L`activité consistant à contrôler les médicaments repose sur la réalisation d’une expertise scientifique, c’est-à-dire sur la consultation de spécialistes chargés par des mandants de leur fournir un avis sur des décisions à prendre. Cette centralité de l’expertise scientifique dans le contrôle sanitaire du médicament a joué un rôle moteur dans le mouvement d’intégration européenne puisque, comme nous l’avons vu, les comités d’experts ont permis l’élaboration de normes communes et l’établissement de relations de confiance entre autorités nationales. Il est tentant de voir alors dans l’émergence d’une régulation européenne des médicaments un mouvement de rationalisation technocratique. D’un enjeu stratégique pour l’économie nationale directement contrôlé par les responsables politiques, le contrôle sanitaire des médicaments serait devenu une activité technique réalisée par des experts a-nationaux. Or, les délégués nationaux n’agissent pas hors de toute référence nationale. Les prises de décision européennes nécessitent la difficile formation de préférences collectives et le dépassement de désaccords qui prennent la forme d’affrontement entre pays. Comment s’articulent alors l’expertise et les fonctions de représentation nationale ? Par ailleurs, il peut paraître étrange que nous n’ayons, jusqu’à maintenant, pas eu besoin d’évoquer (par exemple à l’occasion de l’étude des relations entre les régulateurs et les industriels) le passage de l’évaluation du bénéfice/risque du produit à la décision d’AMM…
Date de mise en ligne : 01/04/2012