Couverture de RFAP_147

Article de revue

Regard sur les transformations de la responsabilité administrative

Pages 575 à 587

Notes

  • [1]
    On admettra la césure temporelle adoptée par le professeur Jacques Moreau qui fait commencer la période moderne en 1990, époque à laquelle le juge administratif a admis pleinement la supériorité du droit européen sur le droit interne.
  • [2]
    Nous nous permettons de renvoyer sur ce point, et pour éviter toute répétition, à notre article, L’exorbitance du droit de la responsabilité administrative, in Melleray, Fabrice (dir.) (2004), L’exorbitance du droit administratif en question(s), Paris, LGDJ, p. 201.
  • [3]
    CE, Ass., 29 décembre 1978, Darmont, Rec. p. 542 ; AJDA 1979, n° 11, p. 45, note M. Lombard ; D. 1979, 279, note M. Vasseur ; RDP 1979, p. 1742, note J.M. Auby.
  • [4]
    CE, 2 novembre 2005, Société coopérative agricole Ax’ion, Rec. p. 468 ; AJDA 2006, p. 142, chr. C. Landais et F. Lenica ; RFDA 2006, p. 349, concl. M. Guyomar, note C. Guettier ; RDP 2006, p. 1427, note C. Broyelle.
  • [5]
    DC n° 99‑419 du 9 novembre 1999, Loi relative au pacte civil de solidarité, RDP 2000, p. 203, note P. Blacher et J.B. Seube ; JCP 2000, I, 280, note G. Viney.
  • [6]
    À ce mouvement se rattache le livre de André Demichel (1978), Le droit administratif ‑ Essai de réflexion théorique, Paris, LGDJ où il considère, dans une perspective critique du système capitaliste, que la responsabilité administrative est « une procédure patrimoniale utilisée comme mode de gestion des services publics », car « le service public accepte de payer pour éviter d’avoir à bien fonctionner » (p. 157).
  • [7]
    DC n° 99‑421, 16 décembre 1999, Loi portant habilitation du gouvernement à procéder par ordonnance à l’adoption de certains codes, AJDA 2000, p. 31, note J.E. Schoettl.
  • [8]
    Voir sur ce point Pontier, Jean‑Marie dir. (2008), Les états intermédiaires en droit administratif, Aix‑en‑Provence, PUAM et notre contribution sur « Les états intermédiaires en matière de responsabilité », p. 87.
  • [9]
    CE, Ass., 28 juin 2002, Ministre de la Justice c/ Magiera, AJDA 2002, p. 596, chr. F. Donnat et D. Casas ; RFDA 2002, p. 756, concl. F. Lamy.
  • [10]
    CE, Ass., 8 fév. 2007, Gardedieu, Rec. Lebon, p. 78, concl. L. Derepas ; RFDA 2007, p. 525, note D. Pouyaud ; AJDA 2007, p. 585, chr. F. Lenica et J. Boucher.
  • [11]
    Par l’arrêt Darmont précité à la note 3.
  • [12]
    CE, 18 juin 2008, Gestas, RFDA 2008, p. 755, concl. C. De Salins, p. 1178, note D. Pouyaud. Sur cette question, voir Muscat, Hélène (2011), « La responsabilité du fait du contenu d’une décision de justice. Réflexions liées à la position de la juridiction administrative », in Mélanges François Julien‑Laferrière, Bruxelles, Bruylant, p. 429.
  • [13]
    Voir la démonstration de Broyelle, Camille (2008), Le risque en droit administratif « classique » (fin du XIX, milieu du XXème siècle), RDP, p. 1513, voir p. 1516.
  • [14]
    Sur l’ambiguïté du principe d’égalité devant les charges publiques, Debard, Thierry (1987), L’égalité devant les charges publiques : fondement incertain de la responsabilité administrative, D., chr. p. 157.
  • [15]
    CE, Ass., 9 avril 1993, Bianchi, RFDA 1993, p. 573, concl. S. Daël.
  • [16]
    CE, 9 juillet 2003, APHP c/ Marzouk, Rec. p. 338 ; AJDA 2003, p. 1946, note M. Deguergue, dont la compatibilité avec le droit de l’Union européenne a été reconnue par CJUE, 21 décembre 2011, CHU de Besançon, AJDA 2011, p. 2505, ce qui consolide l’application de cette jurisprudence : CE, 12 mars 2012, CHU de Besançon, AJDA 2012, p. 575.
  • [17]
    CE, S., 12 octobre 2009, Mme Chevillard, AJDA 2009, p. 2170, chr . S.J. Liéber et D. Botteghi.
  • [18]
    Selon la terminologie employée par l’article L. 110‑1 du code de l’environnement issu de la loi Barnier du 2 février 1995, terminologie qui a été modifiée dans l’article 5 de la Charte de l’environnement qui donne une nouvelle définition du principe de précaution, qui n’est pas rigoureusement identique à celle donnée par le code.
  • [19]
    CE, 31 août 2009, Commune de Crégols, AJDA 2009, p. 1824, chr . S.J. Liéber et D. Botteghi.
  • [20]
    C’est Georges Teissier qui a le premier rattaché l’équité et la justice au principe de l’égale répartition des charges entre les citoyens in La responsabilité de la puissance publique, Répertoire Béquet, 1906, t. 23, p. 104 à 107, réédition La Mémoire du Droit, 2009, p. 177.
  • [21]
    CE, S., 11 février 2005, GIE Axa Courtage, Rec. p. 45, concl. Devys ; RFDA 2005, p. 595, concl. Devys, p. 602, note P. Bon ; AJDA 2005, p. 663, chr. C. Landais et F. Lenica ; JCP A 2005, 1132, note J. Moreau.
  • [22]
    CE, S., 1er février 2006, Ministre de la Justice C/ MAIFRFDA 2006, p. 602, concl. M. Guyomar, p. 614, note P. Bon ; AJDA 2006, p. 586, chr. C. Landais et F. Lenica.
  • [23]
    CE, 13 novembre 2009, Ministre de la Justice c/ Association tutélaire des inadaptés, Rec. p. 462 , JCP?A 2010, p.?40, concl. I.?de Silva, p.?43, note N.?Albert?; JCP?G 2010, p.?41, note A.?Van Lang.
  • [24]
    CE, 17 décembre 2010, Garde des Sceaux c. Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme, AJDA 2011, p. 1696, note D. Pollet‑Panoussis.
  • [25]
    A cet égard Benoit Plessix (2003) a bien montré dans sa thèse les effets de ce type d’emprunt, L’utilisation du droit civil dans l’élaboration du droit administratif, Paris, Ed. Panthéon‑Assas, notamment dans le domaine de la responsabilité, p. 746 à 751.
  • [26]
    Cornu Gérard (1951), Etude comparée de la responsabilité délictuelle en droit privé et en droit public, Reims, Matot‑Braine, p. 249, 264 à 279, qui systématise la position déjà soutenue par Boris Starck (1947) dans sa thèse, Essai d’une théorie générale de la responsabilité civile considérée en sa double fonction de garantie et de peine privée, Paris, Rodstein, p. 37 à 44 notamment.
  • [27]
    Nous nous permettons de renvoyer à notre étude Deguergue, Maryse (2009), Les sources constitutionnelles de la responsabilité administrative, in Bioy, Xavier (dir.) (2009), Constitution et responsabilité, Paris, Montchrestien, coll. Grands colloques, 2009, p. 145.
  • [28]
    DC n° 99‑419 du 9 novembre 1999, précitée à la note 5.
  • [29]
    CE, S., 18 juin 2001, Commune de Venelles, Rec. p. 18, concl. Touvet ; RFDA 2001, p. 681, note M. Verpeaux ; AJDA 2001, p. 153, chr. M. Guyomar et P. Collin.
  • [30]
    Sur les rapports entre responsabilité administrative, droits de l’homme et droits fondamentaux, voir Belrhali‑Bernard, Hafida (2010), « La responsabilité administrative au service de la protection des droits de l’homme », in Mathieu, Martial (dir.) (2010), Droits naturels et droits de l’homme, Grenoble, PUG, 2010, p. 359 et Rouyère, Aude (2011), « Droits publics subjectifs des administrés et droits fondamentaux », in Les droits publics subjectifs des administrés, Paris, Litec, Travaux de l’AFDA, Tome 4, p. 73.
  • [31]
    Pour un historique de la perte de chance, voir notre contribution, La perte de chance en droit administratif, in Koubi, Geneviève, Guglielmi, Gilles J. dir. (2000), L’égalité des chances, Paris, La Découverte, coll. Recherches, p. 197.
  • [32]
    CE, S., 5 janvier 2000, Consorts Telle, APHP de Paris, Rec. p. 5, concl. D. Chauvaux ; RFDA 2000, p. 641, concl. D. Chauvaux, note P. Bon ; AJDA 2000, p. 137, chr. M. Guyomar et P. Collin.
  • [33]
    CE, S., 21 décembre 2007, Centre hospitalier de Vienne, AJDA 2008, p. 135, chr. J. Boucher et B. Bourgeois‑Machureau.
  • [34]
    CE, 8 avril 2009, Laruelle, AJDA 2009, p. 1262, concl. R. Keller. Dans le même sens, pour l’accueil des enfants autistes dans les classes primaires : CE, 16 mai 2011, Mme Beaufils, AJDA 2011, p. 1749, note H. Belrhali‑Bernard. Pour le droit au logement opposable, CAA Paris, 20 septembre 2012, M. B., AJDA 2012, p. 1767, confirmant TA Paris, 17 décembre 2010, M. B., AJDA 2011, p. 690, note H. Belrhali‑Bernard.
  • [35]
    Belrhali‑Bernard, Hafida (2011), Note sous TA Paris, 17 décembre 2010, M. B., AJDA, p. 690. Il est remarquable que par un avis contentieux le Conseil d’État ait vu dans le recours en responsabilité la possibilité de rendre effectif le droit au logement opposable : CE, avis, 2 juillet 2010, Maache, AJDA 2010, p. 1948, note S. Robert‑Cuendet.
  • [36]
    CE, Ass., 22 octobre 2010, Mme Bleitrach, AJDA 2010, p. 2207, chr. D. Botteghi et F. Lallet, à propos du retard à réaliser les travaux pour rendre tous les bâtiments publics accessibles aux personnes handicapées et du préjudice anormal et spécial causé à une avocate qui ne pouvait pas accéder en fauteuil roulant aux juridictions de son barreau.
  • [37]
    Directive n° 2004‑35 du 21 avril 2004, JOCE 30 avril 2004, p. 56 ; Loi n° 2008‑757 du 1er août 2008, JORF 2 août 2008, p. 12361.
  • [38]
    CE, Ass., 9 mars 2007, Schwartz et Commune de Grenoble, AJDA 2007, p. 861, concernant la présomption de causalité entre la vaccination contre l’hépatite B et l’apparition de la sclérose en plaques, arrêt dont la portée a été élargie récemment à l’aggravation d’une pathologie existante avant la vaccination par CE, 17 février 2012, Mme A., req. n° 331277.
  • [39]
    CE, 19 octobre 2007, Blin, AJDA 2008, p. 597, note N. Albert.
  • [40]
    CE, S., 26 mars 2000, APHPRec. p. 167, concl. D. Chauvaux.
  • [41]
    Loi n° 2002‑303 du 4 mars 2002, JORF, 5 mars 2002, p. 4118.
  • [42]
    CE, avis, 16 février 2009, Hoffmann‑Glémane, AJDA 2009, p. 589, chr. S.J. Liébert et D. Botteghi.
  • [43]
    CE, Ass., 19 juillet 2011, Bégnis, AJDA 2012, p. 223, note H. Belrhali‑Bernard.
  • [44]
    Par les arrêts CE, S., 3 juillet 1998, Bitouzet, RFDA 1998, p. 841, note D. de Béchillon ; AJDA 1998, p. 570, chr. F. Raynaud et P. Fombeur ; et CE, Ass., 4 juillet 2003, Moya‑Caville, AJDA 2003, p. 1598, chr. F. Donnat et D. Casas.
  • [45]
    CE, 23 juillet 2010, Société Touax, AJDA 2010, p. 2269, note H. Belrhali‑Bernard.
  • [46]
    CE, 5 juillet 2000, Mégret et Mekhantar, AJDA 2001, p. 95, note Y. Gounin.
  • [47]
    Expression empruntée à Mazères, Jean‑Arnaud (2001), « Recherche sur les fondements méta‑éthiques de la responsabilité » in Vers de nouvelles normes en droit de la responsabilité publique ?, Colloques du Sénat, 11‑12 mai 2001, p. 325.

1 Se pencher sur les transformations de la responsabilité administrative suppose que cette partie du droit administratif ait acquis suffisamment de stabilité et de maturité pour que les fondements et les principes directeurs de ce droit se dégagent assez nettement et que l’observateur dispose de suffisamment de recul pour apercevoir, le cas échéant, quelques lignes se déplacer subrepticement. Comme l’ont souligné les anciens auteurs qui se sont interrogés plus généralement sur les transformations de la responsabilité, celle‑ci constitue un champ d’exploration idéal pour l’étude de la structure du droit et de ses modes d’élaboration. L’intégration des divers éléments de la responsabilité s’opère dans un « principe d’intelligibilité » qu’il convient de dégager et dans lequel s’unifient tous les traits de l’institution en cause, tout en dépassant les doctrines par lesquelles cette idée s’exprime (Husson, 1947, VII, 75). Toutefois, l’idée de l’équité et de la justice sociale comme « essence de la responsabilité civile » (Husson, 1947, 314‑339) et comme fondement de la responsabilité de la puissance publique en particulier (Fairé, 1923, 6‑8, 91‑92), dégagée de l’évolution de la responsabilité durant la première moitié du XXe siècle, peut sembler bien éculée aujourd’hui.

2 Léon Duguit, pour sa part, lorsqu’il s’est interrogé sur les transformations de la responsabilité administrative, a mis en exergue la sûreté de l’individu comme idée marquante de l’extension de la responsabilité de l’État (Duguit, 1913, 223). Il entendait par là que des garanties étaient désormais prévues au profit des individus contre l’arbitraire de l’État, au nombre desquelles la responsabilité de l’État était « la meilleure sauvegarde » de cette sûreté. L’intérêt de son raisonnement réside encore aujourd’hui dans l’appréhension globale des évolutions de la responsabilité administrative au sein de ce qu’il appelait « le droit public transformé », qu’il résumait en substance de la façon suivante : l’État étant l’ensemble des services publics fonctionnant sous l’impulsion et le contrôle des gouvernants dans « l’intérêt collectif », « si l’exécution d’un de ces services occasionne un préjudice spécial à un particulier, la caisse collective doit supporter la réparation du dommage » (Duguit, 1913, 255). À la lumière de cette transformation, décrite en 1913, on comprend que la doctrine contemporaine ne voie aucune rupture entre la période dite classique et la période dite moderne du droit de la responsabilité administrative, mais seulement « des modifications convergentes et plus rapides » (Moreau, 2011, 657) [1], allant toutes dans le sens d’une plus complète réparation des préjudices subis par les victimes.

3 Toutefois, une caractéristique de la période moderne, qui ne se trouve pas dans les périodes antérieures, concerne l’approfondissement sémantique de la notion de responsabilité administrative et du concept de réparation qui en est consubstantiel, au regard des notions de solidarité, d’indemnisation et de compensation, lesquelles se traduisent par le recours à la technique juridique des fonds d’indemnisation, institués par la loi, et qui sont reconnus comme détachés de toute idée de responsabilité. Mais ils relèvent néanmoins de l’idée de garantie des dommages causés par les défaillances de l’État, dans ses missions de protection de la santé essentiellement (Frank, 2008), garantie qui peut être mise en relation avec le renforcement de la sûreté, jadis relevé par Duguit. L’intervention systématique du législateur pour décider de la mise en œuvre de la solidarité nationale, indépendamment de la responsabilité, n’interdit donc pas de reconnaître le caractère toujours essentiellement jurisprudentiel de la responsabilité administrative. De ce fait, l’autonomie du droit qui lui est applicable, entendue du point de vue de son exorbitance par rapport au droit privé, demeure une question débattue [2], car elle met en cause le pouvoir créateur – et créatif – du juge administratif, étant entendu que son pouvoir normatif est aujourd’hui unanimement admis. Il est attesté du reste par la reconnaissance, par le juge administratif lui‑même, de « principes généraux régissant la responsabilité de la puissance publique » [3], et même de « principes qui gouvernent l’engagement de la responsabilité sans faute de l’État » [4], tous principes que le juge a consacrés et qu’il collationne dans une catégorie générique. Paradoxalement, n’est toujours pas proclamé un principe général de la responsabilité de la puissance publique ou des personnes publiques, alors qu’un principe général de la responsabilité des personnes physiques a été posé par le Conseil constitutionnel qui y voit « une exigence constitutionnelle » posée par l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen [5].

4 Le regard porté sur les transformations de la responsabilité administrative suppose résolues deux questions préalables : d’une part, la distanciation nécessaire à une vision rétrospective que nous autorise une étude antérieure portant sur la période classique de la responsabilité administrative (Deguergue, 1994) ; d’autre part, la définition de la responsabilité administrative, qui sera entendue de façon large comme celle qui est appliquée par le juge administratif selon les règles qu’il a lui‑même posées, que cette responsabilité soit supportée par une personne publique ou par une personne privée, chargée d’une mission de service public et ayant fait usage à cette fin de prérogatives de puissance publique. Ce regard mérite aussi une précision relative au point de vue adopté pour regarder : il ne s’agira pas de prendre le parti de la critique du droit, au sens où un mouvement doctrinal a pu le faire à une certaine époque [6], mais d’apprécier l’intelligibilité et la lisibilité des règles et des principes de la responsabilité administrative pour leurs destinataires, dès lors que ce sont des objectifs de valeur constitutionnelle qui s’imposent au juge administratif dans la consécration des règles de la responsabilité [7]. Cette brève étude partira d’un constat, à savoir l’éclatement des catégories juridiques traditionnelles de la responsabilité administrative, pour aboutir à une tentative d’explication à partir de l’idée de l’effectivité de la responsabilité administrative recherchée par le juge, le recours en responsabilité apparaissant comme l’ultime moyen de lutter contre l’impuissance des services publics à satisfaire certains droits subjectifs des administrés, qui leur ont pourtant été reconnus par les textes.

L’éclatement des catégories juridiques traditionnelles de la responsabilité administrative

5 La responsabilité administrative a constitué pendant longtemps l’archétype du droit binaire, où autant les conditions d’engagement de la responsabilité des personnes publiques que les fondements médiats de cette responsabilité pouvaient être classifiés selon des distinctions duales : la distinction entre faute de service et faute personnelle servait à départager la responsabilité de l’administration de celle de ses agents, la distinction entre la responsabilité pour faute et la responsabilité sans faute classait les conditions d’engagement de la responsabilité des personnes publiques, la faute se subdivisant elle‑même en faute lourde et faute simple, la responsabilité sans faute en hypothèses de risque ou de rupture de l’égalité des citoyens devant les charges publiques. Or, l’évolution a montré la pertinence du questionnement doctrinal, apparu à l’aube du XXIe siècle, et relatif au maintien du caractère binaire du droit administratif, eu égard à la complexification du droit (Truchet, 2000, 443). Non seulement les classifications binaires des régimes de responsabilité s’avèrent insuffisantes à traduire les subtilités de la réalité jurisprudentielle, mais encore la rénovation des fondements de la responsabilité administrative par le recours à d’autres concepts que ceux de la période classique s’opère de manière silencieuse.

Les insuffisances des classifications binaires des régimes de responsabilité

6 Les transformations de la responsabilité administrative ne doivent pas faire figure d’arbres qui cachent la forêt des cas d’espèces, majoritaires encore, où la responsabilité administrative est engagée consécutivement à une faute de service, à un risque créé par l’administration ou non évité par elle ou encore à une rupture de l’égalité devant les charges publiques intervenue dans l’intérêt général au détriment d’un administré. Les catégories juridiques demeurent debout, mais toutes les hypothèses de responsabilité administrative ne tombent plus nécessairement sous leur empire.

7 1) Ainsi, on peut observer que le juge administratif éprouve parfois des réticences à reconnaître expressément une faute, alors que le manquement à une obligation préexistante est indéniable de la part de l’État. De sorte que le silence du juge sur la faute suscite l’interrogation quant à la consécration d’une responsabilité sans faute, ou d’une responsabilité pour fait objectif ou encore d’une responsabilité sui generis, voire innommée ou hybride. L’existence « d’états intermédiaires » a pu aussi être évoquée, d’autant que ces derniers ne sont pas propres au droit de la responsabilité administrative [8].

8 La responsabilité de l’État du fait du dépassement du délai raisonnable de jugement par ses juridictions [9] et du fait d’une loi adoptée en méconnaissance des engagements internationaux de la France [10] est emblématique de cette tendance du juge à ne pas se soucier du classement de ces hypothèses dans un régime précis de responsabilité. Alors que le manquement à une obligation préexistante est certain dans ces deux hypothèses, le juge ne le qualifie pas expressément de faute, ce qui conduit à se demander si la définition de la faute, dégagée par Planiol, n’est plus considérée par le juge comme pertinente ou si tout manquement à une obligation préexistante n’est plus nécessairement fautif. De la même façon, dans le cadre du régime de responsabilité pour faute lourde de l’État du fait des dysfonctionnements de la justice administrative – régime établi de manière prétorienne par le juge administratif en 1978 [11] – le raisonnement qu’il tient confine à l’incommunicabilité de par son extrême raffinement : en substance, la responsabilité de l’État ne peut pas être engagée du fait du contenu même d’une décision juridictionnelle, sauf si celle‑ci comporte une violation manifeste d’une disposition communautaire suffisamment précise et inconditionnelle pour conférer des droits aux particuliers. Pour autant, cette violation manifeste n’est pas expressément qualifiée de faute lourde [12]. Il apparaît donc que, si le régime de la responsabilité administrative pénètre les activités de souveraineté comme la justice administrative et la législation, il en ressort déformé – et par là même transformé – en raison de la difficulté persistante à imputer une faute à la souveraine puissance. Ce n’est pas le moindre paradoxe de la responsabilité administrative que d’avoir triomphé de l’ancienne irresponsabilité de la puissance publique pour buter aujourd’hui contre l’écueil de la reconnaissance d’une faute à l’encontre de certains services de souveraineté. Entre la faute et le risque se glisse peut‑être une responsabilité administrative pour fait objectif, qui rappelle le « tout fait quelconque de l’homme » de l’article 1382 du code civil, et qui pourrait se traduire par « tout fait objectif de l’État qui cause à autrui un dommage l’oblige à le réparer ».

9 2) La responsabilité sans faute n’échappe pas aux perturbations en raison de la nébuleuse des risques. À l’origine déjà, la distinction entre le risque – entendu comme danger – et l’égalité devant les charges publiques n’était pas des plus claires, car le risque est une charge publique et cette notion, d’origine privatiste, a bien été « publicisée » par le principe d’égalité [13]. En outre, la double face de la violation du principe d’égalité, tantôt illégalité fautive, tantôt révélatrice d’un préjudice anormal et spécial causé sans faute par un acte ou une activité légale, atteste de la part d’artifice et de simplification dans les classifications binaires [14], le principe d’égalité relevant autant de la responsabilité pour faute que de la responsabilité sans faute. Par ailleurs, le juge administratif avait paru jusqu’en 1990 réserver le bénéfice de la responsabilité sans faute aux personnes ayant la qualité de tiers par rapport au service public. Mais la consécration de nouvelles hypothèses de responsabilité administrative sans faute au sein des hôpitaux publics, soit pour risque thérapeutique [15], soit du fait du matériel ou des produits défectueux qu’ils utilisent [16], a montré, non seulement que le risque pouvait bénéficier aux usagers du service, mais aussi que le risque danger n’existe pas en soi, mais qu’il se révèle par l’activité d’une personne ou l’usage qui est fait d’une chose. Le risque professionnel a aussi été appliqué de manière extensive à une personne considérée comme collaborateur occasionnel du service public, alors même que l’existence de celui‑ci était douteuse et que plusieurs contrats de droit privé s’interposaient entre la demande des autorités publiques et l’acceptation de la personne victime de son dévouement [17]. La « socialisation du risque », au sens où l’entend le Conseil d’État, est à l’oeuvre, quand bien même il affirme que l’État ne peut pas être un assureur tous risques (Conseil d’État, 2005).

10 Les cas recensés de responsabilité sans faute manquent donc singulièrement d’unité et renvoient une image foisonnante qui n’est pas celle du jardin à la française, que la doctrine classique a dessiné autour du risque et de la rupture de l’égalité devant les charges publiques. L’irruption du principe de précaution est encore davantage de nature à perturber le bel ordonnancement de la responsabilité administrative. Destiné à anticiper et éviter, par des mesures effectives et proportionnées, « les risques de dommages » graves et irréversibles à l’environnement [18], le principe de précaution entretient avec la responsabilité pour risque, les risques qu’il appréhende étant incertains ou inconnus, des rapports ambigus, à tel point qu’il n’a permis d’engager jusqu’à présent que la responsabilité administrative pour faute en raison d’un excès de précaution dans le cadre de l’exercice par un maire de ses pouvoirs de police administrative préventive [19]. Son insertion difficile dans le droit de la responsabilité administrative montre en creux combien la responsabilité sans faute est plus étroitement dépendante du dommage anormal, dans ses effets ou sa cause, que du risque danger lui‑même, le progrès technique permettant de mieux connaître et de réduire la dangerosité.

11 Quant au risque spécial créé pour les tiers par la mise en œuvre de méthodes libérales de rééducation des mineurs imposées par l’État, il est à l’origine d’un alignement de la jurisprudence administrative sur la jurisprudence judiciaire autour du concept de garde d’autrui, qui relativise aussi les rapports entre responsabilité sans faute et risque danger, et aboutit à une rénovation silencieuse des fondements de la responsabilité administrative.

La rénovation silencieuse des fondements de la responsabilité administrative

12 Les fondements de la responsabilité administrative sont entendus ici comme les principes supérieurs qui expliquent l’obligation de réparer les dommages causés par la puissance publique, indépendamment des conditions d’engagement de cette responsabilité. Les principes d’équité et de justice, invoqués par les tenants de l’autonomie de la responsabilité administrative dans les premières années de la construction de ce droit, ont été juridicisés par le recours au principe d’égalité devant les charges publiques, qui a ensuite été présenté par la doctrine comme le principe explicatif de tous les cas de responsabilité [20]. Sans doute parce qu’il est un principe de droit public, par trop « solidariste » aujourd’hui, le principe d’égalité se voit supplanté par la rémanence de deux principes, ceux de sécurité et de liberté, qui subrepticement entament l’autonomie de la responsabilité administrative et confortent l’idée que la responsabilité des personnes publiques pourrait fort bien être engagée par les tribunaux judiciaires, puisque la jurisprudence administrative elle‑même emprunte certains de leurs raisonnements.

13 1) Le mirage du droit privé prend la forme de la théorie de la garde d’autrui. Le juge administratif a en effet voulu dépasser les limites de la responsabilité pour risque spécial créé pour les tiers par les méthodes libérales de réinsertion des mineurs délinquants, dont la dangerosité justifiait l’application du risque. Les mêmes méthodes, dangereuses quand elles s’appliquent à des mineurs délinquants, ne le sont plus lorsqu’elles sont utilisées à l’égard des mineurs non délinquants placés sous la sauvegarde de la justice. Elles n’étaient donc pas aptes à entraîner la responsabilité pour risque de l’administration. Aussi, pour assurer l’égalité de traitement des victimes d’agression par des mineurs bénéficiant de ces méthodes libérales, qu’ils soient délinquants ou non, accueillis par des personnes publiques ou privées, le juge administratif a‑t‑il recours désormais à la théorie civiliste de la garde qui entraîne la responsabilité sans faute de la personne publique qui avait, au titre de l’assistance éducative et au moment de la commission du dommage, « la responsabilité d’organiser, diriger et contrôler la vie du mineur » [21]. Par conséquent, la responsabilité sans faute comporterait maintenant « trois branches au lieu de deux », la garde des personnes constituant « un sous‑ensemble autonome » de la responsabilité sans faute des personnes publiques (Melleray, 2009, 489, 493).

14 Il est remarquable que le juge administratif a paru effrayé par sa propre audace à faire éclater les cadres de la responsabilité administrative sans faute, puisqu’il a admis que les victimes tiers d’un mineur délinquant conservent le choix entre la base juridique du risque spécial et celle de la garde pour faire engager la responsabilité de la personne publique [22]. Par ailleurs, le recours à la théorie de la garde efface la distinction entre les victimes tiers et usagers par rapport au service de l’assistance judiciaire, en ce que cette responsabilité sans faute bénéficie aussi aux usagers du service [23], alors que la responsabilité pour risque spécial créée pour les tiers ne saurait être engagée vis‑à‑vis des usagers du service public, car ils ne se trouvent pas, face à un tel risque, dans une situation comparable à celle des tiers [24]. La simplicité n’est donc pas, malgré les apparences, la vertu première de l’emprunt de la théorie de la garde au droit privé. Or, la signification de cet emprunt par le juge administratif va bien au‑delà de la création d’une nouvelle rubrique de la responsabilité sans faute des personnes publiques et de l’effacement de la distinction entre les victimes tiers et usagers du service public : elle atteint l’autonomie et la spécialité des règles de la responsabilité administrative posées par l’arrêt Blanco[] et elle opère une rénovation silencieuse du fondement de cette responsabilité. Elle accrédite en effet l’idée, défendue par des professeurs de droit privé [26], selon laquelle la sécurité de la victime est un droit, au fondement de la responsabilité de l’État, et serait la contrepartie de son obligation générale de sécurité et de sa puissance. Cette idée de sécurité n’est finalement pas très éloignée de celle de sûreté, que Duguit voyait à l’œuvre dans les transformations du droit public, et traduit l’oscillation du fondement de la responsabilité administrative entre les trois piliers de la Déclaration de 1789, à savoir la sûreté, l’égalité et la liberté.

15 Le principe d’égalité des citoyens devant les charges publiques sert de source constitutionnelle à la responsabilité administrative et a légitimé le développement de la responsabilité sans faute des personnes publiques, au point de constituer aussi une condition d’engagement de la responsabilité administrative. Cette évolution est bien connue [27] et révélatrice de l’époque de formation du droit administratif autour du principe d’égalité devant les services publics. Celui‑ci semble aujourd’hui supplanté par l’invocation de la liberté comme fondement de la responsabilité dans la jurisprudence constitutionnelle. Ainsi, en déclarant que « l’affirmation de la faculté d’agir en responsabilité met en œuvre l’exigence constitutionnelle posée par l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, dont il résulte que tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer », le Conseil constitutionnel [28] semble considérer que la liberté est la source de la responsabilité et que l’action en responsabilité doit être possible dans tous les cas pour respecter « l’exigence constitutionnelle » de la liberté, qui consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui. Or, ce raisonnement, conduit pour la responsabilité des personnes privées, peut être transposé aux personnes publiques, si l’on admet qu’elles jouissent de la liberté – le principe de libre administration des collectivités territoriales, qualifié de liberté fondamentale par le juge administratif, en atteste [29] – et que leur liberté peut être bornée par le respect nécessaire des libertés des citoyens et par la jouissance de leurs droits. La substitution de la liberté à l’égalité, comme fondement de l’obligation de réparer les dommages causés par les personnes publiques, peut aussi se voir corroborée par la force des droits subjectifs des administrés et de leurs droits fondamentaux, au premier rang desquels le droit à la protection des biens, auxquels sont assimilées les créances, et donc le droit à la réparation des dommages. Plus que jamais l’aphorisme de Maurice Hauriou à propos de l’administration semble exact : « qu’elle fasse, mais qu’elle paie » (Hauriou, 1896, 51), sous‑entendu, si elle est libre de causer des dommages dans l’intérêt général, elle doit en assurer la réparation, sa responsabilité étant la contrepartie de sa liberté.

16 La rénovation silencieuse des fondements de la responsabilité administrative exerce aussi des tensions sur les catégories juridiques de ce droit en diversifiant les raisons de réparer les dommages causés. Et si les différentes hypothèses de responsabilité ne peuvent plus être toutes subsumées dans les catégories juridiques traditionnelles, c’est sans doute parce que le juge a la volonté de rendre effectifs des droits subjectifs, proclamés par le législateur, que le juge prend « au sérieux » en sanctionnant leur non respect par la responsabilité administrative. Par là même, le juge tend à assurer également l’effectivité de la responsabilité administrative, comme technique juridique de garantie de ces droits.

La recherche de l’effectivité de la responsabilité administrative

17 La responsabilité administrative révèle à la fois la justiciabilité de droits préexistants, de plus en plus nombreux en raison du phénomène de subjectivisation des droits, et la reconnaissance d’un droit à réparation des dommages consécutifs à la violation de ces droits, qui s’analyse en la sanction de l’obligation de protection des droits des citoyens qui pèse sur les personnes publiques. À un premier point de vue, la responsabilité administrative peut être perçue comme protectrice des droits de l’homme [30] ; mais à un autre point de vue elle peut faire craindre une dérive vers une victimisation exacerbée qui oblige le juge à contenir son expansion.

Le renforcement corrélatif de l’effectivité des droits subjectifs et de l’effectivité de la responsabilité administrative

18 Le renforcement de l’effectivité des droits par l’engagement de la responsabilité administrative peut tomber sous le coup de la critique adressée à la deuxième génération des principes généraux du droit, à savoir qu’il bénéficie prioritairement à certaines catégories de citoyens en position de vulnérabilité. Mais c’est précisément à leur endroit que l’effectivité des droits prend tout son sens et que l’effectivité de la responsabilité administrative doit être éprouvée. Toutefois, la subjectivisation croissante des droits n’exclut pas certains phénomènes d’objectivation.

19 1) À partir du moment où le juge administratif a accepté systématiquement de réparer la perte de chance des administrés de se soustraire à un risque ou de ne pas voir leur situation personnelle aggravée, il a dû logiquement prêter attention aux droits subjectifs accordés aux personnes vulnérables et utiliser la responsabilité administrative pour réparer la double malchance de ceux qui, frappés par le sort, voient en outre leurs droits subjectifs ignorés, voire bafoués, par l’administration. Préjudice certain bien que reposant sur un calcul de probabilité, la perte de chance, après des débuts timides dans le contentieux de la fonction publique et des contrats [31], a connu un développement constant dans le domaine médical aux fins de réparer la fraction du préjudice corporel censée avoir été causée, soit par un défaut d’information du médecin sur les risques encourus par le malade du fait de la thérapeutique proposée et auxquels il n’a pu se soustraire [32], soit par l’acte médical lui‑même ou le retard du diagnostic qui s’est révélé plus maléfique que bénéfique [33]. Cette jurisprudence sophistiquée traduit la part d’indignation que reflète l’engagement de la responsabilité administrative pour faute afin de réparer un préjudice ressenti comme injustement subi par la victime. On retrouve la traduction de ce sentiment dans la reconnaissance récente d’une obligation positive « de résultat » à la charge des autorités publiques de mettre en œuvre les moyens nécessaires pour que le droit à l’éducation des enfants handicapés et pour que le droit au logement opposable des personnes déclarées prioritaires aient « un caractère effectif » [34]. La carence de l’État à respecter ses obligations engage sa responsabilité pour faute, ce qui fait apparaître le recours en responsabilité comme le « recours de la dernière chance » [35] pour assurer l’effectivité des droits subjectifs proclamés par la loi. En outre, en l’absence de carence avérée mais en cas de retard légitime à respecter les délais prévus par les textes pour rendre effectifs des droits, le juge administratif n’hésite pas à engager la responsabilité sans faute de l’État pour rupture de l’égalité des citoyens devant les charges publiques [36], ledit retard étant regardé comme une charge n’incombant pas normalement aux bénéficiaires des droits. Cette évolution montre bien que le juge administratif veut faire du recours en responsabilité un recours effectif au sens de l’article 13 de la Convention européenne des droits de l’homme qui tend lui‑même à assurer l’effectivité des droits reconnus par les textes au profit des personnes dont la dignité est souvent en cause. Finalement, la question peut être posée de savoir si la responsabilité administrative n’est pas le dernier rempart contre la défiance envers le droit et ne devient pas un élément constitutif de la sécurité juridique qui suppose, en premier lieu, l’application des textes.

20 2) Toutefois, le phénomène de la subjectivisation des droits, pour dominant qu’il soit, n’est pas le seul à transformer la responsabilité administrative. Des éléments sporadiques d’objectivation peuvent être relevés dans la législation et la jurisprudence. De fait, la responsabilité environnementale, issue de la directive communautaire du 21 avril 2004 transposée en droit français par la loi du 1er août 2008, tend à réparer les dommages causés à l’environnement, abstraction faite de leur incidence sur les personnes et les biens [37]. La remise en état des lieux atteints est l’un des rares cas de réparation en nature prévus dans notre droit et, si elle pèse prioritairement sur le « pollueur‑payeur », un mécanisme de substitution des autorités publiques est prévu en cas de défaillance de l’auteur du dommage, dans l’exécution tant de ses obligations de prévention que de réparation. Il s’agit donc bien d’une responsabilité administrative qui, dans l’avenir, pourra peser sur l’État objectivement, sans que les droits subjectifs d’une personne soient en cause. Les mécanismes de présomptions de causalité ou de dommage, consacrés par la jurisprudence, participent aussi d’un mouvement d’objectivation qui, du reste, n’est pas totalement étranger à la subjectivité de la victime. En effet, lorsque le juge administratif reconnaît une présomption de causalité entre une vaccination et des effets indésirables qui s’ensuivent [38] ou encore une présomption de préjudice moral en faveur des justiciables à la suite du dépassement du délai raisonnable de jugement d’une affaire [39], il introduit une part d’objectivité dans l’appréciation subjective du dommage rapporté à la personne qui le subit et qui sera dépendante de ses antécédents, de sa diligence ou de sa négligence. Cette effectivité accrue de la responsabilité administrative, en ce qu’elle indemnise toujours plus de préjudices, conduit à se demander si le juge ne consacre pas, de proche en proche, un droit fondamental à la réparation des dommages, d’autant plus qu’il a reconnu que le droit à réparation d’un dommage s’ouvre à la date à laquelle s’est produit le fait qui en est la cause directe et que, quelle que soit sa nature – matériel ou moral –, il entre dans le patrimoine de la victime et est transmissible à ses héritiers [40]. Mais même un droit fondamental peut se voir apporter des limitations justifiées par l’intérêt public.

Une expansion contenue de la responsabilité administrative

21 Si la responsabilité administrative paraît aujourd’hui « générale », elle n’est pas « absolue », pour reprendre la terminologie de l’arrêt fondateur, car d’une part le juge pose des limites à la victimisation, et d’autre part il laisse subsister des résidus d’irresponsabilité, dont la justification demeure assez obscure, sauf à y voir encore la rémanence de la souveraineté.

22 1) Les limites posées à la victimisation ne sont pas dénuées de toute considération morale, malgré ce que cette appréciation peut avoir de dérangeant. Ainsi, lorsque le législateur « combat » la jurisprudence Perruche de la Cour de cassation pour décider que « nul ne peut se prévaloir d’un préjudice du seul fait de sa naissance » [41], il accrédite l’idée que la naissance est un bienfait, même si l’enfant est atteint d’un handicap, et il condamne ainsi, non seulement le droit à réparation de l’enfant, mais aussi le droit à réparation des préjudices subis par les parents, seul admis par le juge administratif avant l’intervention de la loi. De la même façon, le juge administratif a voulu tarir les réclamations des ayants droit des personnes déportées pendant l’Occupation, en jugeant que les diverses mesures prises par l’État français pour indemniser leurs enfants « doivent être regardées comme ayant permis, autant qu’il a été possible, l’indemnisation des préjudices de toute nature causés par l’action de l’État » [42]. N’est‑ce pas signifier que les victimes ne peuvent pas indéfiniment demander réparation de leur malheur, alors même que l’indemnisation peut paraître dérisoire au regard de la souffrance subie, et qu’il ne faudrait pas qu’elles puissent être considérées comme cherchant à en tirer profit ? Le juge précise en effet que « la réparation des souffrances exceptionnelles endurées par les personnes victimes des persécutions antisémites ne pouvait toutefois pas se borner à des mesures d’ordre financier ». La compensation financière serait ainsi impropre à réparer certains préjudices moraux, telle l’impossibilité d’assouvir un besoin de vengeance par la tenue d’un procès pénal, devenu impossible après le suicide de l’accusé en prison. Le juge administratif considère que la victime n’est de ce fait privée « d’aucun droit propre » et qu’elle ne subit pas de préjudice personnel [43], confirmant ainsi implicitement que le préjudice se définit toujours comme la lésion d’un droit personnel subjectif. Par conséquent, il semble que le droit subjectif soit tout à la fois la mesure d’une plus grande effectivité de la responsabilité administrative et l’instrument de sa limitation, le juge se faisant, en l’absence de loi, l’arbitre de ce qui est droit subjectif.

23 2) Quelques résidus d’irresponsabilité subsistent paradoxalement. Après avoir effacé les scories de l’irresponsabilité, que constituaient la non indemnisation des servitudes d’urbanisme et le forfait de pension [44], le juge administratif a curieusement renoué avec la souveraineté « à contre‑courant » de l’expansion de la responsabilité administrative, en jugeant que « les opérations militaires ne sont, par nature, pas susceptibles d’engager la responsabilité de l’État, y compris sur le fondement de la rupture de l’égalité devant les charges publiques » [45]. Cette solution réserve toutefois le cas où une disposition législative expresse serait de nature à fonder « un éventuel droit à réparation », comme cela a systématiquement été le cas pour les conflits armés dans le passé, mais dans le cadre différent de la solidarité nationale. On peut penser que la notion d’acte de gouvernement, qui a été reconnu exister dans l’opération militaire en cause [46], constitue encore « la victime » de la tendance à la généralisation de la responsabilité administrative, à défaut d’être un « monstre ».

24 Une esquisse de conclusion, tournée vers l’avenir de la responsabilité, pourrait faire espérer qu’un autre type de responsabilité administrative se dessine, orienté non plus exclusivement vers la réparation, mais vers ce qu’on a pu appeler « la préparation consciente et éclairée de l’action » [47] et qui est parfois désigné par le terme de « responsabilisation », destinée, à l’adresse des acteurs publics, à éviter les dommages en respectant l’obligation de ne pas nuire à autrui et en se laissant guider par un principe de précaution raisonnablement entendu.

Bibliographie

  • Conseil d’État (2005), Rapport public 2005, Responsabilité et socialisation du risque, Paris, La documentation française.
  • Deguergue, Maryse (1994), Jurisprudence et doctrine dans l’élaboration du droit de la responsabilité administrative, LGDJ, Bibliothèque de droit public, tome 171.
  • Duguit, Léon (1913), Les transformations du droit public, Paris, Armand Colin, rééd. La mémoire du droit, 1999.
  • Husson, Léon (1947), Les transformations de la responsabilité. Étude sur la pensée juridique, Paris, PUF, Bibliothèque de philosophie contemporaine.
  • Faire, François (1923), Les transformations des principes de la responsabilité en droit public et privé, Thèse, Paris.
  • Frank, Alexis (2008), Le droit de la responsabilité administrative à l’épreuve des fonds d’indemnisation, Paris, L’Harmattan, coll. Logiques juridiques.
  • Hauriou, Maurice (1896), « Les actions en indemnité contre l’État pour préjudices causés dans l’administration publique », RDP, p. 51‑65.
  • Melleray, Fabrice (2009), « Les arrêts GIE Axa Courtage et Gardedieu remettent‑ils en cause les cadres traditionnels de la responsabilité des personnes publiques ? » in Terres du droit : Mélanges en l’honneur d’Yves Jégouzo, Paris, Dalloz, p. 489‑500.
  • Moreau, Jacques (2011), « La responsabilité administrative », in Gonod Pascale ; Melleray, Fabrice ; Yolka, Philippe (dir.) (2011), Traité de droit administratif, Paris, Dalloz, t. 2, p. 632‑676.
  • Truchet, Didier (2000), « La structure du droit administratif peut‑elle demeurer binaire ? À propos des catégories juridiques en droit administratif » in Clés pour le siècle, Paris, Dalloz, p. 443-464.

Mots-clés éditeurs : classification, effectivité, droits subjectifs, irresponsabilité, droit à réparation, administration, Responsabilité, fondements

Date de mise en ligne : 25/11/2013

https://doi.org/10.3917/rfap.147.0575

Notes

  • [1]
    On admettra la césure temporelle adoptée par le professeur Jacques Moreau qui fait commencer la période moderne en 1990, époque à laquelle le juge administratif a admis pleinement la supériorité du droit européen sur le droit interne.
  • [2]
    Nous nous permettons de renvoyer sur ce point, et pour éviter toute répétition, à notre article, L’exorbitance du droit de la responsabilité administrative, in Melleray, Fabrice (dir.) (2004), L’exorbitance du droit administratif en question(s), Paris, LGDJ, p. 201.
  • [3]
    CE, Ass., 29 décembre 1978, Darmont, Rec. p. 542 ; AJDA 1979, n° 11, p. 45, note M. Lombard ; D. 1979, 279, note M. Vasseur ; RDP 1979, p. 1742, note J.M. Auby.
  • [4]
    CE, 2 novembre 2005, Société coopérative agricole Ax’ion, Rec. p. 468 ; AJDA 2006, p. 142, chr. C. Landais et F. Lenica ; RFDA 2006, p. 349, concl. M. Guyomar, note C. Guettier ; RDP 2006, p. 1427, note C. Broyelle.
  • [5]
    DC n° 99‑419 du 9 novembre 1999, Loi relative au pacte civil de solidarité, RDP 2000, p. 203, note P. Blacher et J.B. Seube ; JCP 2000, I, 280, note G. Viney.
  • [6]
    À ce mouvement se rattache le livre de André Demichel (1978), Le droit administratif ‑ Essai de réflexion théorique, Paris, LGDJ où il considère, dans une perspective critique du système capitaliste, que la responsabilité administrative est « une procédure patrimoniale utilisée comme mode de gestion des services publics », car « le service public accepte de payer pour éviter d’avoir à bien fonctionner » (p. 157).
  • [7]
    DC n° 99‑421, 16 décembre 1999, Loi portant habilitation du gouvernement à procéder par ordonnance à l’adoption de certains codes, AJDA 2000, p. 31, note J.E. Schoettl.
  • [8]
    Voir sur ce point Pontier, Jean‑Marie dir. (2008), Les états intermédiaires en droit administratif, Aix‑en‑Provence, PUAM et notre contribution sur « Les états intermédiaires en matière de responsabilité », p. 87.
  • [9]
    CE, Ass., 28 juin 2002, Ministre de la Justice c/ Magiera, AJDA 2002, p. 596, chr. F. Donnat et D. Casas ; RFDA 2002, p. 756, concl. F. Lamy.
  • [10]
    CE, Ass., 8 fév. 2007, Gardedieu, Rec. Lebon, p. 78, concl. L. Derepas ; RFDA 2007, p. 525, note D. Pouyaud ; AJDA 2007, p. 585, chr. F. Lenica et J. Boucher.
  • [11]
    Par l’arrêt Darmont précité à la note 3.
  • [12]
    CE, 18 juin 2008, Gestas, RFDA 2008, p. 755, concl. C. De Salins, p. 1178, note D. Pouyaud. Sur cette question, voir Muscat, Hélène (2011), « La responsabilité du fait du contenu d’une décision de justice. Réflexions liées à la position de la juridiction administrative », in Mélanges François Julien‑Laferrière, Bruxelles, Bruylant, p. 429.
  • [13]
    Voir la démonstration de Broyelle, Camille (2008), Le risque en droit administratif « classique » (fin du XIX, milieu du XXème siècle), RDP, p. 1513, voir p. 1516.
  • [14]
    Sur l’ambiguïté du principe d’égalité devant les charges publiques, Debard, Thierry (1987), L’égalité devant les charges publiques : fondement incertain de la responsabilité administrative, D., chr. p. 157.
  • [15]
    CE, Ass., 9 avril 1993, Bianchi, RFDA 1993, p. 573, concl. S. Daël.
  • [16]
    CE, 9 juillet 2003, APHP c/ Marzouk, Rec. p. 338 ; AJDA 2003, p. 1946, note M. Deguergue, dont la compatibilité avec le droit de l’Union européenne a été reconnue par CJUE, 21 décembre 2011, CHU de Besançon, AJDA 2011, p. 2505, ce qui consolide l’application de cette jurisprudence : CE, 12 mars 2012, CHU de Besançon, AJDA 2012, p. 575.
  • [17]
    CE, S., 12 octobre 2009, Mme Chevillard, AJDA 2009, p. 2170, chr . S.J. Liéber et D. Botteghi.
  • [18]
    Selon la terminologie employée par l’article L. 110‑1 du code de l’environnement issu de la loi Barnier du 2 février 1995, terminologie qui a été modifiée dans l’article 5 de la Charte de l’environnement qui donne une nouvelle définition du principe de précaution, qui n’est pas rigoureusement identique à celle donnée par le code.
  • [19]
    CE, 31 août 2009, Commune de Crégols, AJDA 2009, p. 1824, chr . S.J. Liéber et D. Botteghi.
  • [20]
    C’est Georges Teissier qui a le premier rattaché l’équité et la justice au principe de l’égale répartition des charges entre les citoyens in La responsabilité de la puissance publique, Répertoire Béquet, 1906, t. 23, p. 104 à 107, réédition La Mémoire du Droit, 2009, p. 177.
  • [21]
    CE, S., 11 février 2005, GIE Axa Courtage, Rec. p. 45, concl. Devys ; RFDA 2005, p. 595, concl. Devys, p. 602, note P. Bon ; AJDA 2005, p. 663, chr. C. Landais et F. Lenica ; JCP A 2005, 1132, note J. Moreau.
  • [22]
    CE, S., 1er février 2006, Ministre de la Justice C/ MAIFRFDA 2006, p. 602, concl. M. Guyomar, p. 614, note P. Bon ; AJDA 2006, p. 586, chr. C. Landais et F. Lenica.
  • [23]
    CE, 13 novembre 2009, Ministre de la Justice c/ Association tutélaire des inadaptés, Rec. p. 462 , JCP?A 2010, p.?40, concl. I.?de Silva, p.?43, note N.?Albert?; JCP?G 2010, p.?41, note A.?Van Lang.
  • [24]
    CE, 17 décembre 2010, Garde des Sceaux c. Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme, AJDA 2011, p. 1696, note D. Pollet‑Panoussis.
  • [25]
    A cet égard Benoit Plessix (2003) a bien montré dans sa thèse les effets de ce type d’emprunt, L’utilisation du droit civil dans l’élaboration du droit administratif, Paris, Ed. Panthéon‑Assas, notamment dans le domaine de la responsabilité, p. 746 à 751.
  • [26]
    Cornu Gérard (1951), Etude comparée de la responsabilité délictuelle en droit privé et en droit public, Reims, Matot‑Braine, p. 249, 264 à 279, qui systématise la position déjà soutenue par Boris Starck (1947) dans sa thèse, Essai d’une théorie générale de la responsabilité civile considérée en sa double fonction de garantie et de peine privée, Paris, Rodstein, p. 37 à 44 notamment.
  • [27]
    Nous nous permettons de renvoyer à notre étude Deguergue, Maryse (2009), Les sources constitutionnelles de la responsabilité administrative, in Bioy, Xavier (dir.) (2009), Constitution et responsabilité, Paris, Montchrestien, coll. Grands colloques, 2009, p. 145.
  • [28]
    DC n° 99‑419 du 9 novembre 1999, précitée à la note 5.
  • [29]
    CE, S., 18 juin 2001, Commune de Venelles, Rec. p. 18, concl. Touvet ; RFDA 2001, p. 681, note M. Verpeaux ; AJDA 2001, p. 153, chr. M. Guyomar et P. Collin.
  • [30]
    Sur les rapports entre responsabilité administrative, droits de l’homme et droits fondamentaux, voir Belrhali‑Bernard, Hafida (2010), « La responsabilité administrative au service de la protection des droits de l’homme », in Mathieu, Martial (dir.) (2010), Droits naturels et droits de l’homme, Grenoble, PUG, 2010, p. 359 et Rouyère, Aude (2011), « Droits publics subjectifs des administrés et droits fondamentaux », in Les droits publics subjectifs des administrés, Paris, Litec, Travaux de l’AFDA, Tome 4, p. 73.
  • [31]
    Pour un historique de la perte de chance, voir notre contribution, La perte de chance en droit administratif, in Koubi, Geneviève, Guglielmi, Gilles J. dir. (2000), L’égalité des chances, Paris, La Découverte, coll. Recherches, p. 197.
  • [32]
    CE, S., 5 janvier 2000, Consorts Telle, APHP de Paris, Rec. p. 5, concl. D. Chauvaux ; RFDA 2000, p. 641, concl. D. Chauvaux, note P. Bon ; AJDA 2000, p. 137, chr. M. Guyomar et P. Collin.
  • [33]
    CE, S., 21 décembre 2007, Centre hospitalier de Vienne, AJDA 2008, p. 135, chr. J. Boucher et B. Bourgeois‑Machureau.
  • [34]
    CE, 8 avril 2009, Laruelle, AJDA 2009, p. 1262, concl. R. Keller. Dans le même sens, pour l’accueil des enfants autistes dans les classes primaires : CE, 16 mai 2011, Mme Beaufils, AJDA 2011, p. 1749, note H. Belrhali‑Bernard. Pour le droit au logement opposable, CAA Paris, 20 septembre 2012, M. B., AJDA 2012, p. 1767, confirmant TA Paris, 17 décembre 2010, M. B., AJDA 2011, p. 690, note H. Belrhali‑Bernard.
  • [35]
    Belrhali‑Bernard, Hafida (2011), Note sous TA Paris, 17 décembre 2010, M. B., AJDA, p. 690. Il est remarquable que par un avis contentieux le Conseil d’État ait vu dans le recours en responsabilité la possibilité de rendre effectif le droit au logement opposable : CE, avis, 2 juillet 2010, Maache, AJDA 2010, p. 1948, note S. Robert‑Cuendet.
  • [36]
    CE, Ass., 22 octobre 2010, Mme Bleitrach, AJDA 2010, p. 2207, chr. D. Botteghi et F. Lallet, à propos du retard à réaliser les travaux pour rendre tous les bâtiments publics accessibles aux personnes handicapées et du préjudice anormal et spécial causé à une avocate qui ne pouvait pas accéder en fauteuil roulant aux juridictions de son barreau.
  • [37]
    Directive n° 2004‑35 du 21 avril 2004, JOCE 30 avril 2004, p. 56 ; Loi n° 2008‑757 du 1er août 2008, JORF 2 août 2008, p. 12361.
  • [38]
    CE, Ass., 9 mars 2007, Schwartz et Commune de Grenoble, AJDA 2007, p. 861, concernant la présomption de causalité entre la vaccination contre l’hépatite B et l’apparition de la sclérose en plaques, arrêt dont la portée a été élargie récemment à l’aggravation d’une pathologie existante avant la vaccination par CE, 17 février 2012, Mme A., req. n° 331277.
  • [39]
    CE, 19 octobre 2007, Blin, AJDA 2008, p. 597, note N. Albert.
  • [40]
    CE, S., 26 mars 2000, APHPRec. p. 167, concl. D. Chauvaux.
  • [41]
    Loi n° 2002‑303 du 4 mars 2002, JORF, 5 mars 2002, p. 4118.
  • [42]
    CE, avis, 16 février 2009, Hoffmann‑Glémane, AJDA 2009, p. 589, chr. S.J. Liébert et D. Botteghi.
  • [43]
    CE, Ass., 19 juillet 2011, Bégnis, AJDA 2012, p. 223, note H. Belrhali‑Bernard.
  • [44]
    Par les arrêts CE, S., 3 juillet 1998, Bitouzet, RFDA 1998, p. 841, note D. de Béchillon ; AJDA 1998, p. 570, chr. F. Raynaud et P. Fombeur ; et CE, Ass., 4 juillet 2003, Moya‑Caville, AJDA 2003, p. 1598, chr. F. Donnat et D. Casas.
  • [45]
    CE, 23 juillet 2010, Société Touax, AJDA 2010, p. 2269, note H. Belrhali‑Bernard.
  • [46]
    CE, 5 juillet 2000, Mégret et Mekhantar, AJDA 2001, p. 95, note Y. Gounin.
  • [47]
    Expression empruntée à Mazères, Jean‑Arnaud (2001), « Recherche sur les fondements méta‑éthiques de la responsabilité » in Vers de nouvelles normes en droit de la responsabilité publique ?, Colloques du Sénat, 11‑12 mai 2001, p. 325.

Domaines

Sciences Humaines et Sociales

Sciences, techniques et médecine

Droit et Administration

bb.footer.alt.logo.cairn

Cairn.info, plateforme de référence pour les publications scientifiques francophones, vise à favoriser la découverte d’une recherche de qualité tout en cultivant l’indépendance et la diversité des acteurs de l’écosystème du savoir.

Retrouvez Cairn.info sur

Avec le soutien de

18.97.14.80

Accès institutions

Rechercher

Toutes les institutions