La réflexion sur l’articulation entre la représentation nationale, propre à la situation européenne, et l’expertise scientifique est enchâssée dans une interrogation plus large sur les liens entre l’expertise scientifique et le politique. La place croissance des technologies dans notre vie quotidienne et dans les questions politiques, ce que certains ont appelé la société du risque [Beck, 2001], en ont fait un enjeu central. Ce problème a été souvent traité à travers une réflexion sur les frontières de la science et l’utilisation des savoirs scientifiques dans le gouvernement. La nature spécifique du travail scientifique lorsqu’il est réalisé en lien avec des décisions politiques a été soulignée. Le rôle des scientifiques dans les processus décisionnels a aussi été interrogé : c’est le centre du travail de Sheila Jasanoff comme l’atteste le sous-titre de son fameux livre The Fifth Branch consacré à la consultation des comités d’experts : Science Advisers as Policymakers [Jasanoff, 1990].
Les travaux de sciences sociales se sont généralement attachés à déconstruire le « mythe » de l’expertise scientifique [Joly, 2005] et à remettre en cause le paradigme technocratique : l’idée d’une répartition souhaitable et possible des tâches entre des scientifiques, chargés de produire une connaissance, et des acteurs politiques/administratifs, qui ont la responsabilité de prendre des décisions grâce à ce savoir. Ce paradigme repose en effet sur une vision de la science qui a été ébranlée par la mise en évidence de l’influence des intérêts et des orientations normatives des scientifiques sur leurs résultat…
Date de mise en ligne : 01/04/2012