La création de l’EMEA s’insère dans un mouvement plus général d’établissement d’agences européennes. Depuis le début des années 1990, ce modèle institutionnel exerce un attrait indéniable au niveau communautaire et semble s’affirmer comme une solution pour prendre en charge les problèmes contemporains, comme le montre la création d’une agence alimentaire après le scandale de l’ESB, d’une agence maritime après la catastrophe de l’Erika ou plus récemment d’une agence chargée de la cybersécurité. Malgré certaines réserves de la Commission quant à la portée du recours aux agences et l’attribution à celles-ci de pouvoirs décisionnels, les travaux menés sur la réforme de la gouvernance européenne ont confirmé la volonté des institutions européennes de poursuivre ce mouvement. Ce phénomène, avec par exemple la méthode ouverte de coordination [Dehousse, 2004a], est donc l’une des manifestations les plus affichées des nouvelles manières de faire l’Europe. Or, dans les débats sur l’élaboration de nouvelles agences, par exemple dans le cas de l’agence alimentaire [Lafond, 2001], l’EMEA est présentée comme une référence centrale voire même comme une réussite à imiter [Everson et al, 1999, p. 15]. Preuve de cette valeur de modèle, Fernand Sauer, principal artisan et premier directeur de l’EMEA, a été nommé responsable du groupe de travail sur les agences pour la préparation du Livre blanc sur la gouvernance européenne. Après avoir analysé l’élaboration des avis eux-mêmes, il est donc essentiel de comprendre cette structure en tant qu’instrument de la production d’une régulation sanitaire européenne [Lascoumes et Le Galès, 2004] et son fonctionnement réel…