La mise en évidence de l’accroissement progressif l’interdépendance des pays au sein de l’espace européen pourrait laisser penser à un processus auto-entretenu d’institutionnalisation de l’Europe. Afin d’éviter d’adopter une conception mécanique, potentiellement déterministe, de cette dynamique, il est donc nécessaire de rendre compte des stratégies des acteurs qui se sont mobilisés afin de l’orienter.
Or, les principaux modèles explicatifs qui se sont affrontés pour expliquer la construction européenne [Haas, 1958 ; Moravcsik, 1998 ; Stone Sweet et Sandholtz, 1998a] partagent une caractéristique commune, issue notamment de l’économie politique internationale [Grossman, 2003] : le rôle central des intérêts économiques, censés être des moteurs de l’intégration européenne. Par ailleurs, les laboratoires pharmaceutiques font partie des acteurs économiques les plus puissants financièrement et leurs liens avec les pouvoirs publics sont régulièrement dénoncés. Afin de redéployer leurs stratégies politiques, ils se sont regroupés au niveau européen dans une fédération bien organisée, l’EFPIA. Les théories générales de l’intégration européenne et les analyses du poids des multinationales pharmaceutiques convergent donc vers une compréhension de la formation d’une régulation sanitaire européenne des médicaments comme le résultat d’un lobbying réussi des firmes pharmaceutiques.
Cette vision est effectivement véhiculée par des travaux de sciences politiques [Greenwood, 1995, 1997] et de sociologie [Abraham et Lewis, 2001]…
Date de mise en ligne : 01/04/2012