (2).
1 – La création d’une commission parlementaire constitutionnelle
a) La raison d’être d’une commission parlementaire constitutionnelle
49 Afin de justifier la légitimité d’une commission constitutionnelle, l’accent est mis sur sa cohérence avec le système politique, l’existence d’un possible fondement à cette commission dans le droit positif actuel.
50 La Chine, héritière fidèle de l’esprit marxiste-léniniste, repose sur l’idée que la souveraineté est indivisible et qu’elle appartient au peuple qui l’exerce généralement par les Assemblées populaires dont, au plus haut niveau, l’APN qui contrôle toutes les fonctions étatiques (législatives mais aussi exécutives et judiciaires). Une telle conception du droit constitutionnel socialiste paraît donc incompatible avec l’existence d’un contrôle juridictionnel de constitutionnalité des lois. Autrement dit, il est hors de question pour le droit constitutionnel chinois d’envisager un contrôle en dehors de l’APN. Le refus d’un contrôle extérieur n’empêche pas néanmoins un contrôle par un organe plus spécial au sein de l’APN. En effet, dans les travaux préparatoires de la Constitution de 1982, le comité de rédaction a eu plusieurs propositions sur l’institution d’un organe de contrôle de constitutionnalité : l’établissement d’une commission indépendante constitutionnelle sous la direction de l’APN en parallèle avec le Comité permanent [47]. Même si ces propositions ont connu l’échec, on ne peut pas ignorer cette tentative.
51 Au plan du droit positif, la possibilité d’instituer une commission constitutionnelle peut être également justifiée. Selon l’article 70 de la Constitution, l’APN crée des commissions spéciales dont une Commission des nationalités ; une Commission de l’éducation, de la science, de la culture et de l’hygiène ; une Commission des affaires étrangères ; une Commission des chinois d’outre-mer ; et il est ajouté « et les autres commissions qu’elle jugera utiles ». Selon certains juristes, cet article a donné la possibilité d’établir une commission constitutionnelle lorsque l’APN la jugera utile [48]. Force est de constater qu’il existe plusieurs commissions qui ont été établies sur la base de cette disposition, à savoir la Commission des affaires intérieures et de la justice au cours de la première session de la 7e conférence de l’APN en 1988 ; la Commission de la protection de l’environnement pendant la première session de la 8e APN en 1993 ; et enfin la Commission de l’agriculture et des affaires rurales au cours de la première session de la 9e APN en 1998.
b) Les propositions relatives au statut et la compétence d’une commission parlementaire constitutionnelle
52 Sur le statut de cette commission constitutionnelle, nous observons deux points de vue un peu différents au sein de la doctrine : les auteurs plaident soit pour une des commissions spéciales sous la direction de l’APN, qui serait également sous la direction du Comité permanent de l’APN hors session de l’APN, soit pour une commission permanente en parallèle avec le Comité permanent de l’APN [49]. Il nous semble que le second point de vue est plus raisonnable. Il nous paraît utile de proposer deux arguments pour essayer de mieux justifier cette solution quant au statut de la future commission constitutionnelle. Le premier argument réside dans la concrétisation du statut constitutionnel de l’APN. Comme la thèse du « double sujet » proposée par Lin Laifan, selon les articles 57 et 58, l’APN devrait être considérée comme deux sujets : l’organe législatif suprême et l’organe suprême du pouvoir [50]. Pour concrétiser son statut d’organe législatif suprême, son Comité permanent a bien servi en créant chaque année de nouvelles lois et en amendant d’autres. De toute façon, pour concrétiser son statut en tant qu’organe suprême du pouvoir, on ne voit pas un organe spécial. Ainsi, une commission future qui vise à garantir la conformité à la Constitution des actes normatifs de tous les organes et dispose du pouvoir de les sanctionner le cas échéant, selon Lin Laifan et son groupe de travail, est une parfaite concrétisation de la Constitution [51]. Nous partageons bien ce point de vue en rappelant l’ancien rôle du Conseil constitutionnel français : celui de régulateur des pouvoirs publics. Autrement dit, en cas de conflit entre les actes inférieurs et les actes supérieurs, qui sont en effet les pouvoirs des organes inférieurs en contradiction avec les pouvoirs des organes supérieurs, la future commission constitutionnelle peut garantir la place suprême de l’APN par l’emploi du contrôle de constitutionnalité des actes inférieurs et, le cas échéant, du pouvoir de les sanctionner. Aussi, il faut constater que l’APN elle-même garde toujours le dernier mot sur la décision de contrôle afin de garder sa place suprême envers la commission constitutionnelle. Ainsi, l’indépendance de la commission constitutionnelle vis-à-vis du Comité permanent de l’APN peut être basée sur la Constitution. Le deuxième argument concerne le champ du contrôle. De ce point de vue, la nécessité d’une commission indépendante du Comité permanent de l’APN peut aussi être justifiée par le champ et la quantité du contrôle. Sur le champ, comme on l’a répété plusieurs fois, les actes normatifs du Comité permanent doivent être soumis au contrôle de constitutionnalité. De ce fait, si la commission future de contrôle n’avait pas un statut indépendant du Comité permanent, on ne pourrait pas espérer un contrôle juste et efficace des actes de ce dernier.
53 Par ailleurs, comme on l’a précédemment exposé, la compétence pour exercer le contrôle de constitutionnalité est actuellement dispersée entre différents organes. Cela est évidemment un obstacle à la réalisation d’un contrôle efficace. Ainsi, comme le propose Ji Weidong, il faut retirer cette compétence aux différents organes et la concentrer dans les mains de la future commission constitutionnelle [52]. Nous partageons la position de Ji Weidong, en soulignant un transfert total des compétences du Comité permanent de l’APN à la future commission constitutionnelle. Ce transfert total serait une étape pionnière pour marquer la séparation du statut de l’organe législatif suprême et de l’organe suprême du pouvoir de l’APN. Avec cette séparation, le Comité permanent n’assurerait plus que la fonction législative. De plus, un nouveau chapitre devrait être inséré dans la loi organique de l’APN pour préciser les compétences de la commission constitutionnelle.
B – L’AMÉLIORATION DE LA PROCÉDURE DE CONTRÔLE
54 Des règles de procédure propres à l’exercice du contrôle de constitutionnalité comme les règles de procédure civile, pénale et administrative sont tout aussi importantes pour réduire la marge de manœuvre du pouvoir d’appréciation de l’organe de contrôle. Compte tenu des limites constatées ci-dessus, nous soulignons à cet égard que les précisions et les réorganisations constituent plutôt des problèmes techniques qui ne sont pas évidemment contraires au système politique pour réaliser un contrôle effectif et juste de la constitutionnalité. Heureusement, il existe tout de même des espaces qui permettent de faire avancer la perfection de la procédure de contrôle. Ainsi, nous verrons comment faciliter la transparence et le caractère contradictoire de la procédure actuelle (1), et proposerons d’introduire une procédure de renvoi de la question préjudicielle de constitutionnalité en Chine pour répondre aux aspirations des citoyens (2).
1 – La facilitation de la transparence et du contradictoire
55 Dans la phase d’examen du fond, pour faciliter le principe de transparence, il nous semble important de préciser les méthodes de travail (a), de modifier le rôle du Secrétaire général (b), de préciser le contenu du contrôle (c) et d’instituer l’interprétation constitutionnelle pour rendre les dispositions constitutionnelles plus claires (d).
a) L’éclaircissement des séances jointes
56 En Chine, les réunions en séance jointe dans la procédure de contrôle de constitutionnalité peuvent être organisées par la commission des lois et les autres commissions permanentes concernées [53]. Cette réunion non publique, sous la direction du conseiller rapporteur, permet ainsi d’évoquer de nombreux éléments de constitutionnalité soulevés par la saisine mais aussi d’autres questions à l’initiative du rapporteur. Le but du contrôle de constitutionnalité n’est pas de gêner la publication des normes par les organes législatifs et administratifs. Cette réunion est parfois l’occasion d’un débat de fond sur la constitutionnalité qui prend parfois la forme d’une véritable « négociation » tendant à réduire les inconstitutionnalités potentielles en recourant le cas échéant aux réserves d’interprétation. En ce sens, aucun formalisme juridique sur cette séance jointe ne fournirait plus d’opportunité de négocier. Compte tenu de la réalité juridique et politique en Chine, notamment de la faible position de l’organe de contrôle, ce dernier a besoin de cette négociation afin de mieux assurer la constitutionnalité des actes normatifs. Ainsi, les organes auteurs de l’acte, dont principalement le CAE, devront se présenter afin de donner leur explication, ceci pour mieux respecter le principe du contradictoire. Nous pensons que le CAE doit répondre à des contestations d’inconstitutionnalité sur ses règlements administratifs, et il nous paraît légitime et nécessaire d’en informer les saisissants et de leur donner la possibilité d’assister aux séances, à eux et aux autres personnes intéressées.
b) La transformation du rôle du Secrétaire général du Comité permanent en un rôle de coordination
57 Le rôle arbitraire du Secrétaire général au niveau de la saisine et dans le déroulement de l’examen a été souligné ci-dessus à plusieurs reprises. On se demande également pourquoi on ne le supprime pas en vue de simplifier la procédure. Cette proposition peut être soutenue par la loi sur la législation parce que cette loi n’a fixé aucune règle sur la fonction de Secrétaire général dans la procédure de contrôle. Il nous faut rappeler que c’est bien le règlement d’enregistrement de 2005 qui l’a ajouté. Néanmoins, quand on regarde le rôle du Secrétaire général du Conseil constitutionnel en France, cette proposition de suppression nous semble un peu hâtive. Nous pensons en effet que son rôle est légitime dans la procédure et pourrait contribuer à son bon déroulement. Il peut assurer un rôle de coordination en tant que vice-Président du Comité permanent de l’APN, il peut avoir plus de facilité à rassembler les observations de tous les intervenants, à exercer une fonction d’intermédiaire entre les différentes commissions concernées en cas de séances jointes. En cas de mauvaise coopération entre les différentes commissions ou entre les organes auteurs et les commissions, le Secrétaire général, en tant que personnalité politique, pourrait aussi faire des efforts à titre personnel, compte tenu de la réalité politique en Chine.
c) La notification et la publication des décisions
58 Pour la Chine, il faut souligner jusqu’à présent l’absence de tout journal officiel unique, la très faible publication des décisions de justice et une accessibilité au droit réduite. C’est pourquoi il faut réfléchir à l’institutionnalisation de la publication des décisions sur le contrôle de constitutionnalité. En vertu de l’article 14 du règlement d’enregistrement révisé en 2005, lorsque la procédure se termine, la direction générale du Comité permanent de l’APN n’a pas l’obligation juridique de notifier la décision prise aux organes, aux groupes sociaux et aux citoyens qui sont les saisissants. En effet, « selon leurs besoins » n’est pas une formule juridique précise et peut donner lieu à des abus de l’organe de contrôle en tant que prétexte à l’inaction. Ainsi, nous proposons de supprimer cette condition injustifiée et d’instituer une obligation de notification à tous les saisissants. Une autre question se pose suite à cette proposition : est-ce que le public peut aussi avoir un droit d’accès aux conclusions ou à la décision de contrôle ? La réponse est sans doute « oui », du fait des exigences de l’État de droit et démocratique.
59 Par ailleurs, en vertu de l’article 15 du règlement d’enregistrement, « un bulletin rédigé par le premier bureau du secrétariat du Comité permanent de l’APN va résumer le bilan d’enregistrement des règlements aux commissions permanentes de l’APN, aux membres du Comité permanent et aux organes d’élaboration ». Avec le développement de la technologie, le téléchargement rapide des règlements sur le site de l’APN n’est plus du tout une difficulté. Autrement dit, en dehors des obstacles politiques, toutes les conditions relatives à la publication sont déjà réunies. Ainsi, nous proposons enfin d’instituer l’obligation juridique pour le Comité permanent de l’APN d’aviser toutes les personnes ou tous les organes concernés sans condition supplémentaire et de publier les conclusions du contrôle et tous les règlements enregistrés sur son site officiel.
d) L’institution d’un effet suspensif pour les conclusions du contrôle
60 Pour la Chine, selon les articles 12 et 13 du règlement d’enregistrement, les conclusions sur la non-conformité de l’acte contrôlé à la Constitution n’ont aucun effet juridique réel dans cette procédure. Dans la suite de la procédure, le non-respect de la conclusion par l’organe auteur de l’acte est un risque ; même si la proposition d’annulation de l’acte contrôlé peut finalement être adoptée par la séance plénière du Comité permanent de l’APN, la perte de temps et la violation grave de la Constitution et des droits fondamentaux des citoyens sont contraires aux exigences d’un État de droit. Ainsi, nous proposons d’introduire un effet suspensif dans notre procédure de contrôle.
61 Cette proposition toute personnelle n’a aucune équivalence dans la doctrine. Elle risquerait donc d’être critiquée pour ne pas s’appuyer sur le droit positif et sur la doctrine. Néanmoins, nous insistons pour effectuer cette proposition en vue de mettre une pression réelle sur les organes auteurs qui misent beaucoup sur leurs intérêts illégitimes dans la pratique. La suspension des actes contestés peut, au moins, stimuler le respect de la Constitution dans l’élaboration des règlements administratifs.
2 – L’introduction hypothétique d’une procédure de renvoi de la question préjudicielle de constitutionnalité
62 Toutes les propositions sur la réglementation de la procédure actuelle en Chine, y compris ce dont on a parlé, peuvent être mieux organisées et restructurées de manière judiciaire avec l’intervention des juridictions ordinaires, via la juridicisation. Le Doyen Louis Favoreu a défini la juridicisation comme étant « le processus de soumission progressive d’un phénomène, d’une institution ou d’une procédure politique au respect de la règle de droit » [54]. À vrai dire, en comparant la nature peu judiciaire de la procédure de contrôle de constitutionnalité, la procédure judiciaire et administrative en Chine a déjà connu des développements importants qui ont énormément contribué à la construction de l’État de droit. Compte tenu du fait qu’il n’est pas certain que les modifications proposées ci-dessus rendraient le contrôle efficace, l’intérêt à faire entrer la question préjudicielle se manifeste surtout par la préparation d’une justice constitutionnelle avec l’intervention des juges ordinaires.
63 Du point de vue du droit comparé, le mécanisme de renvoi à la Cour constitutionnelle présente de nombreuses similitudes dans les démocraties occidentales qui offrent la possibilité de soulever la question préjudicielle d’inconstitutionnalité au cours d’une instance. En France, la protection des droits fondamentaux a connu une évolution majeure grâce au nouveau mécanisme de contrôle de constitutionnalité a posteriori institué par la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008. Le 1er mars 2010, date de l’entrée en vigueur de l’article 61-1 de la Constitution, restera en effet comme la date d’une évolution profonde relativement au contrôle de la conformité des lois à la Constitution [55]. Comme l’a souligné le Professeur Xavier Philippe, le droit positif ainsi mis en place vise d’une part à accroître les garanties offertes aux particuliers dans l’exercice de leurs droits fondamentaux ainsi que d’autre part à assurer une plus grande effectivité du principe de constitutionnalité [56].
64 Supposons maintenant que l’on veuille introduire en Chine une question préjudicielle de constitutionnalité. Quelles seraient les conditions d’introduction de ce nouveau mode de saisine dans le contexte chinois actuel ? Il s’agit d’un exercice de prospective mais la mise en œuvre de cette question pourrait rejoindre des pratiques judiciaires. Ainsi, les conditions à réunir pour introduire la question préjudicielle en Chine nous semblent déjà réunies. On constate que la possibilité du renvoi par les juridictions ordinaires peut se baser sur des institutions existantes (b) et les objections à cette voie de réforme peuvent aussi être résolues (a).
a) Les propositions résolvant les objections de grande importance
65 Nous constatons qu’il existe deux objections majeures à cette réforme du renvoi de la question préjudicielle de constitutionnalité : l’une est une objection de principe l’autre est une objection technique.
La solution possible à l’objection de principe
66 L’objection de principe, selon nous, se situe toujours dans le système politique. Cette réforme sur l’institution du renvoi préjudiciel doit être réalisée par la législation. Rappelons l’attitude de l’Assemblée locale sur le jugement de la juge LI Huijuan lorsqu’elle n’a pas appliqué le règlement local : l’Assemblée locale de Henan était absolument contre un contrôle venant d’un juge. Ainsi, nous devons d’abord pallier l’objection venant de la volonté de l’organe législatif dont l’APN.
67 Face à cette objection de principe, nous pensons que la pression internationale pourrait être une solution. Il faut rappeler les dispositions de l’article 8 de la Déclaration universelle des droits de l’homme qui reconnaît « à toute personne le droit à un recours effectif devant les juridictions nationales compétentes contre des actes violant les droits fondamentaux qui lui sont reconnus par la Constitution ou par la loi ». De même, l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966 consacre le « droit de toute personne à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial ». Il faut souligner que le gouvernement chinois a déjà signé les deux traités internationaux, mais qu’il ne les a pas encore ratifiés. Avec le développement économique et le renforcement du pouvoir dans la sphère politique internationale, la Chine doit avoir de plus en plus de responsabilité internationale. C’est encore une question d’opportunité de réforme volontaire pour la Chine, elle ne peut néanmoins rester indifférente. De plus, selon Liu Hainian, pour approfondir la coopération économique avec la communauté internationale, la Chine doit se soumettre aux règles du jeu communes. [57]
La solution possible à l’objection technique : l’incompétence actuelle des tribunaux ordinaires pour le contrôle des règlements administratifs
68 Une fois réalisée une réforme sur le renvoi de la question préjudicielle, les juges dans les tribunaux joueront un rôle de « filtre » et participeront ainsi à la diffusion de la culture constitutionnelle. La décision éventuelle sur le renvoi des règlements administratifs se confronterait néanmoins à l’incompétence pour le contrôle des règlements administratifs [58]. Dans ce cas, on peut a priori penser que le tribunal n’a pas la compétence de prendre la décision du renvoi. Ainsi, le point le plus sensible dans cette procédure est de fixer la possibilité du renvoi des contestations portant sur des actes normatifs administratifs dans le contentieux administratif.
69 En effet, cette objection pourrait ne pas être un problème si l’on classifie le rôle du juge ordinaire. En effet, les juges du renvoi ne contrôlent pas la constitutionnalité des règlements administratifs. Ils exercent juste un rôle de filtrage et les conditions du renvoi peuvent être purement formelles dans la réforme éventuelle.
b) Les institutions transposables dans l’ordre judiciaire chinois
70 La possibilité de renvoi de la question préjudicielle de constitutionnalité au sein des tribunaux des différents échelons peut être justifiée par la fameuse institution implicite dans la pratique judiciaire dénommée « demande aux instructions supérieures ». D’ailleurs, on pourrait ajouter que l’institution de l’interprétation judiciaire a bien jeté le fondement pour un renvoi entre les juridictions et l’organe de contrôle : le Comité permanent de l’APN.
La fameuse institution implicite dénommée « demande d’instructions supérieures »
71 En Chine, il existe une institution dénommée « demande d’instructions supérieures » qui fonctionne dans la pratique avec l’absence d’une reconnaissance dans les textes juridiques [59]. Selon le Professeur Ji Weidong, cette institution peut se tourner vers l’institution du renvoi à la commission constitutionnelle par la Cour Suprême Populaire. [60] Cette institution signifie que les tribunaux demandent des instructions aux cours supérieures pour traiter des questions de fond ou des questions procédurales [61]. Normalement, il convient de respecter la hiérarchie des tribunaux pour poser les questions. Ainsi, les tribunaux demandent aux cours intermédiaires, et les cours intermédiaires demandent à la Cour Suprême Populaire. Lorsque la question est transmise, la juridiction sursoit à statuer jusqu’à réception de la réponse ou de l’instruction de la cour supérieure.
72 Il faut souligner que si la question vient d’une cour supérieure d’une province, c’est alors à la Cour Suprême Populaire d’y répondre. Dans la pratique [62], lorsqu’elle reçoit les demandes, elle les considère comme des appels normaux des affaires judiciaires alors qu’elle devrait les distribuer aux chambres différentes selon la nature des questions. Et la chambre concernée désigne un juge qui se charge comme rapporteur de formuler une réponse à la cour inférieure dans le délai du jugement au nom de la chambre. Si la chambre concernée pense que cette réponse constitue une question importante, elle va la déposer. [63] Il faut souligner le caractère contentieux de cette procédure qui se manifeste surtout par la superposition des modalités, personnels, délais avec le contentieux judiciaire normal. On peut affirmer ainsi que cette institution peut parfaitement servir pour le renvoi de la question préjudicielle de constitutionnalité.
La procédure de rédaction d’une interprétation judiciaire
73 Selon le règlement de l’interprétation judiciaire de la Cour Suprême Populaire, la procédure de formation d’une interprétation doit se dérouler en cinq étapes : la réception, la rédaction d’un projet, la transmission, la vérification et la publication. [64] Nous pensons également que cette institution et le règlement sur l’interprétation judiciaire ont jeté des bases pour la future procédure de renvoi.
74 Selon nos observations, quelques éléments dans le règlement intérieur nous permettront de faire un parallèle avec la procédure de renvoi en France et de favoriser la possibilité de réaliser une procédure de renvoi.
75 Premièrement, on peut signaler le formalisme du renvoi et la possibilité de celui-ci.
76 En vertu de l’article 9 du règlement de l’interprétation judiciaire de la Cour Suprême Populaire, il faut établir un projet afin de formuler une interprétation judiciaire. Ce projet, en vertu de l’article 14 du même règlement, doit surtout motiver la nécessité de formuler cette interprétation et présenter brièvement les dispositions qui font l’objet de l’interprétation.
77 Sur ce point-là, nous pensons que les exigences du formalisme relatives au projet peuvent être comparables à l’exigence d’un écrit « distinct et motivé » dans la QPC en France. En effet, en vertu de l’alinéa 1er de l’article 23-5 de la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l’application de l’article 61-1 de la Constitution, « Le moyen tiré de ce qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l’occasion d’une instance devant le Conseil d’État ou la Cour de cassation. Le moyen est présenté, sous peine d’irrecevabilité, dans un mémoire distinct et motivé ».
78 Deuxièmement, on peut observer la possibilité d’insérer des conditions précises au niveau du filtrage.
79 La possibilité d’insérer des conditions au niveau du filtrage mérite également d’être soulignée. Comme le nouvel article 61-1 de la Constitution française qui prévoit le renvoi de la demande au Conseil constitutionnel par la Cour de cassation ou le Conseil d’État, un système de filtrage pourrait également être installé en Chine pour éviter l’afflux de demandes. Selon nous, lorsque la Cour Suprême Populaire rencontre une question sur la constitutionnalité d’une disposition législative posée par une juridiction inférieure, on motive de fait « la question nouvelle » ou « le caractère sérieux » par la nécessité de la formulation d’une interprétation judiciaire ayant valeur juridique [65].
Le renvoi possible à l’organe de contrôle : le Comité permanent de l’APN
80 En vertu du règlement de l’interprétation judiciaire de la Cour Suprême Populaire, le dernier projet d’une interprétation judiciaire doit être déposé au contrôle par le bureau de recherche de la Cour Suprême Populaire [66] et l’une des compétences de contrôle de ce dernier est de contrôler la constitutionnalité de cette interprétation [67]. Si la constitutionnalité est confirmée, cette interprétation judiciaire doit être promulguée. Dans le cas contraire, on se demande logiquement comment il serait possible de procéder pour répondre à la question posée par les juridictions inférieures.
81 Théoriquement, une voie mérite d’être rappelée. En vertu de l’article 43 de la loi sur la législation, si la Cour suprême populaire pense que les demandes viennent des cours inférieures s’agissant des affaires importantes, sérieuses ou compliquées, elle peut demander au Comité permanent de l’APN de donner une interprétation législative (). Ainsi, le Professeur Han Dayuan a proposé de confirmer l’effet suspensif de ce renvoi potentiel de la question préjudicielle au Comité permanent de l’APN pour qu’il se base sur cette voie. C’est-à-dire que « dans les litiges, si les tribunaux considèrent que certaines lois ou certains règlements sont susceptibles d’inconstitutionnalité, ils doivent surseoir à statuer et demander au Comité permanent d’en saisir […] » [68]. Selon certains juristes [69], le droit de saisine de la Cour populaire suprême peut être utilisé comme un fondement pour constituer un système de contrôle incident et ainsi nous pensons justifier la possibilité d’introduire en Chine un mécanisme équivalent à la QPC française. Selon nous, cette disposition ouvre une voie à la Cour populaire suprême pour envoyer la question sur la constitutionnalité rencontrée dans le litige. Sur ce point, la place de la Cour de cassation en France dans la procédure de la QPC peut être une source d’inspiration pour la Chine dans l’avenir.
82 Au terme de cette recherche, la nécessité d’un contrôle efficace de constitutionnalité paraît surtout résulter du contexte en cours de construction d’un État de droit et de transformation démocratique en Chine. La réussite affirmée par les médias officiels sur la construction d’un État de droit [70] a peu de crédit face au manque d’indépendance de la justice, aux dénis de justice et aux atteintes au droit au procès équitable. Les restrictions au droit de s’entretenir avec des accusés [71] illustrent par exemple l’écart entre les normes législatives et les pratiques judiciaires. Nous pensons que la cause originale de ce conflit est la différence entre la suprématie de la volonté politique et la volonté générale en Chine, le contrôle de constitutionnalité semblant ainsi nécessaire pour permettre que « la politique (soit) saisie par le droit ».
83 Sur la transformation démocratique, il faut souligner que la démocratie politique ne trouve sa consolidation qu’avec l’intériorisation citoyenne des valeurs et des idées propres à la nouvelle culture, juridique et politique. Comment concilier l’intérêt de l’individu et l’intérêt de la collectivité ? En attendant ce processus d’intériorisation, des signes de recul peuvent apparaître, il faut donc garantir les avancées dans la direction de l’État de droit et de la démocratie. C’est pourquoi nous plaidons pour un mécanisme visant à promouvoir la réforme des structures politiques, parfaire les systèmes concrets pour la réalisation de la démocratie socialiste et assurer au peuple la pleine jouissance de ses droits. Le rôle d’empêchement de retour en arrière joué par le contrôle de constitutionnalité connaît beaucoup d’illustrations. On peut considérer également que la mise en place d’un véritable contrôle de constitutionnalité peut aussi servir à prémunir contre le retour à des régimes dictatoriaux. Certes, selon ce que l’on a constaté, les conditions défavorables sont plus nombreuses que les conditions favorables à un contrôle efficace de constitutionnalité. Néanmoins, nous partageons la conclusion de la thèse de J.-P. Massias à propos des pays ex-communistes connaissant un contexte similaire à celui de la Chine : « Puisant sa raison d’être dans les obstacles à son développement, l’avenir du contrôle de constitutionnalité en Europe de l’Est révèle la portée de ce paradoxe : plus les conditions de sa mise en place apparaissent défavorables, plus son existence s’affirme comme nécessaire ». [72]
Notes
-
[1]
Le système des assemblées populaires est la forme organisationnelle du pouvoir de dictature démocratique du peuple chinois et le système politique fondamental de Chine. L’APN est l’organe suprême du pouvoir d’Etat et les assemblées populaires locales sont les organes locaux du pouvoir d’Etat. L’APN est composée de députés élus par les provinces, les régions autonomes, les municipalités relevant de l’autorité centrale ainsi que par les forces armées. L’APN exerce des fonctions importantes dont deux sont liées directement au contrôle de constitutionnalité : veiller à l’application de la Constitution et modifier ou annuler les décisions inopportunes prises par le Comité permanent de l’APN.
-
[2]
Le Comité permanent de l’APN, son organe permanent, exerce le pouvoir suprême d’Etat dans l’intervalle des sessions de l’APN et lui rend compte de son travail. Le Comité permanent de l’APN est composé du président, des vice-présidents, du secrétaire général et des membres. Le Comité permanent de l’APN exerce des fonctions importantes dont trois sont liées directement au contrôle de constitutionnalité : interpréter la Constitution et veiller à son application ; annuler les règlements administratifs, les décisions et les ordonnances émanant du Conseil des affaires d’Etat qui seraient contraires à la Constitution et aux lois ; annuler les règlements et les décisions de caractère local émanant des organes du pouvoir des provinces, des régions autonomes et des municipalités relevant de l’autorité centrale qui seraient contraires à la Constitution, aux lois et aux règlements administratifs.
-
[3]
Voir l’article 10 du règlement d’enregistrement de 2005.
-
[4]
V. L. Laifan, « Entretien sur la création de la division de l’examen et du registre des règlements », Journal de la Jeunesse , le 25 juin 2004.
-
[5]
V. L. Laifan, « Contrôle de constitutionnalité en Chine : ses caractères et sa formation. Vue de trois terminologies », Revue de la Science Sociale de la Province de Zhejiang , n° 5, 2010, pp. 33-35.
-
[6]
En mars 2003, M. Sun Zhigang, jeune diplômé de 27 ans d’une université de la province du Hubei, s’est rendu à Guangzhou dans le but d’y chercher un travail. Au cours de son séjour, il a été interpellé par la police pour un contrôle d’identité. Ne possédant aucune pièce d’identité, il a été considéré comme une personne sans domicile fixe et sans ressources et placé en centre de rétention, où il est décédé le 20 mars 2003 à la suite de tortures. Révélée dans la presse, cette affaire a suscité des réactions d’indignation qui ont conduit à l’abolition de la rétention préalable au renvoi. Le règlement du 12 mai 1982 relatif à la rétention pour renvoi des vagabonds et des mendiants en ville a ainsi été remplacé le 1er août 2003 par des mesures destinées à aider les personnes en situation irrégulière.
-
[7]
Pour quelques exemples de contributions : M. Jihong , Les éléments du jugement constitutionnel , Éditions de l’Université de sécurité publique , 1998 ; L. Zhong , La surveillance constitutionnelle Éditions de la Contribution sur la Science Sociale , 2002 ; H. Xiaohua , Le contentieux constitutionnel , Éditions Juridiques , 2002 ; W. Zhenmin , Le système de contrôle de constitutionnalité en Chine , Éditions de l’Université de la Science politique et juridique de la Chine , 2004 ; L. Guanghua , Étude comparée sur le contrôle de constitutionnalité , Éditions de la Contribution sur la Science Sociale , 2004 ; H. Jin’guang , Contrôle de constitutionnalité, perspectives du droit comparé , Éditions de l’Université du Peuple , 2006.
-
[8]
M. Cappelletti, Le pouvoir des juges, trad. R. David, Paris, Economica-PUAM, 1990, p. 216.
-
[9]
Chaque année, le centre de recherche de droit constitutionnel de l’Université du Peuple organise des sondages, des votes, des tables rondes et même des conférences de presse sur les affaires ayant un objet constitutionnel, puis des contributions sont réunies dans un recueil des affaires constitutionnelles : H. Dayuan (dir.), Études sur les événements constitutionnels chinois , vol. 5, Éditions juridiques . Le groupe de travail autour de M. Han Dayuan vise à analyser les cas concrets qui peuvent être mieux résolus en interprétant les dispositions constitutionnelles et en affirmant les droits fondamentaux sur un plan doctrinal. En 2010, cinq volumes ont déjà été publiés.
-
[10]
V. L. Laifan (dir.), La doctrine et les techniques de contrôle de constitutionnalité , Éditions Juridiques 2009, 488 p. Le Professeur Lin Laifan et son groupe de travail contribuent à présenter les principes et les techniques de contrôle du point de vue du droit comparé, notamment ceux de l’Amérique et de l’Allemagne. Cette méthode est, à leurs yeux, la clé de voûte pour faire avancer le contrôle de constitutionnalité. L’utilité de leur recherche pour l’appréciation de la conformité à la Constitution parviendra à sa pleine effectivité une fois que sera établi un organe spécial de contrôle.
-
[11]
V. Hong Shihong , « La question de constitutionnalité – l’antagonisme entre le centralisme démocratique et contrôle de constitutionnalité », Revue de Science juridique en Chine et à l’étranger , n° 5, 2000, pp. 596-599.
-
[12]
V. Wang Zhengmin , Le système du contrôle de constitutionnalité de la Chine , Éditions de l’Université de sciences juridiques et politiques de la Chine , Pékin, 2004, p. 108.
-
[13]
V. Fan Jinxue , « Sur le perfectionnement du contrôle de constitutionnalité en Chine », Actes du colloque du deuxième forum du droit constitutionnel en Asie, 21-22 août 2009, p. 177.
-
[14]
Le Conseil des affaires d’Etat de la RPC, c’est-à-dire le gouvernement populaire central, est l’exécutif de l’organe du pouvoir d’Etat suprême, l’organe administratif suprême de l’Etat. Le Conseil des affaires d’Etat dirige de fançon unifiée le travail des organes admnistratifs de l’Etat à tous les échelons, et délimite les attributions de l’autorité centrale et des administrations des provinces, des régions autonomes et des municipalités relevant de l’autorité centrale. Le Conseil des affaires d’Etat est composé du Premier ministre, des vice-premiers ministres, des conseillers d’Etat, des ministres, des présidents de commission, du président de la Commission de vérification des comptes et du secrétaire général. Ses fonctions sont importantes dont la fonction d’arrêter des mesures administratives, élaborer des lois et règlements administratifs et émettre des décisions et des ordonnances conformément à la Constitution et à la loi est liée indirectement au contrôle de constitutionnalité.
-
[15]
V. Wang Zhengmin , op. cit., p. 107 et 108.
-
[16]
V. Cai Dingjian , Code constitutionnel, commenté et annoté , Editions juridiques, 2e éd., p. 318.
-
[17]
L’article 88 alinéa 4 de la loi sur la législation : « Les ordres, instructions et décisions inappropriés émis par les ministres du CAE ou ceux émis par les gouvernements locaux aux échelons de la province, peuvent être modifiés ou annulés par le CAE », traduction libre.
-
[18]
V. le site officiel du gouvernement chinois : http://www.gov.cn/zwgk/2005-06/03/ content_4049.htm
-
[19]
Wang Kai , « Le contrôle de constitutionnalité en Chine », in Hu Jinguang (dir.), Contrôle de constitutionnalité : perspectives du droit comparé , Éditions de l’Université du Peuple , 2006, p. 336.
-
[20]
V. Ma Ling, « Le rôle de la Cour suprême populaire dans le contrôle de constitutionnalité en Chine », Xue xi yu tansuo , n°6, 2007.
-
[21]
Le codage en chinois de cette réponse est [] .
-
[22]
En 1983, Shen Yafu et Mu Chunlin sont deux journalistes qui ont écrit un reportage pour dévoiler la tragédie d’une femme. Selon ce reportage, cette femme qui s’appelle Tian Zhenzhu a subi des tortures de son mari ce qui a donc suscité beaucoup de critiques envers cet homme dans l’opinion publique. C’est pourquoi cet homme, Du Rong, a lancé une plainte contre les deux journalistes invoquant sa dignité protégée par la loi et la Constitution. Le 29 Juin 1987, le juge a quo a condamné les deux journalistes pour crime de diffamation. Mais les deux coupables ont fait appel devant la Cour intermédiaire de Shanghai en invoquant leur liberté d’expression protégée par la Constitution. Enfin, les juges d’appel ont fait référence à plusieurs dispositions constitutionnelles en rejetant leur demande et ont donné ainsi un bel exemple pour justifier la possibilité d’un contrôle de constitutionnalité par les juges ordinaires. V. le lien : http://www.chinacourt.org/article/detail/2002/11/id/17813.shtml. Consulté le 2 Janvier 2008.
-
[23]
Cité par Wang Zhenmin, Le système de contrôle de constitutionnalité de la Chine , Éditions de l’Université de sciences juridiques et politiques de la Chine , Pékin, 2004, p. 198.
-
[24]
V. Zhang Qianfan et Huang Yue , « De la Constitution au constitutionnalisme : le passé, le présent et l’avenir du contrôle de constitutionnalité en Chine », in Actes du colloque de la deuxième table ronde asiatique du droit constitutionnel , p. 157, à paraître.
-
[25]
Wang Xiuzhe , « Les obstacles et les propositions de réforme sur le déclenchement du contrôle de constitutionnalité par les citoyens , Revue de Science juridique du Nord , n°1, 2010, p.29.
-
[26]
Par exemple, le Professeur Chen Weidong ???, un pénaliste connu, a dit que les modifications mettent l’accent sur les droits des accusés à avoir des conseillers juridiques ; elles permettront aux avocats d’examiner et de copier l’énoncé des faits et les charges prononcées par le parquet ; et les accusés et leurs avocats devront être sans surveillance pendant leurs entretiens privés. V. un entretien sur la révision de la loi de procédure pénale en mars 2012 : http://news. xinhuanet.com/politics/2012lh/2012-03/11/c_111636229.htm. Consulté le 10 mai 2012.
-
[27]
À savoir la Constitution, la loi sur la législation, la loi de surveillance du Comité permanent de l’APN du 27 août 2006 et le règlement du 16 décembre 2005 sur l’enregistrement des règlements administratifs, règlements locaux et règlements particuliers.
-
[28]
Ce contrôle se trouve notamment dans le système de « l’approbation préalable ». C’est-à-dire que certains actes juridiques ne peuvent entrer en vigueur qu’après avoir été soumis pour approbation au Comité permanent de l’APN. Dans ce cas, leur saisine est obligatoire, l’examen est arbitraire et la décision est exécutoire. En vertu des alinéas 2 et 3 de l’article 63 de la loi sur la législation, les comités permanents des Assemblées populaires compétents constatent si les règlements locaux relevants des municipalités relativement importantes sont contraires à la Constitution et à la loi. Si c’est le cas, le Comité permanent concerné doit formuler une décision et, dans le cas contraire, les règlements locaux doivent être ratifiés dans un délai de 4 mois.
-
[29]
Dans ce cas, la Constitution et la loi sur la législation prévoient que le Comité permanent et les autres organes contrôlent les textes déjà ratifiés et produisant des effets de droit. Ce mode de contrôle se divise en deux catégories : le contrôle relevé d’office et le contrôle par requête. C’est dans cette procédure que les principaux objets de contrôle vont être soumis.
-
[30]
Dans l’affaire Sun Zhigang , ce sont trois docteurs en droit qui ont œuvré pour déclencher la procédure de contrôle de constitutionnalité pour la première fois en Chine.
-
[31]
En 2005, le Comité permanent de l’APN a modifié le règlement sur la procédure d’enregistrement et de contrôle des règlements administratifs et locaux, règlements autonomes et particuliers, règlements des zones économiques spéciales (?? ?) et un nouveau règlement a été élaboré par le Comité permanent de l’APN afin de préciser et de compléter les règles de procédure de contrôle a priori des actes juridiques : le règlement sur le contrôle et l’enregistrement de l’interprétation judiciaire ().
-
[32]
En vertu de l’article 8 du règlement sur les enregistrements du 16 décembre 2005, lorsqu’une commission permanente estime dès réception qu’il existe des violations de la Constitution ou des lois dans les textes enregistrés, il peut effectuer un examen d’office, et peut collaborer avec la commission des travaux législatifs en vue de faire un rapport écrit. Par ailleurs, lorsque la commission des travaux législatifs conteste la conformité des actes enregistrés à la Constitution, elle peut formuler une proposition écrite et la déposer à la commission permanente concernée après approbation du Secrétaire général.
-
[33]
V. Luo Meiying , « Un entretien avec le Professeur Lin Laifan sur l’établissement du bureau d’enregistrement des lois et des règlements », Journal des jeunes , 25 juin 2004, en ligne : http://www.lawinnovation.com/ html/zgfx50rlt/596989160155.shtml, Consulté le 12 octobre 2011.
-
[34]
V. l’article 10 du règlement d’enregistrement.
-
[35]
V. l’article 11 du règlement d’enregistrement.
-
[36]
V. l’article 10 du règlement d’enregistrement.
-
[37]
V. Hu Jin’guang , « La perfection du système de recours constitutionnel en Chine », Études de l’Université de la gestion du cadre politique et juridique de Henan , n° 6, 2007, p. 7.
-
[38]
Lin Laifan (dir.), Les doctrines et les techniques du contrôle de la constitutionnalité , Éditions Juridiques , 2009, p. 469.
-
[39]
Par exemple, dans l’affaire Sun Zhigang, les propositions du contrôle n’ont eu aucune réponse officielle.
-
[40]
Selon l’article 15 du règlement d’enregistrement « Un bulletin rédigé par le premier bureau du secrétariat du Comité permanent de l’APN va résumer le bilan d’enregistrement des règlements aux commissions permanentes de l’APN, aux membres du Comité permanent et aux organes d’élaboration ».
-
[41]
Les tenants de cette thèse sont généralement des constitutionnalistes de la première génération de la nouvelle Chine : Zhang Youyu , Xu Congde , He Huahui , cités par Hu Jinguang , op. cit., p. 197 et s.
-
[42]
V. Zhang Qianfan , « L’institution d’un système de contrôle des normes juridiques en Chine – Réflexions sur la théorie de la révision constitutionnelle », Stratégie et Gestion , n° 2, 2004 ; Wang Lei , Choisir la Constitution , Éditions de l’université de Beijing, 2003, 286 p.
-
[43]
Par exemple, Wang Kewen , « Une proposition pour établir une Cour constitutionnelle en Chine », Jianghai xuekan , n° 2, 1989.
-
[44]
Bao Wanchao ???, « La possibilité d’établir un contrôle de constitutionnalité en coexistence avec le conseil constitutionnel et la Cour populaire suprême », Revue de Science juridique , n? 4, 1998, pp. 11 et s.
-
[45]
Ibidem, p. 64.
-
[46]
Ibidem.
-
[47]
Liu Songshan , « L’échec d’un projet de comité constitutionnel », Revue des débats sur la science juridique et politique , n° 5, 2010, p. 95.
-
[48]
V. Xu Chongde , L’histoire constitutionnelle de la République Populaire de Chine , Éditions du Peuple de Fujian, 2003 , p. 561.
-
[49]
Par exemple, Lin Laifan (dir.), Les doctrines et les techniques du contrôle de la constitutionnalité , Editions Juridiques , 2009, pp. 471-472 ; Ji Weidong , « Contrôle de constitutionnalité et renforcement du pouvoir judiciaire », Sciences Sociales de la Chine , n? 2, 2002, pp. 4-16.
-
[50]
Lin Laifan , Des normes constitutionnelles à une constitution normative , Éditions Juridiques , 2001, p. 341.
-
[51]
Lin Laifan (dir.), Les doctrines et les techniques du contrôle de la constitutionnalité , Éditions Juridiques , 2009, pp. 471-472.
-
[52]
Ji Weidong, op.cit., p.15.
-
[53]
En vertu de l’alinéa 1er de l’article 91 de la loi sur la législation et de l’alinéa 2 de l’article 11 du règlement d’enregistrement.
-
[54]
L. Favoreu, « Juridicisation », in Dictionnaire constitutionnel, Paris, Puf, 1992, p. 544.
-
[55]
X. Philippe (dir.) « La QPC : Perspectives comparatistes. Éléments de réflexion sur la question prioritaire de constitutionnalité au regard de quelques exemples du contentieux constitutionnel comparé : Espagne, Italie, Allemagne », in La question prioritaire de constitutionnalité, sous la direction de Jean-Baptiste Perrier, PUAM, 2011, p. 39 et s.
-
[56]
Ibidem, p. 39.
-
[57]
Liu Hainian , « L’influence sur la légalité chinoise après l’accès à l’OMC et aux deux pactes internationaux relatifs aux droits de l’Homme WTO ». v. le reportage en ligne : http://58.63.114.194:86/ssds/html/2003/12/ 200312191259042766.htm.
-
[58]
L’article 2 et l’article 11 de la loi du contentieux administratif en Chine ont exclu la compétence judiciaire des tribunaux pour le contrôle de la légalité des règlements administratifs. Sur cette question, voir Zhang Li Le contrôle juridictionnel de la légalité des actes administratifs en Chine : éléments d’analyse comparée des contentieux administratifs chinois et français, Bruylant, 2010.
-
[59]
V. Su Li ??, Institutions judiciaires dans les bourgs chinois , Éditions de l’Université de Science politique et juridique de la Chine , 2000, p.74.
-
[60]
V. Ji Weidong , « Le renforcement du pouvoir judiciaire et le contrôle de constitutionnalité » , in Revue de Science sociale de la Chine , n°2, 2002.
-
[61]
V. Wan Yi , ? « L’évolution, l’actualité et l’avenir du “système demande d’instructions supérieures” », in Études sur la Cour suprême , sous la dir. de Zuo Weimin , Éditions Juridiques , 2004, p. 355.
-
[62]
V. Wan Yi , « La crise entre le passé et les temps présents : le système de demande d’instructions », Sciences Juridiques , 2005, n° 2, p. 11.
-
[63]
V. L’article 10 du règlement de l’interprétation judiciaire de la Cour Suprême Populaire.
-
[64]
Le règlement de l’interprétation judiciaire de la Cour Suprême Populaire a précisé des modalités dans chaque étape.
-
[65]
L’ article 5 du règlement de l’interprétation judiciaire de la Cour Suprême Populaire.
-
[66]
L’article 19 du règlement de l’interprétation judiciaire de la Cour Suprême Populaire.
-
[67]
L’alinéa 1er de l’article 20 du règlement de l’interprétation judiciaire de la Cour Suprême Populaire.
-
[68]
Han Dayuan, « La signification, la stratégie et le cadre de la loi sur la procédure de l’interprétation constitutionnelle ? », in Revue de Science sociale de la Province de Zhejiang , n° 9, 2009.
-
[69]
Wang Zhenmin , op. cit., p. 117.
-
[70]
L’Assemblée populaire nationale et son Comité permanent ont fait beaucoup d’efforts pour établir un système juridique complet. Comme on l’a souligné, les efforts normatifs en Chine ont eu des résultats étonnants, à savoir l’adoption de plusieurs milliers de normes juridiques de 1950 à 2009 : plus de 300 lois, plus de 800 règlements administratifs, plus de 20 000 arrêtés ministériels et des gouvernements locaux et plus de 7000 règlements locaux etc. V. Ma Haiyan, « D’une seule loi à des milliers de lois : la vitesse de l’élaboration des lois en Chine ” », disponible sur le site : http://www.chinanews.com. cn/gn/news/2009/09-03/1847272.shtml, consulté le 3 Septembre 2009.
-
[71]
Le 10 juin 2008, deux avocats se sont vus refuser un entretien avec deux accusés par l’administration d’une maison d’arrêt à Haikou, Province de Hainan. L’incident résulte d’un conflit de normes. Selon l’alinéa 2 de l’article 96 de la loi sur la procédure pénale, la possibilité pour les avocats de s’entretenir avec l’accusé qui est dans la maison d’arrêt est soumise à autorisation préalable. Mais en vertu de l’article 33 de la loi sur les avocats, ceux-ci ont le droit de voir l’accusé. Ce conflit des normes a suscité les analyses de certains constitutionnalistes qui, se fondant sur l’article 125 de la Constitution, ont conclu à la priorité au droit de la défense de l’accusé.
-
[72]
J.-P. Massias, Contrôle de constitutionnalité et socialisme : l’exemple des États d’Europe de l’Est (1917-1990), thèse Clermont-ferrand, 1991, p. 914.